Lectures et notes (2025)
Quelques mots notés (de temps en en temps) ; des notes sur dix comme toujours. Je profite de la polysémie du mot "notes" car les "commentaires" ne seront plus systématiques.
Illustration : Roger Dale
103 livres
créée il y a 10 mois · modifiée il y a environ 8 heuresLe Rachat (1980)
Iskupljenje
Sortie : 1981 (France). Roman
livre de Branimir Šćepanović
Elouan a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
À mesure qu'on lit Le Rachat de Branimir Scepanovic, on va de surprise en surprise, de perplexités qui tournent retournent les choses et nous en bourrique. Alors que le récit est somme toute tout simple, c'est à n'y rien comprendre du comportement des personnages et de la tournure des événements. Un détail et tout bascule, mais là où l'auteur est très fort c'est qu'il n'y a pas la moindre incohérence. Chacun des éléments — aussi contradictoires pouvaient-ils paraître — au lieu de brouiller, d'affaiblir le thème, le renforce. Est-ce un farce, un tragique guet-apens, une illusion, la plus cynique manipulation de la vérité ? En tout cas, c'est très fort.
Deux femmes (1975)
Twee vrouwen
Sortie : 1975. Roman
livre de Harry Mulisch
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Il est de ces auteurs lu à la fin de l'adolescence, très apprécié à l'époque ; mais le temps écoulé rend le goût plus très sûr. Un peu méfiant, même, je reteste la prose de cet écrivain néerlandais. Bon, le style est très adroit, il a une certaine élégance dans son symbolisme discret, en filigrane — une douce sensualité qui se distille avec quelques bonnes métaphores. La dimension introspective est convaincante, et la sensitive est toujours présente, donnant au récit une intensité quoique assez feutrée. Dommage que l'histoire soit assez banale.
Nous autres (1920)
(traduction B. Cauvet-Duhamel)
Sortie : 1929 (France). Roman
livre de Evguéni Zamiatine
Elouan a mis 5/10.
L'Éveillé (1160)
ou le philosophe autodidacte
Ḥayy ibn Yaqẓān
Sortie : 1999 (France). Roman, Philosophie
livre de Ibn Tufayl
Elouan a mis 5/10.
Annotation :
C'est un vrai petit traité philosophique, mais je ne vois pas ce que l'histoire, aussi chiche et truffée d'incohérence apporte au contenu du livre. De bonnes visions cela dit, notamment sur la formation des concepts, pas mal de choses tirées d'Aristote ; mais tout est gâché par un préchi-précha interminable. L'absence de risque intellectuel "illustré".
Les Terres du couchant (2014)
Sortie : 9 octobre 2014. Roman
livre de Julien Gracq
Elouan a mis 9/10.
Annotation :
Oui, je sais — ce livre est en quelques sortes un échec, en tout cas, Julien Gracq le considérait comme tel, pour ainsi dire. Une "impasse". Et d'ailleurs, il arrive quelquefois (et en particulier avec Les terres du couchant) que sa prose mette une distance entre le lecteur et ce qui arrive aux personnage. Tout, luttes et tragédies comprises, a tendance à devenir abstrait, flou, noyé dans cette densité, cet abîme descriptif. On va dire que c'est ce dernier qui devient épique, en lieu et place des événements. Quand bien même il ne se passe rien en terme strictement narratif, Gracq rend tout cela incroyablement vivant. Ou est-ce la description qui devient narrative, s'écoule comme un flux d'événements infimes, fantastiques ou oniriques. Un délice constant, 240 pages durant.
Le Mal du loup
Rôshitsuki
livre de Atsushi Nakajima
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Les nouvelles d'Atsushi Nakajima sont comme des paysages moraux ; l'auteur dépeint son pays tout en noirceur, mais sans beaucoup exagérer, comme si tout cela rendait le narrateur mélancolique, rien de plus. Et en même temps, (en particulier dans la nouvelle éponyme, qui est la plus intéressante) le personnage ausculte son être, ses motivations. On est dans quelque chose de plutôt intellectuel que narratif. Il y a quelques bonnes idées, mais tout cela aurait pu être creusé, travaillé encore. On reste sur sa faim.
Matin et soir
Sortie : 27 août 2003 (France). Roman
livre de Jon Fosse
Elouan a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
Ma note n'est pas excellente, mais j'ai suffisamment aimé pour être curieux des autres livres de Jon Fosse. Justement, je repensais à Laszlo Krasznahorkai (qui a été récompensé du prix Nobel il y a quelques jours) : les longues phrases de l'écrivains norvégiens s'articulent de manière un peu comparable quand elle n'est pas coupée par des petits dialogues d'hommes fatigués. C'est peut-être plus lisse, aussi, moins nourri d'antécédents, d'amertumes, de complexité que dans les romans du hongrois. C'est assez gentil, on est plus séduit par l'image suggéré que par la phrase, en réalité.
L'Âne d'or ou Les Métamorphoses
Metamorphoseon libri XI
Sortie : 14 mars 1975 (France). Roman
livre de Apulée
Elouan a mis 7/10.
Dommage qu'elle soit une putain (1626)
(traduction Marion Bernède et Yves Beaunesne)
'Tis Pity She's a Whore
Sortie : 1626. Théâtre
livre de John Ford
Elouan a mis 8/10.
Volpone ou le renard (1606)
Sortie : 1606. Théâtre
livre de Ben Jonson
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
MOSCA — Le monde raisonnable
se réduit dans le faits à deux catégories :
Parasites et sous-parasites
[...]
Non, je parle du coquin élégant, qui, comme une flèche,
Se redresse et se courbe d'un seul geste,
Qui sait fendre les ais, leste comme une étoile,
Virer sur l'aile, comme l'hirondelle ; être ici
Etre là, et ici et là-bas, le tout au même instant ;
S'adapte à toute humeur, à toute circonstance,
Et sait changer de masque plus vite que de pensée
Chez celui-là, l'art est inné ;
Il ne peine pas pour l'apprendre, mais le pratique,
Naturellement. Ces petits génies-là sont
Les vrais parasites ; les autres ne sont que leurs bouffons."
Dans la solitude des champs de coton (1987)
Sortie : 1987 (France). Théâtre
livre de Bernard-Marie Koltès
Elouan a mis 7/10.
L'Incendie
Sortie : 10 janvier 2002 (France). Roman
livre de Mohammed Dib
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
On retrouve Omar, le personnage principal de La Grande Maison ; on le retrouve à onze ans, en pleine seconde guerre mondiale. On le retrouve ? À vrai dire, pas vraiment, car ce personnage est pour le moins très discret dans la narration de ce second opus, L'Incendie. Et en fait de narration, on a quelque chose de très discontinu, épars. Plusieurs personnages témoignent, prennent la parole sur la dure réalité du travail et de la faim, dans le contexte de la colonisation, des abus, des maltraitances. On est dans quelque chose de très proche de Kateb Yacine et sa Nedjma, dans la forme. J'avais presque l'impression qu'il y avait trop de blabla ; cette amertume répétée qui parle de révolte sans jamais la réaliser — mais il finit par se produire quelque chose, au milieu de cette contrée dépeinte avec art, modelée roche par roche, silence par silence, maison par maison.
Le Comité
Sortie : août 1993 (France).
livre de Sonallah Ibrahim
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
La meilleure idée de ce roman, c'est bien l'apparente bienveillance du comité à l'égard du personnage, et la mission que ses membres lui confie : l'objet de cette mission n'est pas précisé, mais il est très important que ce travail soit accompli. Tandis que le personnage s'enfonce dans une piste, la pression, les menaces pointent très gentiment, très doucement. Tout cela illustre bien un des aspects essentiels de la tyrannie.
Un homme célèbre
Sortie : 2024 (France). Nouvelle
livre de Joaquim Maria Machado de Assis
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
Première nouvelle — c'est agréable de renouer avec cette sensation, fréquente chez Machado de Assis : on a envie de rire sans très bien savoir pourquoi. Le comique n'arrive pas avec de gros sabots, mais les personnages plutôt insignifiants, l'auteur arrive l'air de rien à les rendre bouffons, légèrement. C'est aussi criant dans l'avant-dernière nouvelle. Hélas, les autres nouvelles du recueil sont plus quelconques, surtout pour le lecteur familier du romancier brésilien. Celui-ci reprend ses thèmes, son ton, ses astuces, se renouvelle si peu qu'on a parfois l'impression d'avoir déjà lu ce qu'on découvre pour la première fois.
Joie dans le ciel
livre de Charles-Ferdinand Ramuz
Elouan a mis 7/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Le Voyage des morts (1959)
Sortie : 1959 (France). Roman
livre de François Augiéras
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Oui — "c'est bien écrit" "il y a de belles descriptions" ces phrases creuses qu'on dit par politesse ou pour meubler un vide — celui de l'artiste ou du commentateur ? — est-ce que ça suffit ? Oui, les mots sonnent bien, comme des petits cailloux dans cette sécheresse ; le paysage s'impose, comme un tableau vivant. Au milieu de tout cela, les élucubrations d'un narrateur douteux du point de vue moral. Non que tout cela m'ait choqué, plutôt fatigué à la longue, voire endormi.
Présentation des haïdoucs
Roman
livre de Panaït Istrati
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
Istrati nous parle d'un monde cruel, infesté d'atrocités telles qu'il en existe dans le réel. Mais Istrati n'est pas un réaliste, il arrive même à nous amuser en mettant tout cela au diapason d'une aventure, d'une aventure romantique, d'une lutte entre des personnages plus drolatiques ou vivants que mélodramatiques ; mais rien n'égale leur détermination. Le hic c'est qu'ils n'ont aucun but positif, de sorte que les haïdoucs, parfois, ne valent pas mieux que leurs bourreaux.
Quatrevingt-treize (1874)
Sortie : 1874 (France). Roman
livre de Victor Hugo
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
L'ennemi, disait Danton, est à l'étranger. L'ennemi est à l'intérieur — en Vendée — lui répondait Robespierre, l'ennemi est partout ; en chacun de nous affirmait de son côté Marat. Moins d'un siècle après 93, Victor Hugo se fait fort de représenter ce moment particulier où l'on était cerné de tous côtés : blancs, bleus, et les armées des nations coalisées qui menaçaient d'envahir. L'œuvre, si elle consiste à abolir la distance que les simples connaissances des faits historiques (mais aussi quelques lacunes) met entre nous et le passé, et à nous faire rentrer dedans avec l'impression de la vivre, de la sentir ; si telle est son œuvre, alors elle est réussie. Hugo dépeint les lieux, les événements, et l'on voit ces forts, ces ruines, ces éboulements et ces incendies comme plongés dans une longue nuit où l'écho des combats se fait sentir plus ou moins proche, plus ou moins dangereux pour tout individu qui se trouve dans les parages. Ces tourments et ces lieux, caractérisés avec un arsenal d'épithète assénées parfois comme des formules magiques répétées à souhait : horrible, affreux, terrible, épouvantable, on les voit bien sûr plus stylisées par l'hyperbole et les contrastes entre plusieurs valeurs, des objectifs, des méthodes. Hugo nous montre, nous fait vivre ces tensions.
Et pourtant, l'écrivain romantique domine son sujet ; on pourrait presque dire que, pour une bonne partie du roman, il ne fait que cela ; notamment dans ces longues digressions caractéristiques de Hugo, et qui, si elles peuvent s'apprécier pour elles-mêmes, ne manque pas d'interrompre un fil narratif. Un fil narratif, ou des morceaux noyés dans un brouillard où se dessinent davantage des visions d'artistes ou des rétrospectives historiques qu'une structure narrative. L'intrigue existe, elle se déploie en trois ou quatre temps forts, mais quel bref éclat, dans toute cette sombre armature... À la moitié du chemin parcouru, on ne discerne encore pas très bien qui sont les personnages de l'histoire. Ceci provient aussi du fait qu'ils paraissent peut-être un peu muets ; du moins leur parole servent la narration, quelques détails précis — leurs idées ne font pas corps dans le roman, (ou dans sa majeure partie) puisque Hugo pérore à leur place. Celui-ci a trouvé une quatrième voie dans la fameuse querelle entre Danton, Robespierre et Marat. Il n'y a pas d'ennemi à détruire, mais des êtres humains à sauver ; le bien ne se définit pas seulement par l'intention, mais aussi par les moyens.
La Ville aux acacias (1935)
Orașul cu salcâmi
Sortie : 8 octobre 2020 (France). Roman
livre de Mihail Sebastian
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
C'était "L'Éveil du Printemps" pour Wedekind, ce sera la floraison des acacias pour Mihail Sebastian... deux métaphores pouvant évoquer les premiers émois, les premiers troubles annonçant les futurs premiers pas dans une vie sentimentale, adulte. Mais j'ai trouvé Mihail Sebastian beaucoup plus subtil que Wedekind. Ses personnages, quoique étranges parfois, semblent plus crédibles, plus vrais que nature. Sebastian n'hésite pas d'ailleurs à défier la pruderie de son époque en peignant la vie intime dans ses moindres détails et ce avec un choix esthétique neutralisant leur aspect cru. Et à la fois, l'idéalisation amoureuse, la corde sensible de ce récit aux acacias, on ne l'oublie pas, loin s'en faut ; Sebastian l'étudie sous tous ses angles, et lui fait vivre des virevolte, des foucades, fait vibrer cette tension — ce combat — entre l'espoir et la réalité. Mihail Sebastian a souvent des mots très justes pour décrire un comportement, une façon de s'emporter dans une passion et d'oublier ce qu'on se mordra les doigts d'avoir perdu quelques temps plus tard. Une vision à la fois réaliste et enchantée sur comment de l'enfance la jeunesse germe — puis s'éteint, et ce, parfois, avec des projets qui se révèlent autodestructeurs.
Un moustique dans la ville
Kogho qalaqshi
Sortie : 7 septembre 2017 (France). Roman
livre de Erlom Akhvlediani
Elouan a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
J'imagine que ce texte pourrait être agréable à écouter, le soir, avant de se coucher, à cela près que l'évocation du moustique peut-être perturbatrice pour le dormeur. Le récit tourne en rond, se répète de façon hypnotique, on s'endort faute d'intérêt suffisant suscité par ce qui arrive aux personnages. Le moustique n'a, d'ailleurs, presque pas son vrai rôle de moustique (il pourrait être cupidon) et c'est à se demander qui ou quels éléments jouent vraiment son rôle dans ce livre, et par rapport à quoi ? Puis peu à peu, l'histoire s'installe, avec ces phrases répétées qui, au début, n'engageaient rien du tout (comme de simples observations, bêtes comme la pluie) se transforment en métaphores plus subtiles, en belles images qui parent le récit comme un conte. La forme du ciel, la roche, les lumières dans différents tons de bleus se mêlent à la rêverie d'une collégienne ; on entre par intermittence dans son monde magique... J'imagine que le roman aurait pu être un conte, un conte pour enfant. À cela près qu'il contient tout de même des notions philosophiques un peu pointues sur l'existence qui, à vrai dire, ne mènent pas à grand-chose.
À l'ombre de la mort (1899)
Nāvēs enā
Sortie : 1899.
livre de Rudolfs Blaumanis
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Des pécheurs se trouvent sur un banc de glace qui se détache et part à la dérive. Impossible de rejoindre la côte, ils sont bloqués, les vivres sont limités et il fait extrêmement froid. La structure de cette nouvelle est un peu frêle, Blaumanis paraît en vouloir dire beaucoup de choses avec le moins de mots possible. L'idée est de faire ressortir la complexité de la nature humaine dans cette situation effroyable, et c'est pour ça que Blaumanis est reconnu : il est le premier, dans la littérature lettone à élaborer des personnages "complexes". Il faut le dire vite. Tout cela reste assez convenu, et partant assez anecdotique ; mais ne crachons pas dans la soupe, il y a des scènes particulièrement émouvante dans cette tension glaçante, mortelle.
Le livre des jours
Sortie : 1984 (France).
livre de Taha Hussein
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
On entre dans un livre assez comparable à "Mon Antonia" sauf que ce qui semblait curieux chez Willa Cather nous semble ici logique : "Le livre des jours" est une autobiographie, ou, "Les années d'apprentissage de Taha Hussein". Pas de grands événements (l'auteur n'évoque presque pas sa perte de la vue, tout au plus comme une "honte", il n'évoque pas plus les impacts que cette cécité a eu sur sa vie) mais une foule de portraits moraux : les parents, les frères et sœurs, les amis, les condisciples, les professeurs, les imams, les cadis, etc... une masse dans laquelle le personnage a tendance à se fondre. Le narrateur observe, critique. Une pléthore de détails sur les études islamiques (grammaire, rhétorique, logique) créé une sorte d'enveloppe un peu sèche, parfois aride : l'ennui semble, comme le silence, consubstantiel de son expérience à l'école du Caire, l'université d'Al-Azhar. Cependant Taha Hussein nous rattrape continuellement avec son regard critique sur les comportements humains, aussi bien que sur ce qu'on lui apprend : des superstitions et des coutumes parfois préislamique, parfois en marge, parfois davantage lié au soufisme et à la magie. Taha Hussein nous fait appréhender cette imaginaire, cette culture, telle qu'elle est reçue par un enfant jusqu'à l'adolescence.
Amour et amitié (1790)
Love and Friendship
Sortie : 1790 (Royaume-Uni). Roman
livre de Jane Austen
Elouan a mis 6/10.
B-17 G (2006)
Suivi de Smith
Sortie : février 2006. Roman, Histoire
livre de Pierre Bergounioux
Elouan a mis 6/10.


