Le titre n’est pas un attrape nigaud, je considère sincèrement que l’épisode 2 est bien meilleur que le 3. Il y a peut-être des raisons subjectives à ça, mais je crois aussi pouvoir vous proposer des arguments objectifs.
Wild Hunt est un bon jeu, il faut en convenir. Il propose de nombreux moments mémorables. Pour n’en citer qu’un : le passage du baron sanglant et des moires du marais de Torchechine. Il y avait là une ambiance ésotérico-sordide comme je n’ai jamais ressenti ailleurs.
Mais le gameplay de ce jeu est médiocre, convenons en. Suivre les traces avec les sens de sorceleur, puis tuer des ennemis avec un système de combat d’action-rpg générique est d’un ennuis mortel. L’intérêt, me diriez-vous, de The Witcher 3 réside dans son histoire, donc foin du gameplay !
Le problème étant que ce gameplay ruine en partie l’histoire.
Laissez-moi développer cette idée qui nous contentera aujourd’hui de critique.
1) L’open world amolli la trame principale
Geralt doit sauver Ciri qui est poursuivie par la Chasse Sauvage. Il y a donc urgence. Mais le jeu donne une liberté au joueur d’aller où bon lui semble. On peut se perdre dans une kyrielle de quêtes annexes (ou de libre exploitation) qui éclipsent la trame principale et la dilue. Lorsqu’on fait de longs allé et retour sur la carte pour faire des tournois de gwent, retrouver Ciri devient bien dérisoire !
Le scénario d’un jeu doit être pensé conjointement avec le gameplay. Si on fait un monde ouvert, il faut que l’histoire s’intègre dans ce monde ouvert. Si on laisse la liberté au joueur de se déplacer, il faut que ses déplacements ne viennent pas dilater l’histoire et entacher les enjeux. Autrement dit, soit s’occuper du scénario pour qu’il rehausse le gameplay, soit s’occuper du gameplay pour qu’il renforce l’histoire.
Or, l’épisode 2 de The Witcher avait une structure en forme d’acte avec des zones bien délimitées et des tournants scénaristiques qui ouvraient ou fermaient ces zones. Ce qui convenait très bien avec l’histoire (la traque de l’assassin d’un roi notamment). Les quêtes annexes étoffaient l’univers et n’avaient pas d’incidence sur la trame principale.
2) Les choix n’en sont pas
Il y a des choix à faire dans Wild Hunt. Mais ces choix ne mènent à rien de concret, sinon une fin quelque peu différente racontée dans une cinématique rushée. On a une vague influence sur les évènements politiques mais on ne le sens pas en jeu. Ce sont des illusions de choix plutôt que des choix.
En ce qui concerne Ciri, nos choix pousseront à une bonne ou des mauvaises fins. Est-ce encore des choix s’il y en a un bon et plusieurs de mauvais ?
Or dans The Witcher 2, les choix ne sont jamais bons ou mauvais et ont toujours des répercussions qui nous font regretter nos choix. Et c’est là sa grande force car la rejouabilité est renforcée et nous sommes bien plus impliqué dans nos choix.
De plus, il faut choisir entre Iorveth ou Roche (deux salopards charismatiques). Ce qui change grandement la suite de l’histoire puisqu’on entre dans un camp ou l’autre dans une guerre. Plus d’un tiers du jeu change et cela permet d’appréhender l’histoire sous toutes ses coutures.
C’est une vraie force : les choix donnent une dimension supplémentaire à la narration, ce que le cinéma et la littérature ne peuvent pas produire
3) Les quêtes annexes sont redondantes
Les tentatives de narration lors des missions annexes ne parvient pas à nous faire oublier la répétitivité du gameplay. D’autant que ces tentatives de narration ont un structure répétitive : un pécore nous demande de chasser un monstre/enquêter sur un problème lié à un monstre, brève discussion, on doit suivre la bête avec nos sens de sorceleur (insupportable à la longue) et l’affronter dans un combat lourdingue. Même s’il y a toujours une petite histoire qui nous est raconté, la manière de la raconter lui fait perdre sa potentielle saveur.
Or dans The Witcher 2, l’approche est différente. On a un bon nombre de quêtes qui nous proposent de régler les problèmes sans affrontement (mention spéciale au golem qu’on peut embrouiller avec des concepts philosophiques). Et les structures des quêtes secondaires savent se renouveler et évitent souvent de nous contraindre à la boucle de gameplay lassante du 3.
Conclusion :
Il est vrai que je n’aime pas beaucoup les mondes ouverts. Le plus souvent parce qu’ils sont mal employés. Cela peut biaiser mon jugement. Néanmoins, je reste convaincu qu’ils desservent toujours les narrations les plus classiques.