Souvent quand on joue à un jeu, qu'on l'apprécie ou non, on voit toujours des trucs qui pourraient être améliorés, on se dit « ah mais ça aurait été bien d'avoir plus de trucs comme ça, moins de ce truc relou ». Parce que nul jeu n'est parfait, on voit toujours une piste d'amélioration pour l'épisode suivant. Et parfois, il arrive que le jeu-vidéo en question, sans être parfait, soit tellement cohérent en lui même, tellement en accord avec son concept, qu'on arrive finalement à un truc réellement unique. Une oeuvre dont chaque élément, frustrant ou réjouissant, semble avoir été parfaitement pensé en accord avec l'ambition, et la démarche du projet. Un jeu-vidéo, dont les développeurs ont visiblement été animés par une même idée unique, en vue de livrer une expérience puissante et sans fioriture. Je ne connais pas énormément de jeux de la sorte, mais Breath of the wild en fait assurément partie.


Breath of the Wild est sûrement l'un des plus grand jeux auxquels j'ai joué de ma vie. Voilà, ça c'est dit. Est-il un jeu parfait ? Probablement pas. Est-ce un jeu prenant des premières secondes jusqu'aux dernières ? On n'en est pas loin. Est-ce un jeu qui va jusqu'au bout de son concept, sans en faire de trop, ni trop peu ? Définitivement !


Alors je pourrais bien sûr faire l'éloge pendant plusieurs paragraphes de cette liberté d'action totale, mais tout le monde l'a déjà fait, tout a déjà été dit sur cette liberté. Ainsi, a part vous redire qu'un arbre peut autant nous servir à nous réchauffer, qu'à nous faire un pont de fortune, ou simplement à avoir un point de vue panoramique en l'escaladant, bah je vois pas quoi vous dire que vous n'ayez déjà entendu. Si vraiment vous voulez en savoir davantage sur ce point, je vous renvoie vers la Pseudo-critique du jeu par Pseudoless, qui vous expliquera tout bien mieux que moi. Car le point que je souhaite aborder dans ce texte est bien le jeu dans sa globalité, sans papillonner entre les graphismes et les musiques en passant par le gameplay. Comme dis, tout le monde l'a déjà fait, et probablement bien mieux que je ne l'aurais fait moi-même. Cependant, j'ai l'impression que finalement, bien peu de monde prend le jeu pour ce qu'il a à proposer dans son entièreté.


Pour moi, Breath of the Wild est un jeu sur le poids du passé, et son acceptation pour aller de l'avant. Et cela se traduit dans tous les éléments constitutifs de ce con de jeu. Alors bien entendu, il s'agit du retour de Zelda qui change sa formule après pas loin de vingt ans à ne proposer que des variations de sa recette de base. Le jeu comme son héros se réveillent après une longue hybernation, et doivent repartir de zéro pour s'adapter à un monde qui a bien changé et qu'il ne domine plus. Finalement, Link combat de redoutables ennemis avec les armes de ceux qu'il aura préalablement terrassé, et le jeu applique avec soin et justesse de nombreux éléments de game design et de gameplay ayant émergés ces vingt dernières années dans des jeux « concurrents ». De même, ces armes extrêmement fragiles que l'on ramasse ne sont pas sans nous rappeler de ne pas se reposer sur ses acquis, tant ce monde est en perpétuelle évolution. La roue tourne, comme dirait l'autre, et ce qui était vrai hier ne le sera possiblement pas demain. En 1998, Ocarina of Time reignait en maitre, c'est peut être bien la dernière fois me semble-t-il qu'un Zelda a fait l'unanimité. Majora's Mask a probablement traumatisé un certain nombre de joueurs qui auront décidé de ne pas lui donner la chance qu'il mériterait. Wind Waker s'est fait incendier pour sa direction artistique, au contraire de Twilight Princess qui proposait une aventure moins fraîche et prenante. Skyward Sword quant à lui a réussi à cumuler les critiques négatives de Wind Waker et Twilight Princess, tout en proposant une aventure tristement répétitive. Je ne parle pas des épisodes portables qui ne sont clairement pas restés dans les mémoires, malgré des expérimentations intéressantes.


Puis d'un coup, débarque Breath of the Wild, qui a visiblement écouté en boucle le discours de Rocky Balboa à son fils (https://www.youtube.com/watch?v=-PYRlZVLyAc c'est pour moi, c'est cadeau). Breath of the Wild a tenu compte de tout ce qui était reproché à la saga depuis vingt ans, pour proposer quelque chose de nouveau. Breath of the Wild propose, par ce fait, un voyage similaire à Link et au joueur. Link parcours les terres d'Hyrule à la recherche de ses souvenirs, tandis que le joueur, tombant aléatoirement sur les ruines du ranch LonLon ne pourra pas s'empêcher de s'arrêter un moment pour se rappeler les doux souvenirs laissés par Ocarina of Time. Tous deux se remémorent un passé révolu, pour mieux aller de l'avant. Link se souvient d'éléments que le joueur n'a pas connu, et c'est pour ça que le coup du ranch LonLon (par exemple) fonctionne aussi bien, car il réveille quelque chose au sein du joueur. Un souvenir disparu. Le temps des Zelda « classiques » proposant une aventure épique, avec des musiques grandiloquentes, est révolu. Il faut passer à autre chose. Alors effectivement, pour le fan de Wind Waker et Majora's Mask que je suis, tout ça a été dur à accepter « Où sont les themes ? Où sont les personnages charismatiques ? Où sont mes affrontements épiques » me demandais-je. Eh bien la réponse est toute simple, ils sont en nous. Comme Link, le joueur porte les souvenirs de ses aventures passées et les emmène partout avec lui, dans un monde qui ne s'y prête peut-être plus. Un monde qui a vu et vécu des choses et qui ne peut pas rester enfermé dans sa bulle indéfiniment. C'est peut être un peu la même problématique que pour God of War 4 finalement. Comment faire évoluer une série ancrée dans le passé ? Et là où God of War échoue en ne parvenant pas à proposer quelque chose de neuf et dans la continuité de sa saga, piochant dans ce qui a déjà été fait à droite à gauche pour remplir un cahier des charges, Breath of the Wild réussit. Car Breath of the Wild n'emprunte que ce qui pourrait le servir, et lui être bénéfique. L'ambiance à la Shadow of the Colossus, les combats basés sur la parade et l'esquive rappelant Dark Souls, les collectibles à la con poussant à l'exploration d'un monde immense qui se révèle à nous par le biais de tours d'observation à la Assassin's Creed. Rien de tout cela ne semble faux, tout ces éléments forment une parfaite cohésion pour proposer une expérience moderne ne reniant pas son héritage. D'autant qu'un certain nombres de ses influences sont des jeux qui ont, justement, été influencés par les Zelda. Il y a donc une certaine légitimité dans ces emprunts.


Car comme le disait le Masque dans sa critique vidéo de Silent Hill 2 « vivre [...] c'est la certitude que chaque instant de ta vie que tu vois, tu ne le reverras pas, [...] et qu'en plus, tous les moments que tu vas vivre par après sont contextualisés par ce que tu as déjà vécu, et que tu ne peux plus jamais voir, parce que c'est ton passé. » Et selon moi, ces mots se prêtent parfaitement au jeu-vidéo dont il est ici question. Un jeu qui nous aide à aller de l'avant. Un jeu dont chaque élément semble avoir été pensé et mis en place à cette seule fin. Voilà pourquoi je donne une notation parfaite à ce Breath of the Wild, même si le geste en soi de noter une telle oeuvre me parait étrange au final. Breath of the Wild est aux cotés de Silent Hill 2, et The Phantom Pain, un jeu qui est bien plus que ça.

Player-Fou
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le 14 avr. 2019

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