C’est avec une profonde tristesse qu’il me faut vous annoncer que le pronostic vital de la série Tomb Raider est engagé. Son état de santé ne s’est pourtant pas aggravé depuis 2013 et l’impact de son reboot (Tomb Raider), il s’est même sensiblement amélioré en 2015 avec Rise of the Tomb Raider. Pourtant, les résultats montrent que ce traitement ne sera efficace que sur une courte période, et qu’il faut dès à présent réfléchir à une solution si l’on souhaite sauver cette série dans les années à venir.


Petit rappel des faits : en 2013, Crystal Dynamics a proposé un nouveau traitement dans la prise en charge de son patient. Cette nouvelle formule marquait un changement d’orientation considérable. Même en prenant soin de ne pas critiquer cette nouvelle orientation seulement du fait de ses différences avec la précédente (bien que cela me chagrine car j’en suis un grand admirateur), j’avais un certain nombre de reproches à lui adresser.
Le problème que je soulevais n’était pas tant la présence de scènes d’actions ou l’accent mis sur la mise en scène hollywoodienne, c’était davantage celui d’une mauvaise gestion du dosage. A mes yeux, Tomb Raider (2013) n’arrivait jamais à se saisir avec intelligence de l’aventure qu’il cherchait à raconter (de manière sérieuse dans sa narration qui plus est).
Premièrement, son goût invétéré pour la mise en scène, pour les situations destructrices et/ou explosives, pour l’étalage des meurtres à la pelle ne s’accordait pas avec l’histoire sensible et humaine (déjà pas vraiment réussie) que Rihanna Pratchett (la scénariste) essayait vainement de raconter.
Deuxièmement, ces mêmes points ne s’accordaient pas non plus avec le véritable game design du jeu, à savoir une orientation maligne du joueur vers l’exploration, la découverte, la résolution d’énigmes simples consistant à découvrir comment à accéder à telle plate-forme dans tel décors pour récupérer tel objet. Et c’est sur ce point-là qu’à mes yeux il y avait un énorme problème de dosage. On ne s’y retrouvait plus entre ces deux éléments contradictoires, surtout quand en matière de rythme le jeu faisait n’importe quoi en enchaînant soudain de nombreuses séquences toutes plus invraisemblables les unes après les autres, jusqu’à réussir à provoquer en moi un dégoût qui ne m’a toujours pas quitté.


La mise à jour du traitement en 2015 avec Rise of the Tomb Raider corrige à mes yeux une très grande partie de ces défauts. C’est en ce sens une véritable réussite, un jeu enthousiasmant, une aventure très souvent passionnante et palpitante à parcourir.


Cet épisode conserve le corps de la formule qui avait été proposée en 2013. C’est-à-dire que l’on incarne une nouvelle fois une Lara jeune, vivant ses premières aventures, dans des niveaux mêlant des hubs ouverts favorisant l’exploration et des séquences d’action dans des décors plus fermés. Il est possible de traverser le jeu en ligne droite mais il est peu avisé de le faire, tant en termes d’amélioration du personnage qu’en termes de plaisir de jeu.
Cette formule est cette fois-ci épargnée par certaines grandes tares de celles du précédent opus. Bien que les scènes d’action restent du même acabit, le rythme est cette fois-ci beaucoup plus travaillé, de même que le dosage entre les différentes séquences de sorte à ne pas (trop) énerver le joueur. Ce n’est que lors de la fin du jeu que ces scènes d’actions un peu too-much se multiplieront, mais cela ne me gêne du fait de leur justification scénaristique et du fait que l’aventure nous avait épargné jusque-là tout en nous préparant à ce final « épique ». De plus, Crystal Dynamics a enlevé tous les systèmes de QTE qui n’apportaient rien au game design de l’opus de 2013 et qui avaient été vivement critiquées.


Nous sommes donc plus à l’aise pour profiter des qualités du titre, à savoir celles d’un jeu d’action/aventure efficace. J’aime les jeux de chasse au trésor et ce plaisir me vient certainement des premiers Tomb Raider. Je tombe donc rapidement sous le charme d’une nouvelle aventure me proposant de débusquer des secrets enfouis depuis des millénaires.
A ce titre, les décors visités en Sibérie possèdent un véritable charme et découvrir des sépultures anciennes ou autres tombeaux abandonnés est toujours aussi grisant. Rise of the Tomb Raider nous montre d’ailleurs de bien belles ruines et arrive à impressionner plus d’une fois. Cependant, on aurait aimé être davantage impressionnés. Cette impression est sans doute accentuée à cause de tous les niveaux se situant dans une base soviétique. Si ceux-ci sont agréables à parcourir ils ne sont en aucun cas mémorables et rappelle bien trop le niveau du Kazakhstan dans Tomb Raider Legend. Et puisqu’on est amené à y passer un certain temps, il devient un des décors dont on se rappelle le plus quand on pense à Rise of the Tomb Raider… à son plus grand dam. L’autre point négatif concernant les décors est que la plupart de ceux qui sont très réussis rappellent quant à eux beaucoup trop Uncharted 2 : Among Thieves. Les décors de ces deux jeux sont en effet très semblables et les paysages de vallées ou de cavernes de glaces font tout de suite échos aux aventures de Nathan Drake. C’est vraiment dommage car c’est en partie à cause de cela que l’on débouche sur les plus gros défauts du jeu, que je détaillerai plus tard : le fait qu’il ne soit pas mémorable.
Malgré cela, explorer les décors reste un véritable plaisir, notamment tout le hub paradisiaque de la vallée qui émerveille et donne envie d’y passer quelques semaines de vacances.


Le développement de l’histoire de Rise of the Tomb Raider est au centre de toute la dimension action du titre. Si dans les faits il s’agit la plupart du temps d’un jeu d’exploration (exploration de zone, escalade, résolution d’énigmes annexes, etc…) la narration qui liera les séquences entre elles à un tempo rythmé sur une action exacerbée. Dans cet épisode, Lara se retrouvera confrontée à une organisation, Trinity, pourvue d’une armée de mercenaires. Cette histoire permettra de lever le voile sur de grands mystères familiaux… bref, classique dans le fond.
Trop classique même par moment puisque le grand méchant, Konstantin, rappelle beaucoup le grand méchant de… Uncharted 2. Tant dans son chara design que dans ses différentes actions. Et c’est vraiment dommage car Konstantin avait de nombreux éléments de son côté pour être un méchant unique et mémorable. C’est un personnage religieux dont les vocations sont intéressantes… malheureusement, on ne fera pas grand-chose de ces éléments intéressants.
Même s’il appuie moins son scénario que Tomb Raider 2013, Rise of the Tomb Raider met tout de même l’accent sur sa narration avec de nombreuses cinématiques, mettant parfois en scène Konstantin discutant avec ses alliés. Il est triste de constater que la saga Tomb Raider ne se contente que d’avoir de bonnes idées mais ne s’essaie jamais à les développer pour tisser des portraits intéressants. Mathias, méchant du précédent opus, était déjà effacé et réduit à de brèves motivations. Ici, si Konstantin se révèle intriguant, les dialogues sont beaucoup trop sur-soulignés pour que l’on y croie réellement.


De la même manière, je dois avouer en toute franchise ne pas être fan de la nouvelle Lara Croft. La précédente manquait grandement d’écriture, il est vrai, mais on ne faisait pas de son évolution personnelle un intérêt narratif. On s’en fichait d’ailleurs pas mal. Ici, on essaie une nouvelle fois de nous faire croire que l’histoire est profonde, que le développement des personnages est tout en finesse, que Lara est pleine d’émotion et qu’elle est enfin « humaine ». Mais moi, je n’y crois toujours pas à la nouvelle Lara Croft. Oui, elle encaisse des coups et elle sait très bien crier quand elle a mal, et elle a tout un tas de problèmes identitaires qu’elle s’amuse à nous raconter à chaque feu de camp… mais l’écriture ne suit pas. Et pourtant, dans l’idée initiale, ces monologues aux feux de camp forment une idée géniale. C’est un personnage qui se retrouve seul, livré à lui-même, perdu, face à toutes ses peurs et motivations, qui se livre humainement. C’est beau. Mais non. Sans être nul, ce n’est pas réussi, et la plupart du temps on se fiche de ce qu’elle raconte tant c’est mièvre.
Mais ce n’est pas pour ça que je n’accroche pas à la nouvelle Lara Croft. En soi, je la trouve terriblement badass, débordante de classe et de confiance en elle, et j’adore la contrôler car on sent que c’est un personnage fort. Mais dans l’écriture elle est beaucoup trop lisse, sans aucune faille. Lara déborde de bienveillance, elle est douce, gentille, elle veut le bien. Ces points sont surlignés dans son écriture… et d’une certaine façon elle arrive à être touchante. Mais à cause de cela, je n’arrive pas à croire que ce personnage massacre des centaines de mercenaires sans pitié, qu’elle les explose au fusil à pompe dans des finish-moves sanglants, qu’elle soit aussi hargneuse et hardcore. Au bout d’un moment, dans la conception d’un jeu, il ne faut pas oublier que le gameplay fait partie du storytelling. Et l’histoire que nous raconte le gameplay, c’est que Lara Croft est violente et agressive. Or, constamment, le jeu nous rappelle qu’elle est gentille et que l’histoire nous compte son « ascension » («Rise of ») pour nous montrer comment elle s’est endurcie et est devenue la Lara des jeux précédents. Oui mais non, car Lara est déjà endurcie, elle est même beaucoup plus hardcore que dans les jeux précédents. Quelque chose ne colle pas et je n’y crois pas.


Un autre point mis en avant par l’histoire, c’est toute la partie familiale tournant autour du père de Lara. De la même manière, je trouve également qu’il y a de bonnes idées dans cette démarche, mais que celles-ci ne sont réduites qu’à des prémices intéressantes et ne sont pas développés. Du coup, puisque le jeu nous raconte tout de même comment est-ce que le père de Lara est mort, et que ce n’est pas rien dans la mythologie de la série, je n’aime pas ce qui a été fait.
Je ne trouve pas que cela sert l’évolution du personnage de Lara, tout juste cela ajoute-t-il un intérêt dramatique à cette aventure, mais rien de plus. Alors je n’aime pas que l’on touche à la mythologie Tomb Raider pour raconter des conneries. Mais j’imagine que c’est ici un point de vue très personnel.


Pourtant, au-delà de ces aspects, Rise of the Tomb Raider a une dimension mystique intéressante et c’est de loin ce que j’ai préféré dans cette aventure. Toute l’intrigue du prophète et de son peuple m’a vraiment intéressé et reste plutôt bien développé même si, bien sûr, ce n’est pas non plus un chef d’œuvre de subtilité.
Mais ces éléments mystiques brassent également le chaud et le froid. Si l’histoire racontée est sympathique, les passages du jeu où l’on verra des éléments surnaturels déçoivent cruellement. Pour résumer très simplement, les cinématiques ou les éléments de mises en scène ont beaux nous montrer des ennemis « surnaturels » puissants voire invincibles, dans les faits, dans le gameplay, il n’y a strictement rien qui les différencie des autres ennemis du jeu. Et puisque le gameplay participe également au storytelling, difficile d’être impressionné par ces ennemis quand bien même l’histoire nous raconte que l’on devrait l’être…


Si j’ai choisi de parler de l’histoire pour amorcer sur la dimension « action » du jeu, c’est parce que la narration est véritablement construite pour développer l’action. Plus qu’une simple course à l’artefact (comme son homologue Uncharted 2), l’histoire sera véritablement celle d’une confrontation, presque celle d’une résistance face au feu de l’ennemi. C’est un axe intéressant en termes d’écriture qui nous positionne en tant que joueur dans une posture différente et change notre rapport à l’action qui se déroule sous nos yeux. Nous sommes attaqués, nous n’avons pas d’autres choix que de nous défendre.


Les scènes d’action sont cependant étranges. Alors que j’avais un souvenir très nerveux des gunfights du Tomb Raider 2013, j’ai trouvé que le feeling de celui-ci n’était vraiment pas aussi bon. Heureusement, cela s’améliore plus on améliore nos armes, mais ça n’atteint jamais les sensations dont j’ai souvenir. Mais de ce fait, le jeu privilégie bien plus l’infiltration que la confrontation, et le level design des arènes est clairement construit dans ce sens. Cependant, si au début cela se révèle intéressant du fait du faible équipement que l’on possède, la suite du jeu rendra ces scènes-là beaucoup trop faciles grâce aux flèches dégageant un nuage empoisonné, permettant de tuer en une flèche un groupe entier d’ennemis. Il est par ailleurs important de noter que l’IA des ennemis est complètement à la rue, ce qui nous facilite grandement les choses mais ce qui détériore grandement le plaisir de jeu.
Concernant les séquences vraiment « mises en scène », toutes en explosion et éboulement, celles-ci se révèlent aussi mauvaises que celles du précédent. Je dis « mauvaises » mais cela ne concerne que moi, je sais que certains ont aimé celles de Tomb Raider 2013, ils aimeront assurément celles-ci. Mais, à mes yeux, il manque véritablement une maîtrise.
Quand je vois les séquences mises en scènes de Rise of the Tomb Raider, je me dis vraiment que Crystal Dynamics ne sait pas faire. La caméra n’opère aucun mouvement intéressant, ne met jamais en valeur l’action qui se déroule… et surtout, tout s’écroule ou explose en même temps. Il y a trop de tout, et ainsi pas assez d’ « exceptionnel ». Rien ne se démarque dans cette escalade de la surenchère, tout se ressemble, et finalement ces scènes d’action en tous genres ne font sens que parce que c’est « le moment de la scène d’action ». Il n’y a pas de surprises, il n’y a pas d’adrénaline, il n’y a rien d’impressionnant car tout est classique et n’est pas mis en valeur comme il se doit. A ce titre, toute l’introduction du jeu m’a paru bien pauvre tant tout y est scripté et générique, sans laisser de place au joueur, sans le laisser apprécier quoi que ce soit, ne serait-ce qu’apprécier son aventure. Et je pense qu’il est très important de laisser cette place au joueur dans ce type de jeu d’aventure, il ne doit pas simplement être baladé de script en script, mais doit avoir le sentiment de vivre quelque chose.
Heureusement, comme je le disais, ces séquences sont correctement dosées au fil du jeu et permettent donc de ne pas se lasser. Quelques-unes sont plutôt réussies, la plupart son anecdotiques, et l’intensité finale est over-the-top mais a le mérite de ne pas être désagréable à jouer.


Le traitement proposé par Crystal Dynamics, dans sa version améliorée de 2015, pourrait donc théoriquement faire le plus grand bien à la série Tomb Raider. Il s’agit en effet d’un cocktail surprenant d’exploration, de découvertes, de voyages à travers le globe, mais aussi d’action et d’aventure grand spectacle. Rien qui, à priori, ne semble contraire à l’esprit initial de Tomb Raider. A condition, bien sûr, de privilégier l’exploration à l’action, mais c’est ce que Crystal Dynamics propose globalement.
Mais en réalité non, pour moi ce traitement ne fonctionne pas réellement. Il permet de créer de bons jeux, mais finalement pas pour créer un Tomb Raider efficace, et ce pour plusieurs raisons que je vais m’empresser d’étayer.


Premièrement, même si Crystal Dynamics implémente des éléments d’exploration dans leur game design, on ne se sent que trop rarement dans un jeu ayant parmi ces caractéristiques principales l’exploration.
Depuis le reboot, l’exploration dans Tomb Raider repose essentiellement sur des mécaniques d’upgrade. C’est-à-dire que le joueur ne doit pas explorer pour trouver son chemin, résoudre des énigmes qui l’aideront à avancer, mais simplement pour récupérer des objets par-ci par-là qui n’ont pas de lien avec la quête principale. L’exploration est en réalité une mécanique secondaire. Lara explore pour récupérer… des bouts de bois, des feuilles, quelques trésors et textes à dénicher qui donnent des informations sur le backgroud, mais n’explore pas pour avancer. Ce loot aide tout de même à la progression puisqu’il permet d’upgrader son équipement, d’upgrader Lara, de posséder de nouvelles aptitudes qui nous permettront de devenir plus forts, ainsi de suite. Mais ces mécaniques sont celles que l’on trouve généralement dans des jeux à monde ouvert (le récent Mad Max, par exemple) ou tout simplement, comme c’est le cas des nouveaux Tomb Raider, des jeux mettant en avant des systèmes de crafting (The Last of Us fait de même, dans une moindre mesure).
L’exploration aide donc le joueur à progresser mais n’est donc pas nécessaire à la progression. Elle enrichit malgré tout le jeu en proposant de nombreux objectifs secondaires, comme différentes mini-quêtes par exemple, et rend donc l’ensemble un peu plus intéressant et donne l’illusion au jeu d’être vraiment complet. Mais il y a bien plus d’objectifs secondaires que ce n’est réellement nécessaire, on arrive très vite à avoir les upgrades qui nous sont nécessaires, et au bout d’un moment l’amélioration des armes et les nouvelles aptitudes ne font plus de réelles différences. Ainsi, au bout d’un moment, l’exploration n’aura d’intérêt que pour les joueurs cherchant à compléter le jeu à 100%. Ceux-ci ne s’ennuieront pas, la tâche leur est d’ailleurs facilitée grâce aux différentes cartes montrant on se trouve les différents objets à récolter, mais on se retrouve avec un système de complétion propre à beaucoup d’autres jeux.
De ce fait, on sent que l’on explore pour compléter le jeu, pour s’améliorer, mais pas pour le plaisir d’explorer ni pour progresser dans l’aventure. Ainsi, je trouve que ce game design nuit complètement au sentiment d’exploration propre à Tomb Raider. Comble du comble, la saga Uncharted (pour reprendre cet exemple), une saga présentant dans les faits moins d’exploration que ces derniers Tomb Raider, offre davantage de sentiment d’exploration puisque celle-ci est incluse dans véritablement dans les enjeux narratifs. Bien sûr, l’histoire de Rise of the Tomb Raider conte bel et bien une chasse au trésor et donc une mission d’exploration, mais la narration se focalise tellement sur l’action et le conflit qu’on en oublie quelque peu l’aventure exploratoire derrière celle-ci. De plus, les Uncharted proposent au sein de leurs niveaux des énigmes et des phases d’exploration (certes dirigées) pour permettre la progression… ce que les nouveaux Tomb Raider oublient de faire.
En effet, même si l’esprit Tomb Raider est fondamentalement là, quelque part, au sein du game design de ces nouveaux opus, il n’est pas présent dans la trame principale. Les tombeaux anciens dont il faut résoudre l’énigme ne font toujours pas partie de l’histoire mais sont relayés au second plan. L’aventure de Lara, si on la résume aux actions obligatoires, consiste seulement à progresser dans des décors, faire de l’escalade, affronter plein d’ennemis, traverser des lieux anciens et atteindre son objectif. Et, au cours de cette quête, nous n’aurons pas à explorer pour trouver notre chemin, on se contentera de suivre une direction et le scénario… Et puisque ce scénario choisit de raconter un film d’action, ce n’est pas l’exploration suggérée par le background que nous retiendrons.


L’autre point essentiel qui nuit à la série Tomb Raider, c’est son absence de direction artistique identitaire. Certes, le jeu est beau et ses décors sont réussis dans leur ensemble, comme je l’ai déjà évoqué… mais ils ne sont pas propres à la franchise. Nous sommes à une époque où les jeux vidéo tendent à mettre de plus en plus en avant des paysages colorés, de moins en moins termes, de plus en plus recherché et agréables à l’œil. Ainsi, dans cette mouvance, Rise of the Tomb Raider est joli mais ne se distingue pas. Pire, comme je l’ai déjà dit, il rappelle Tomb Raider Legend et Uncharted 2.
Il manque à ce jeu, et à cette série depuis le reboot, ce qui fait son identité. Artistiquement, c’est très joli mais c’est quelconque. Les décors de ce jeu peuvent être ceux de n’importe quelle autre série d’aventure. Mais il n’y a pas que les décors qui sont à incriminé, il y a aussi la musique et la direction sonore de manière générale.
Même si Bobby Tahouri, le nouveau compositeur, reprend assez souvent le thème principal composé par Jason Graves et donne ainsi une petite identité à la série sur le plan musical, il n’y a pas suffisamment de choses identifiables. Jason Graves avait composé une soundtrack sombre, loin d’être sa meilleure, mais parfaitement dans le ton de l’opus de 2013. Tahouri, lui, ne propose pas grand-chose de différent et compose essentiellement des thèmes accompagnant l’action mais qui ne sont à aucun moment authentifiables ou reconnaissables. C’est une OST sympathique (bien que très inférieure à celle de Graves) mais totalement privée d’identité ou d’un souffle qui lui correspondrait. Or, la saga Tomb Raider a longtemps été connue et reconnue pour ses thèmes musicaux, pour son atmosphère sonore unique qui passait beaucoup par ces musiques marquantes. Ici, on s’éloigne encore un peu plus d’une notion d’identité de la saga.


Ce problème identitaire n’est pas uniquement propre à la direction artistique mais se reflète dans l’ensemble du jeu. Passons sur le scénario classique et sans approfondissement (à une époque où les joueurs attendent des éléments plus profonds) que nous avons déjà abordés… Le système du jeu, en lui-même, n’arrive pas à trouver son identité. Les nouveaux Tomb Raider sont coincés entre une action hollywoodienne, un gameplay TPS, et une volonté de conserver l’exploration dans son game design. Malheureusement, Crystal Dynamics implémente ces différents éléments sans former de tout cohérent et ces différentes caractéristiques en viennent à perdre leurs sens.
Dans l’idée, une alliance parfaite de ces éléments formerait un jeu excellent. Dans les faits, Rise of the Tomb Raider, comme le précédent épisode, est un jeu coincé entre plusieurs chaises qui ne donne pas l’impression de savoir où aller ni quoi proposer. Il n’évoque pas du tout un jeu parfaitement maîtrisé mais plutôt un gros brouillon qui tient miraculeusement debout.


La formule actuelle permet de créer de bons jeux, des jeux efficaces et plaisant, mais ne crée pas ces jeux dont on se souviendra, qui se dégagent de l’ensemble de l’industrie. Il est trop proche d’un peu tout sans tirer son épingle du jeu avec une véritable identité… Et, alors que son prédécesseur avait au moins réussi à créer la surprise en faisant renaître une icône en actualisant sa formule, Rise of the Tomb Raider quant à lui ressemble beaucoup trop à un clone amélioré de son grand frère et n’en devient que plus anecdotique parmi les productions actuelles.
Crystal Dynamics a besoin de travailler ce qui fait l’identité de sa franchise, de ce qui la démarque, de ce qui fait qu’elle sort du lot. Cela peut-être son héroïne, véritable icône populaire, mais dans ce cas l’écriture nécessite d’être grandement améliorée. Mais à mon avis cela doit notamment se faire au sein de ces systèmes de jeu. Je ne leur suggère pas de retirer leur dimension action, bien trop ancrée et peut-être nécessaire afin de créer un succès populaire, mais simplement de créer quelque chose d’efficace et de cohérent en tenant compte de l’identité de la série.
Car, la seule chose qui démarque un jeu d’un autre, c’est bien son identité. Plus celle-ci se noiera dans la masse, moins le jeu sortira du lot et deviendra intéressant… Et, au contraire, plus cette identité sera travaillée, plus le jeu deviendra intéressant et mémorable.


C’est en travaillant une refonte de leur game design, de leur direction artistique et de leur écriture que Crystal Dynamics pourra assurer la survie de la série Tomb Raider.
C’est pour cela que nous vous annonçons aujourd’hui que le pronostic vital de Tomb Raider est engagé. Si nous poursuivons le même traitement, cette saga sera condamnée à sombrer dans l’oubli et ne trouvera plus sa place dans l’industrie.


J’insiste bien, encore une fois, pour dire que Rise of the Tomb Raider est réellement un bon jeu. Il est agréable à parcourir, il offre beaucoup de plaisir de jeu, mais le fait de manière plus ponctuelle. Amateurs du précédent épisode, vous trouverez ici un jeu très plaisant, mais peu mémorable.
Rise of the Tomb Raider souffre d’un problème de taille pour une aussi grande saga : le fait qu’il soit aussi efficace qu’anecdotique.

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le 22 janv. 2016

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