Marathomb Raider : 3/16


Il existe quelques certitudes inébranlables dans l’univers. On peut citer par exemple la loi de la gravitation, l’existence de Pi, la valeur du Zéro Absolu, ou encore le fait qu’un succès commercial engendre nécessairement une suite.
Toute polygonale qu’elle est, Lara Croft n’a pas échappé à cette règle et Core Design s’est tout de suite remis au travail après la sortie du premier épisode de ses aventures, non sans perdre au passage le créateur de la belle, Toby Guard. A peine 13 mois plus tard, les joueurs ont entre leurs mains la suite des aventures de la pilleuse de tombes.


Il s’agit d’un des rares épisodes que j’ai eus entre les mains avant de commencer le marathon, je vais donc vous conter une petite anecdote : nous sommes en 2013, sur les bancs d’un amphi en plein cours de thermodynamique. Mon voisin a téléchargé Tomb Raider 2 sur son PC la veille et y joue actuellement.
Peu passionné par le cours, je louche sur son écran et je finis par l'aider dans sa quête, parce qu’il galère pas mal. Il s’avère cependant que je suis moi-même un très mauvais conseiller puisqu’on n’arrive pas à trouver ce qu’il faut faire pour sortir de la zone dans laquelle il est. Au bout d’1h30, l’amphi se termine et on doit plier bagages, Lara est toujours au point où elle était 90 minutes plus tôt et on ne reprendra jamais l’aventure.


En refaisant le jeu ce mois-ci, je réalise qu’on a tourné pendant plus d’une heure dans le niveau 2. On était des champions.


Comme on peut s’y attendre, Tomb Raider 2 (dont le nom complet est starring Lara Croft, au cas où on aurait oublié le nom de l'héroïne) reprend les bases du premier épisode. On retrouve donc une zone de jeu quadrillée comme un échiquier, des sauts millimétrés et la possibilité de tendre les bras pour grapiller quelques centimètres (après tout, pourquoi changer ce qui fonctionne ?). On retrouve aussi un système de combat ultra-répétitif laissant peu de place à la stratégie.
Commençons d’ailleurs sur ce point-là. Si le système de combat était bancal dans le premier épisode, il était plutôt en la faveur du joueur car peu d’ennemis utilisaient des attaques à distance. Donc il suffisait que Lara soit loin et saute un peu dans tous les sens pour être rarement vulnérable ce qui, à défaut d’être très profond, vous donnait un avantage stratégique.
Pour une raison ou pour une autre, Core Design a décidé que ce serait rigolo que Lara affronte principalement des mafieux armés d’armes à feu dans la suite. Malheureusement, les bouffeurs de pizzas toucheront Lara à chaque balle tirée, peu importe si vous vous trouvez en l’air, au sol ou même dans un angle mort (ils ont un système de visée aussi gratuit que nous, pas de chance), ce qui rend toutes les approches possibles risquées et met vite à mal vos médikits.


Ca rend le début du jeu, peu avare en ennemis, vraiment compliqué à négocier puisque j’avais très rarement plus de deux médikits d’avance dans mon sac. Qu’elle semble loin l’époque où le Pérou faisait office de tutoriel pour les bases du combat et où le level-design vous offrait des positions avantageuses.
Heureusement le jeu se calme un peu sur les combats dans le deuxième monde, ce qui vous permet de vous faire une petite réserve de soins pour le reste de l’aventure. A partir de là, il m’est arrivé d’être en difficulté (certains ennemis sont sans pitié, je pense à ces connards en motoneige) mais j’avais toujours des trousses de soin en cas de coup dur.


C’est d’ailleurs assez drôle d’avoir fait TR2 juste après Anniversary vu que ce dernier insistait beaucoup sur le premier meurtre humain de Lara et montrait qu’elle en sortait chamboulée. Je sais qu’on n’est pas dans la même timeline, mais ici Lara n’en a plus rien à branler, elle a assassiné à peu près tous les hommes valides de Sicile sans moufter. C’est beau un traumatisme qu’on parvient à surmonter.
J’ai lu que cette décision avait été prise par Core parce qu’une des critiques principales du premier épisode était que Lara tuait trop d’animaux et que ça la faisait paraître cruelle. Pas sûr que liquider des mafieux à la chaîne (et enfermer un majordome pétomane dans un frigo) soit beaucoup plus humains que tuer des mutants de l’Atlantide ou des T-rex, mais soit.


L’histoire nous fera voyager à Venise, dans des fonds marins, au Tibet et sur la Grande Muraille de Chine. Des lieux rafraîchissants, souvent à ciel ouvert et qui tranchent avec le sentiment d’isolement qu’on ressentait dans le premier jeu. L'ambiance est donc différente, mais j’aime bien, surtout que les décors sont souvent très détaillés par rapport aux tombes égyptiennes ou péruviennes (pour s’en convaincre, il suffit d’observer les différentes tentures de l’Opéra de Venise). Et il faut bien l’avouer, le boss final (un putain de dragon) est un parfait point d’orgue à une aventure qui se voulait plus orientée action.
Mon monde préféré reste toutefois celui dans les fonds marins qui est incroyablement cool. Outre la gestion de l’oxygène et de la faune locale qui fout un énorme stress sur le dos du joueur, on est amené à visiter une épave de bateau qui s’est retourné en coulant. On se retrouve donc à marcher au plafond du navire et tous les lieux qu’on visite sont à l’envers. C’est bougrement efficace en termes d’ambiance, en plus de justifier pas mal d’énigmes (ces lieux n’ont jamais été pensés pour être explorés sous cet angle, après tout).
Seule ombre au tableau, lors de notre exploration de l'épave on continue de rencontrer des mafieux, parfois enfermés dans des salles qu’on vient de déverrouiller. Ca n’a absolument aucun sens et c’est dommage que le bestiaire n’ait pas été un peu plus travaillé au lieu de bêtement réutiliser des assets. On aurait pu affronter des créatures comme des poulpes ou des crabes géants, ou même des descendants des membres de l’équipage qui seraient devenus fous, par exemple.


J’aime aussi beaucoup le niveau où on explore un temple tibétain et où des moines peuvent nous venir en aide pour combattre les mafieux. Cependant, si on a le malheur de tirer sur un moine, ses frères vont nous faire vivre un Enfer (enfin, si cette notion existe dans la religion locale, bien sûr). C’est amusant de rencontrer des PNJ neutres dans cette série, ça change. Bon, ça ne m’a pas empêché de tirer par erreur sur un mec, du coup j’ai dû génocider tout le monde puisque ça devenait impossible d’avancer tranquillement. Ce sont des choses qui arrivent, que voulez-vous ?
Le jeu tente donc d’innover en proposant parfois de nouvelles mécaniques, mais en-dehors de ces PNJ amicaux il n’y a pas grand chose qui fonctionne. Les quelques phases en véhicule (bateau et motoneige) ont une maniabilité discutable et n’existent en général que pour passer un petit obstacle, et les trampolines dans un des derniers niveaux peuvent bien aller se faire foutre. Ce sont toutefois des phases très ponctuelles, on rage un peu, on les passe et on ne les revoit plus après, ça n’est donc pas très grave.


Les musiques sont très belles, encore une fois. Parfaitement dans la lignée du premier jeu, avec des sonorités peut-être légèrement plus mélancoliques, elles nous accompagnent lors de notre expédition d’une très belle manière et donnent vraiment envie de les écouter lorsqu’on bosse, c’est très reposant. Petit bémol toutefois en ce qui concerne le thème de l’Opéra de Venise qui se veut être une imitation d’une musique de chambre du XVIème siècle, mais qui n’est pas aussi entêtante qu’elle aurait pu. Ca ressemble plus à un morceau de musique classique oublié et tombé dans le domaine public qu’à la rencontre entre Lara Croft et Jean-Baptiste Lully.
Ah, et le remix techno du thème principal alors qu’on explore une paisible montagne tibétaine, on en parle ou c’est tabou ?


Graphiquement, j’en ai déjà un peu parlé mais c’est une nette amélioration par rapport au premier épisode. On constate un beau travail sur les textures qui sont plus détaillées, aussi bien sur les décors que sur les ennemis, mais c’est surtout Lara qui a le plus profité de cette transition. Outre ses seins qui perdent leur aspect polygonal, elle gagne surtout une natte qui crée un effet sympa quand elle se déplace. Quand l’aventurière fait un saut arrière, sa natte clippe à travers son modèle 3D, mais c’est marrant, et c’est pour ce genre de détails absurdes que j’aime bien les jeux 3D de l’ère PS1.
Il y a aussi eu un travail intéressant sur les effets de lumière, qui permet d'introduire une nouvelle mécanique où Lara peut utiliser une torche pour s’éclairer dans le noir. C’est un peu redondant au bout de la 40ème salle obscure du jeu, mais ça rend bien.


En revanche, il y a un gros problème avec la version Steam de TR2, et il se trouve justement dans les graphismes. Si TR1 était émulé via DosBOX, le 2 a sa propre fenêtre de jeu qui est juste crade : elle est minuscule et les cinématiques chez moi avaient un filtre violet dégueulasse.
Je m’étais promis de faire tous les TR Steam tels qu’ils sont vendus et de ne pas recourir aux mods avant le post-game, mais là je n’ai même pas voulu jouer une seconde à cette version, j’ai téléchargé un mod HD 16:9 qui donne aussi accès à l’extension Golden Mask (parce que bien sûr, c’est encore la version vanilla du titre qui est vendue sur Steam). Heureusement que la communauté est là pour résoudre les problèmes causés par Square Enix.


Parlons donc rapidement de Golden Mask, une extension sortie 2 ans après le jeu principal. Contrairement à Unfinished Business (l’extension de TR1) qui nous faisait revisiter l'Egypte et l'Atlantide, celle-ci nous propose 5 niveaux inédits se déroulant en Sibérie (dans une base à la gloire du camarade Staline) et à Las Vegas. C’est toujours appréciable de visiter de nouveaux lieux du globe en compagnie de Lara, surtout que visuellement ceux-là arrivent sans trop de mal à avoir leur propre identité. Même les ennemis sont visuellement originaux, même si ce sont tous de simples palet swaps d'ennemis du jeu de base.
Les niveaux ne sont pas aussi bons que dans le jeu principal cela dit. Je les trouve presque tous trop courts et les crédits arrivent de manière brutale, alors qu'on a tout juste battu un boss. Ca donne une sensation de jeu rushé, alors qu'Unfinished Business arrivait à délivrer un narratif certes court, mais cohérent.


La principale nouveauté de cette extension, c’est que le dernier niveau n’est accessible que si on a récolté tous les secrets dans les 4 premiers. Je ne suis pas super fan de cette idée parce que je n’ai pas vraiment le temps de fouiller un jeu de fond en comble pour en trouver tous les secrets, mais ça reste sympa pour les complétionnistes qui débloqueront donc un niveau qui les récompensera pour leur assiduité. J’espère juste que cette mécanique ne sera pas réutilisée dans d’autres jeux de la série, ça me ferait chier de passer à côté de niveaux exclusifs.
Bon après je m’en fous, là j’ai utilisé un guide pour être sûr et certain de ne rater aucun secret et donc d’accéder à ce fameux niveau à Vegas. Cela ne fait de tort qu’à moi-même, je le sais mieux que quiconque.


Bilan de ce Tomb Raider 2 : il s’agit pour moi d’une amélioration du premier jeu, proposant des niveaux plus longs, plus grands et plus beaux qu’avant. Cependant sa courbe de difficulté est mal dosée puisque les premières missions sont plus corsées que la moitié des niveaux suivants. On perd aussi le sentiment d’isolement qu’on avait dans les tombeaux du 1, en-dehors des niveaux sous-marins. La faute au ciel qu’on aperçoit dans la plupart des autres niveaux et qui diminue grandement le côté claustrophobe de l’aventure, et aux ennemis humains qui sont omniprésents dans les 3/4 des niveaux.
Certains défauts n’ont pendant ce temps pas été corrigés, comme le système de combat (mais je ne m’attends plus à le voir évoluer puisque visiblement ce sera toujours le même en 2007) ou la lenteur de certaines animations (pousser un bloc, escalader…), sans parler d’une poignée de niveaux un peu confus, même si c’est moins souvent le cas qu'auparavant.


Quoiqu’il en soit je recommande ce deuxième épisode. Si vous avez accroché au premier vous y retrouverez à peu près la même recette, et si vous n’étiez pas trop fan du level-design labyrinthique il est ici en partie corrigé. Ne vous attendez pas à voir une Lara significativement plus souple en revanche, son ADN de camion est toujours présent, mais c’est aussi pour ça qu’on l’aime.

Sonicvic
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le 12 mars 2022

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