Red Dead Redemption 2 est un grand jeu vidéo qui m’a personnellement laissé pantois. Il est aisé de critiquer les titres de mauvaises factures, il est aussi plus simple de pointer les défauts, les aberrations ou les bugs mais tellement plus complexe d’adresser d’honnêtes louanges et se cantonner aux aspects positifs d’un jeu quand celui-ci le mérite. Après plus d’une centaine d’heures à sillonner l’immense terrain de jeu offert par Rockstar en compagnie d’Arthur Morgan, j’admets ne pas avoir pris une claque vidéoludique comme celle-ci depuis longtemps. En termes technique, le monde ouvert de Red Dead Redemption 2, sorti fin 2018, est indétrôné à ce jour. Cela en dit long sur les capacités des développeurs de chez Rockstar lorsqu’on sait que les prémices du projet datent de 2010. Je ne compte plus le nombre de fois où je me suis arrêté pour contempler le paysage, l’horizon et sa distance d'affichage ahurissante, les effets de lumière, la météo changeante, un coucher de soleil, la faune… Encore aujourd’hui, Red Dead Redemption 2 est une claque technique sans précédent sur PC, à condition d’avoir une belle bécane bien entendu. Au-delà du codage et des connaissances liées au métier du développement, j'ai pris conscience qu’il existait un véritable « savoir-faire » dans le monde du jeu vidéo. Rockstar en est la démonstration la plus probante et son moteur « maison » (RAGE) est à l’origine de cette prouesse. Comment est-il possible d’atteindre un tel degré de réalisme dans un titre sorti en 2018, préparé au milieu de la décennie 2010, et avoir l’outrecuidance d’être à ce jour le plus beau monde ouvert malgré le bond technique de ces trois dernières années ? C’est de la folie pure. Je vous passe la tonne de surprises qu’arbore cet univers, le nombre de PNJ et leur réalisme comportemental, la crédibilité photographique des environnements, des animaux ou le souci du détail apporté aux animations ou aux décors… le tout sans bug sinon ce n’est pas drôle. Techniquement ce jeu est une merveille, un véritable voyage à portée de main dans l’ouest sauvage américain du début du XXème siècle.


Côté scénario, nous ne sommes pas en reste et c’est un doux euphémisme. Il s’agit clairement du point fort du titre avec la technique. Je me risquerais même de dire qu’en terme de narration, on frôle le septième art. C’est quasiment du cinéma, la manière de filmer les actions, de mettre en scène les nombreux personnages principaux et secondaires, de transitionner entre les phases de cinématiques et de gameplay, les plans (la possibilité de mettre une vue cinéma pendant les voyages), les rebondissements… Red Dead Redemption 2, à l’image d’ailleurs de la plupart des jeux de la maison Rockstar, est un titre très très cinématographique. L’ambition est là et le résultat aussi. Après, on aime ou pas, je peux comprendre mais clairement l’histoire m’a fait l’effet d’une montagne russe. On commence doucement car l’histoire prend vraiment un certain temps à démarrer puis, la première pente péniblement grimpée, on entame la descente infernale à toute vitesse. Et là, accrochez-vous les amis car vous allez vivre une aventure riche en rebondissements ! Je trouve cette analogie probante et révélatrice de ce qui vous attend dans cette fabuleuse, surprenante et émouvante épopée. La narration atteint un niveau de détail sans précédent, franchement c’est du délire. Les relations entre les personnages sont tellement bien narrées, complexes, subtiles. Idem pour la psychologie des personnages principaux… Un travail de malade a été accompli pour donner vie à la bande de Dutch van der Linde, un boulot colossal qui transcende le manichéisme habituel et le politiquement correct. La générosité des équipes de développement laisse le joueur sans voix grâce à une histoire longue et haletante, des quêtes secondaires à foison et grâce surtout à un épilogue inattendu servant de lien avec le premier épisode. Epilogue qui aurait pu, selon le modèle économique de l’industrie actuelle, faire l’objet d’un DLC payant à part entière sans être qualifié de honteux. Mais non, Rockstar vous livre un jeu complet, sans DLC, sans skins payants, sans passe de combat… un jeu à l’ancienne, généreux et total. C’est tout simplement la grande classe.


Même si le rendu d’ensemble et l’émotion portée par un scénario de haute volée donnent véritablement envie d’oublier ses défauts, la super production de Rockstar n’en est pas dénuée. Ils sont connus, je les ai vu les amis, je ne suis pas aveuglé par mon admiration mais on a envie de tout pardonner car des titres comme Red Dead Redemption 2, c’est un tous les dix ans. Alors qu’est-ce qui peut gêner le joueur occasionnel et le plus confirmé ? La lenteur du scénario au départ peut franchement dégoûter le joueur occasionnel qui a besoin rapidement d’ampleur, de but clair et d’un sentiment d’accomplissement rapide. L’histoire met au moins cinq chapitres pour vraiment démarrer soit environ 15-20h. C’est long pour commencer à appréhender l’intrigue. Par contre ce même joueur occasionnel ne trouvera rien à redire au gameplay hiératique. Le même gameplay depuis GTA IV sorti en 2008 pour rappel. Tandis que le joueur un peu plus averti reprochera un consternant manque de prise de risque. Votre personnage est un paquebot d’une lenteur agaçante et peu agile. Le système de visée, repris de GTA, consistant à : « gâchette gauche j’auto-lock, gâchette droite je tire » montre très rapidement ses limites. On se fait chier dans les escarmouches, heureusement qu’elles sont nerveuses et bien mises en scène. L’interface est surannée et laborieuse. Clairement, nous sommes en présence d’un titre du début des années 2010 et non 2018. Et l'IA n'est que la représentation vidéoludique du kamikaze japonais, elle est un peu conne et adore s'empaler à découvert sur vos balles. Enfin, dernier défaut mais compréhensible quand on connaît Rockstar, aucune liberté n’est laissée au joueur pendant les missions. Il est impossible d’aborder une mission comme on l’entend, tout est scripté de A à Z, le joueur à l’obligation de suivre ce que les développeurs ont prévu, point à la ligne. Il s’agit du contrepoids à l’aspect très cinématographique du jeu. Tout au long de l’aventure, nous sommes constamment sur une ligne de crête entre production vidéoludique et cinématographique. Je prends à témoin la fameuse caméra pendant les phases de dialogues/déplacements, les nombreuses cinématiques, l’emphase scénaristique digne des meilleures productions du 7ème art, les voyages en silence sous fond de musiques mélancoliques dans le dernier tiers du jeu (ceux qui ont terminé savent de quoi je parle) etc.


Nonobstant ce paragraphe listant les problèmes de Red Dead Redemption 2, défauts qui, par ailleurs ont été évoqués trois milliards de fois avant moi, ce jeu demeure un chef d’œuvre absolu qu’il est impératif de vivre. Il fait partie des meilleurs jeux de la décennie 2010-2020, sans hésiter et même un des meilleurs jeux vidéo de tous les temps dans sa catégorie. Le monde ouvert est magnifique. L’ambition portée dans sa création est déraisonnable, le souci du détail est sans équivalent, le réalisme bluffant, la beauté émouvante. Techniquement irréprochable pour un jeu de 2018, Red Dead Redemption 2 est également porté par une histoire de haute intensité. La finesse psychologique force le respect, le travail sur les relations entre les personnages est remarquable et donne une envergure tout particulière à cette épopée. Il est aussi important de rappeler la générosité du studio car des tonnes de surprises vous attendent. Je ne compte plus le nombre d’événements aléatoires croisés lors de mes pérégrinations, les œufs de Pâques à foison, la tonne d’armes à tester, d’animaux à chasser, de plantes à récolter et d’objets à fabriquer. L’immersion est totale. On se surprend même à jouer RP alors qu’on est en solo face à des PNJ. C’est ridicule le degré de réalisme atteint par Rockstar. Côté gameplay, au bout d'un certain temps d'adaptation, on parvient à appréhender correctement Arthur Morgan et passer outre la lenteur. Bref, mettez votre plus beau Stetson sur la tête et embarquez pour un voyage sans équivalent au cœur de l’ouest sauvage américain ! Je recommande vachement !


silaxe
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Les meilleurs jeux de western

Créée

le 10 mars 2023

Critique lue 16 fois

silaxe

Écrit par

Critique lue 16 fois

D'autres avis sur Red Dead Redemption II

Red Dead Redemption II
Hunter_Arrow
8

Ce jeu fabuleux mais que je ne peux aimer... Ou l'ironie du temps qui passe.

Avant de commencer, si vous êtes choqués par la note que j'ai attribué à ce jeu vous devez comprendre la chose suivante : pour moi une note n'a aucune valeur en soi quant à évaluer un jeu ou un film...

le 28 oct. 2018

97 j'aime

46

Red Dead Redemption II
Nicolas_S
10

Une dernière chevauchée

(spoilers) Quand on lance Red Dead Redemption II, on ouvre la porte vers une aventure, celle d’Arthur Morgan et de la bande dont il fait partie, dirigée par un charismatique truand à l’idéologie...

le 4 nov. 2018

93 j'aime

12

Red Dead Redemption II
jeds
7

La possibilité d'un jeu

Voilà donc le chef d'oeuvre absolu, celui qui va redéfinir pour les 20 années à venir notre vision du jeu vidéo. Les propos dithyrambiques fusent, l'unanimité est atteinte, Red Dead Rédemption 2 est...

Par

le 7 nov. 2018

67 j'aime

12

Du même critique

Fondation - Le Cycle de Fondation, tome 1
silaxe
5

Il était une fois dans une lointaine galaxie...la déception.

Je vais probablement fâcher beaucoup d'entre vous mais personnellement je n'ai pris aucun plaisir à la lecture de ce premier tome du célèbre cycle d'Asimov. N'étant pas un lecteur adepte de...

le 19 juil. 2015

20 j'aime

7

La Domination masculine
silaxe
8

À lire et à relire !

Il faut dire qu'on fait difficilement plus efficace, plus fort et plus clair que l'écriture de Pierre Bourdieu. Un professeur de sociologie absolument brillant qui s'attaque ici à un sujet difficile...

le 17 janv. 2015

18 j'aime

7