The 3rd Birthday
6.7
The 3rd Birthday

Jeu de Square Enix et Hexa Drive (2011PSP)

Troisième opus d'une licence protéiforme jamais vraiment définie (survival-horror? action/aventure? RPG?), The 3rd Birthday s'affranchit de son héritage en laissant tomber le patronyme Parasite Eve. Pour le meilleur ou pour le pire?

Premier point que l'on remarque d'emblée en lançant le jeu, nous avons affaire ici à un actioneer décomplexé, très éloigné des précédents épisodes. Finis les décors en pré-calculé et les angles de caméra fixes, au revoir années 1990, et bonjour aux couloirs et à la caméra au-dessus de l'épaule, décidément dans l'air du temps. De même, The 3rd Birthday étant un TPS pur jus, n'espérez pas y trouver de quelconques énigmes, un inventaire ou des clés pour ouvrir les portes, ici on se contente d'avancer tout droit, tuer des ennemis, passer à la salle suivante et tuer encore plus d'ennemis.

Une mécanique de jeu quelque peu bas du front qui sera très probablement vécue comme une trahison pour les fans intégristes de la série (moi le premier), mais le jeu arrive tout de même à se démarquer par une exécution (presque) sans faille. L'aspect technique, déjà, est globalement solide, en particulier les graphismes qui font honneur à une PSP en fin de vie, le tout servi par une fluidité à toute épreuve. Dans son genre, The 3rd Birthday s'impose sans complexe en seigneur aux côtés de Peace Walker et autres Logan's Shadow, avec des environnements certes moins vastes mais particulièrement réussis, et des effets de lumière très corrects.

Le jeu brille d'autre part grâce à son gameplay qui est une réussite quasi-totale. Contrairement aux titres cités plus haut, The 3rd Birthday opte pour la sobriété la plus totale dans son système de contrôle, ce qui se traduit par une visée automatisée, et une caméra qui tente de se faire la plus discrète possible. Hexa Drive, développeur de cet opus, a su tenir compte des spécificités de la PSP (handicapée d'un deuxième stick) pour aboutir à un système simple mais très efficace sur console portable, là où Peace Walker et ses remaniements de caméra incessants deviennent rapidement gonflants. Á noter que le jeu propose deux caméras, une éloignée libre, et une rapprochée fixe, en fonction des préférences personnelles.

Les développeurs ont enrichi cette base déjà solide par quelques subtilités, elles aussi dans l'air du temps: un système de couverture et de gestion des troupes. D'un classicisme inébranlable en apparence, ces deux éléments de gameplay jouissent d'une fraîcheur bienvenue avec l'introduction de l'Overdive. Difficile à expliquer sur le papier, l'Overdive permet concrètement à Aya d'incarner n'importe quel soldat présent sur le champ de bataille. Un système qui paraît trivial en plein combat, mais qui montre rapidement ses nécessités afin de survivre aux niveaux de difficultés avancés. Un ennemi vous barre la route? Transférez vers un soldat dans son dos pour lui refaire les fesses. Besoin d'utiliser une arme en particulier? Recherchez un soldat qui la possède puis incarnez-le. Pas facile à gérer au début, l'Overdive se montre rapidement indispensable dans certains passages, d'autant que c'est aussi la clé de voûte d'une offensive bien maîtrisée. En effet, le jeu ne propose pas de système d'ordre afin de gérer ses troupes, tout s'effectue en micro-management, soldat après soldat. Les troufions gérés par l'ordinateur ayant des comportements de lemmings, il sera nécessaire de les guider un par un afin d'éviter de les voir se faire croquer par le premier monstre venu. Une démarche un peu fastidieuse que l'on aurait bien voulu un poil plus assistée, avec un système global d'ordres par exemple, mais qui permet d'attaquer l'ennemi exactement comme on le souhaite. Seule concession à l'automatisme, le joueur a la possibilité de lancer une attaque groupée sur un ennemi en particulier, à condition d'avoir des soldats à couvert. On devine donc rapidement l'intérêt de passer d'un personnage à un autre afin de placer de manière optimale ses troupes et infliger un maximum de dégâts.

Aya a en outre la possibilité d'effectuer une Overdive sur des ennemis blessés afin de leur infliger des dégâts supplémentaires, un mouvement dangereux mais qui s'avère souvent payant. En ajoutant à cela une jauge de Libération à remplir, pseudo-furie permettant d'envoyer des tirs sur-puissants, et un arsenal complet et customisable, les possibilités tactiques ne manquent pas. Des possibilités qui s'étendent grâce à la carte ADN de l'héroïne (l'unique élément un tant soit peu RPG du jeu), consistant en une grille de 9 cases sur 9, qu'il faudra remplir avec des puces récupérées à force d'Overdive sur alliés et ennemis. Ces puces confèrent des capacités spéciales à Aya, comme un boost permanent de défense ou la possibilité de ressusciter après être tombée sur le champ de bataille. Comme ces capacités sont nombreuses et évoluent avec le temps, on aura tout intérêt à partir à la chasse aux puces comme un chinois farme les pièces d'or sur WoW.

Dommage cependant que l'on soit régulièrement pris par la main par rapport à l'approche à adopter (si un monstre apparaît très difficile à tuer au premier abord, il y a 100% de chances qu'un soldat possédant l'arme adéquate pour le liquider apparaisse soudainement sur le champ de bataille). D'autre part, le bestiaire pas très varié (le nombre total de créatures, boss compris, se compte sur les doigts de deux mains) provoque une rapide lassitude.

Ce manque de variété est d'autant plus dommageable au jeu que l'aventure principale se boucle entre 6 et 8 heures, sans autre mode de jeu pour se défouler. La replay value du titre se base sur ce mode unique, permettant de débloquer au fur et à mesure des tours de nouvelles armes et de nouveaux costumes. Si l'exercice est sympathique le temps de finir le scénario en easy, normal puis hard (comptez 20 heures en moyenne, mais n'espérez pas finir le jeu en hard lors d'une première partie, à moins d'avoir les cojones de Machete et Chuck Norris réunis), il montre rapidement ses limites lorsque l'on prend conscience que le seul intérêt est d'y récupérer de nouvelles armes suffisamment puissantes pour survivre aux niveaux de difficultés extrêmes. On se retrouve donc à faire les six mêmes missions en boucle pour... rien? C'est un peu l'essence-même du jeu vidéo après tout, mais je pense tout de même qu'il faudra griller un sacré fusible pour finir le jeu 30 fois (30!) afin d'obtenir le costume de Lightning (FFXIII) sans devenir fou.

Avec un intérêt sur le long terme relativement limité, j'étais plus enclin à accorder un petit 6 au jeu. Pourquoi 7 alors? Parce que... Parce que, même si tirer sur les mêmes ennemis pendant des heures afin de gonfler ses stats peut paraître neuneu, je me suis pris avec plaisir au jeu, d'autant que l'usage nomade (en théorie) de la PSP s'accorde bien avec ce genre d'expérience (Metal Gear Solid et Monster Hunter jouent à fond sur cette carte). Quant à l'ambiance, elle est fidèle dans les grandes lignes à la série, et mérite d'autant plus de s'y attarder. Aya Brea a toujours un certain charisme, les ennemis ont des gueules entre le bizarre et l'inquiétant (des bigorneaux géants, des raies volantes qui se gonflent comme des ballons, des araignées avec une ampoule à la place de la tête...), certains thèmes musicaux des deux premiers épisodes ont été réutilisés...

Même si l'on a affaire à un pur jeu d'action, la mythologie Parasite Eve a été respectée, ce qui n'en rend que plus attrayante l'expérience. Á condition de faire abstraction du scénario, plutôt grotesque et mis en scène idiotement. Tous les poncifs du Japanese WTF y passent, de l'héroïne étrangement liée aux incidents, aux voyages dans le temps, jusqu'aux traîtres cachés dans le placard, en passant par la scène de mariage et le fan service à foison, ce maelström est d'autant plus indigeste qu'il est censé faire suite à deux sommités du genre. Les cinématiques ont beau être très bien réalisées, on finit par les observer mollement et sans grande passion pour l'histoire, et l'on peste contre leur lenteur parfois insoutenable (ok c'est jap, mais c'est aussi un jeu d'action, un peu de tonus dans la mise en scène ne fait jamais de mal). Des cinématiques par ailleurs suffisamment lacunaires pour ne présenter qu'un tiers du véritable scénario, laissant au joueur le soin d'aller se renseigner avec les dizaines de textes que contient le codex. Ces textes sont plus intéressants et présentent le scénario dans toute sa cohérence, alors pourquoi les avoir mis de côté au profit de scènes totalement japaniaisantes?

Est-ce que ce scénario abracadabrantesque m'a empêché de profiter du jeu? Pas spécialement, si là encore on garde à l'esprit qu'il s'agit d'un jeu pour console portable et que la forme finit par l'emporter sur le fond. C'est exactement ce dont il s'agit ici: malgré une ambiance très bien rendue, la substantifique moelle de Parasite Eve se retrouve altérée par ce scénario bien porté sur le saké. Reste un jeu à la forme impeccable, superbement réalisé, proposant une action frénétique et un gameplay particulièrement solide. Parfaitement recommandable pour les amateurs de la série qui recherchent un bon spin-off doublé d'un jeu d'action de haute volée, parfaitement dispensable pour ceux qui s'attendent à un Parasite Eve 3.
HarmonySly
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le 4 avr. 2011

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