Pfiouuuuu...


90h de jeu après avoir réveillé Link de son sommeil séculaire, je regarde défiler les crédits de fin de jeu avec deux convictions à l'esprit : la première, que je viens de jouer à un chef d'oeuvre absolu, une claque monumentale qui marquera le jeu vidéo et qui peut d'ores et déjà être considéré comme culte ; la seconde, qu'il faut absolument que je fasse une critique de ce jeu, mais que la tâche semble insurmontable tant il y a de choses à dire dessus, et tant de choses ayant déjà été dites.


Enfin bon, je vais m'efforcer d'essayer d'apporter un avis qui n'ait pas déjà été exprimé des centaines de fois.



Des premières expérimentations sur 3DS...



The Legend of Zelda : Breath of the Wild donc, marque indéniablement une rupture dans la licence mythique, même si cette rupture avait été amorcée quelques années plus tôt, en 2013 précisément, avec l'épisode A Link Between World sorti sur 3DS, et sur lequel je vais me permettre de revenir afin d'apporter un peu de contexte. ALBW était déjà une petite révolution dans la saga Zelda puisqu'il apportait la possibilité de compléter les donjons dans l'ordre de son choix. En effet, l'intégralité des items étaient disponibles dès le début du jeu grâce à un système de location, permettant ainsi au joueur d'aller où bon lui semblait, aucun obstacle n'étant infranchissable du moment que le joueur avait loué l'item nécessaire. Cette nouveauté avait ses avantages et ses inconvénients, faisant de ALBW une réussite mais pas forcément le chef d'oeuvre qu'il aurait pu être. Côté avantage, l'exploration était plus que jamais mise en avant : toutes les directions s'offraient au joueur, qui n'était alors plus enfermé dans une quête linéaire et avait tout loisir à visiter Hyrule comme bon lui semblait, ne connaissant plus la frustration de devoir faire marche arrière et remettre à plus tard un gouffre infranchissable sans grappin. Côté inconvénients, les donjons dans Zelda étant traditionnellement centrés autour d'un item qu'il faut généralement trouver dans le dit donjon, ici le fait d'arriver directement avec l'item en poche les rendait de fait beaucoup moins retors à parcourir. Nous avions donc un concept pas encore suffisamment bien exploité, mais qui promettait de grandes choses pour le futur de la licence...



...Au chef d'oeuvre sur Wii U / Switch.



Et force est de constater que les équipes de Nintendo ont pris bonne note des retours sur ALBW et ont transformé l'expérience maladroite en un concept maîtrisé. La liberté et l'exploration ça vous a plu ? On va vous en donner une triple dose ! Les donjons avec toutes les clés en main dès l'entrée, c'est pas terrible ? Et bien tant pis, à la poubelle, à la place voici 120 mini-donjons cachés un peu partout sur la carte !
Au final, jamais un jeu n'a autant rimé avec "exploration" que Breath of the Wild. Une fois passées les premières heures sur ce tutoriel géant qu'est le Plateau du Prélude, le joueur est littéralement jeté dans le vide et entre dans un monde immense à en donner le vertige. À partir de là, que faire ? Oh, et bien tu peux aller par là... Ou par là... Ou tiens, ça a l'air intéressant par là aussi... Vous êtes entièrement libre de vos mouvements, tout est accessible dès le départ, et tout, dans BotW, ça fait beaucoup. Car la grande force de ce jeu est de proposer un monde immense et qui à la fois incarne l'opposé total de "vide". Bien sûr, il y a les 120 sanctuaires, les 900 noix korogus (quoi que pour le coup je me demande quel genre de cerveau malade trouvera du plaisir à les chercher et les trouver jusqu'à la dernière), les innombrables coffres et secrets, et les dizaines de quêtes annexes dont, il faut bien l'admettre, une bonne partie peut tomber sous le qualificatif "Fedex". Mais quand je dis que BotW est l'inverse de "vide", je parle surtout en terme d'exploration. Depuis n'importe quel point de la map, 15 autres points sont susceptibles d'attiser votre curiosité, chacun ayant l'air aussi intéressant et recelant de secrets qui n'attendent qu'à être découverts que d'autres ; aucun lieu de, encore une fois, l'immense carte ne ressemble à un autre, et même si graphiquement le jeu n'est pas à la pointe de la technologie (avec notamment des baisses de framerate régulières), il comble ses lacunes par une direction artistique à couper le souffle, vous offrant à tout instant un paysage à admirer. À vrai dire, mon plus grand regret en jouant à ce jeu sur Wii U fut de ne pas pouvoir profiter d'une fonction de screenshot décente qui m'aurait permis d'inonder les réseaux sociaux avec des prises de vues. Et c'est là la beauté de ce jeu : même si soyons clairs il ne manque pas de récompenses, dans A Breath of the Wild, l'exploration se suffit à elle-même. On ne va pas vers un lieu pour les éventuels trésors qu'il promet, ou parce que telle quête nous le demande, mais simplement parce que ça a l'air sympa à visiter. On se dirige quelque part, puis on est attiré par un élément à l'horizon comme un papillon est attiré par la lumière, alors on fait un détour, puis un autre... Et sans s'en rendre compte on se retrouve à l'autre bout de la carte par rapport à notre direction initiale.



Il est écrit : "Seul Link peut vaincre Ganon"



(J'ai pas d'idée de titre chut)


J'ai jusque là essentiellement parlé du principal aspect de ce jeu à mes yeux : l'exploration. Il reste évidemment tout un paquet de point que je n'ai pas abordé. Le système des armes qui se cassent : j'adhère totalement au concept qui incite à tout le temps explorer son environnement à la recherche d'un nouvel attirail et s'inscrit donc parfaitement dans ce jeu, mais elles sont quand même un peu trop fragiles ; les 4 donjons principaux : même si ils ont une identité très travaillée, ils sont trop courts et marqueront peu les esprits en dehors de leurs gimmicks ; les boss : meh, pour le coup tous, même Ganon, sont très peu inspirés voire décevants (NB : je précise que je ne parle pas ici de leur difficulté ; le boss final de Skyward Sword par exemple était assez simple mais est de par sa mise en scène l'un de mes boss finaux préférés).


Je m'attarderai cependant sur deux derniers aspect du jeu qui méritent je pense d'être un peu plus développés. Le premier est la difficulté : on meurt souvent dans ce Zelda, plus que dans la plupart des autres jeux de la licence. Pourtant, je ne dirais pas que le jeu est particulièrement "difficile", mais simplement qu'il nous force à respecter ses règles. Link peut aller où bon lui semble certes, mais il n'est pas maître de son environnement. Celui-ci peut se retourner contre lui à tout moment, et nous le rappellera régulièrement. Le joueur présomptueux souhaitant accéder à un endroit devra souvent souffrir quelques échecs suivants le forçant à revoir sa feuille de route et se résoudre à effectuer des détours pour atteindre ses objectifs. Toute l'affaire consiste à se poser les bonnes questions : suis-je suffisamment équipé pour affronter ce groupe d'ennemis ? Pour escalader cette paroi ? Pour nager aussi loin ? Si non, il faudra sans doute envisager de trouver un autre chemin, sans doute moins direct, mais plus adapté à ses capacités. Ce jeu est donc "difficile" dans le sens où il nous force à connaitre les limites de notre avatar, sans quoi le retour de bâton sera quasi immédiat. Mais une fois quelques heures de jeu passées, l'expérience aidant, le joueur apprend à évaluer correctement une situation et à s'adapter en fonction de son avancement, et meurt beaucoup moins souvent, même avec un Link encore fragile et loin de son potentiel maximum.


Le deuxième point à aborder est la musique du jeu : loin des symphonies orchestrales auxquelles les grosses productions, Zelda inclus, nous ont habitués, ce jeu nous propose des compositions beaucoup moins "tape à l'oreille", et une bande originale beaucoup plus discrète qu'à l'accoutumée. Ceci a valu à Breath of the Wild plusieurs critiques comme quoi il manque de thèmes marquants. Pourtant cette BO n'a rien à envier à aucune autre. Les thèmes qui la composent sont emprunts d'une mélancolie certaine, ce qui est parfaitement en accord avec l'esprit même de cet univers, l'aventure se déroulant 100 ans après la chute d'Hyrule, dans un royaume dont les ruines témoignent encore de la grandeur passée. De plus, elle est également parfaitement adaptée à un jeu centré autour de l'exploration ; dans un espace dans lesquels le joueur va être amené à passer plusieurs heures, des thèmes plus grandiloquents auraient certainement tendance à prendre la tête. En bref, cette bande-son possède certes peu de grands thèmes marquants et épiques, mais ce n'est en rien un manque puisqu'elle remplit parfaitement le rôle recherché : inciter le joueur à voyager et à se perdre dans un immense terrain de jeu.



La perfection n'existe pas



Il resterait encore de nombreuses choses à dire sur ce jeu, mais je pense avoir déjà fait un pavé suffisamment conséquent comme cela, et je vous remercie par ailleurs si vous m'avez lu jusqu'ici. Il est temps de mettre une note à ce jeu, et en toute honnêteté je ne vois pas comment lui mettre moins de 10/10. Évidemment la perfection n'est pas de ce monde, cette note n'indique donc pas à mon sens un jeu parfait, mais un jeu qui représente une révolution dans son monde, et qui repousse les limites du jeu vidéo en lui offrant de nouveaux horizons. Et c'est exactement ce que fait Breath of the Wild. Certes il est perfectible sur de nombreux points, et j'attends d'ailleurs déjà avec impatience le prochain Zelda qui corrigera à coup sûr ses défauts et perfectionnera ses qualités, mais en attendant il constitue un mètre étalon dans son genre, à savoir l'open world. Ce n'est pas le premier jeu à proposer un monde immense à explorer, mais c'est le premier à le faire de cette manière, en mettant en avant l'exploration pour l'exploration, en offrant un monde que l'on prend un plaisir authentique à visiter, et non pas en se contentant de proposer un bac à sable rempli de quêtes et d'objectifs à remplir. BotW est ce que devrait être un open-world, et tous les jeux de ce genre à venir devront se forcer à suivre son exemple sous peine de subir une impitoyable comparaison. En ce sens sa sortie marque d'une pierre blanche l'histoire du jeu vidéo, voilà pourquoi nous avons ici affaire à un jeu qui mérite sans hésitation la note maximale.

eipiplusun
10

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le 26 avr. 2017

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eipiplusun

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