Lectures et notes (2025)
Quelques mots notés (de temps en en temps) ; des notes sur dix comme toujours. Je profite de la polysémie du mot "notes" car les "commentaires" ne seront plus systématiques.
Illustration : Roger Dale
118 livres
créée il y a 12 mois · modifiée il y a environ 19 heuresLe Gai Savoir (1882)
(traduction Henri Albert)
Die fröhliche Wissenschaft
Sortie : 1882 (Allemagne). Essai, Philosophie
livre de Friedrich Nietzsche
Elouan a mis 8/10.
Le corbeau qui m'aimait
Sortie : 4 septembre 2025 (France). Roman
livre de Abdelaziz Baraka Sakin
Elouan a mis 6/10.
Terre des hommes (1939)
Sortie : 6 février 1939. Essai, Autobiographie & mémoires
livre de Antoine de Saint-Exupéry
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
Il y a réellement ce décalage que Saint-Exupéry craignait entre ce qu'il voulait montrer, et qu'il ne fait qu'expliquer au cours d'un développement clôturant La Terre des hommes ; un décalage entre cela et ce qu'il montre dans tous les chapitres précédents. Une belle inspiration dans laquelle les hommes, tels des astres nietzschéens, choisissent leur trajectoire, dans laquelle l'individu agit sur la matière et sur sa vie : il est seul dans ses mirages et face à la mort, bien qu'accompagné — le périple dans le désert le montre bien, les illusions ne s'accordent pas, elles alternent de l'un à l'autre.
Les Récits d'Odessa
Sortie : 4 juin 1999 (France). Récit
livre de Isaac Babel
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
Fresque grouillante, bigarrée, plutôt baroque de la société Odessite à l'époque du basculement de l'Empire Russe vers le bolchevisme. Les paroles, la gaudriole, les crimes pleuvent d'une façon assez chaotique. Le réalisme est brutal, les contrastes sont forts et les retournements de situation assez savoureux. Les Récits d'Odessa représentent bien le trouble pendant la transformation entière de la société, y compris pour ces convoiteurs de pouvoir que sont les gangsters.
L'étrange tournant
Die selstame Wendung
Sortie : 20 novembre 2020 (France). Roman
livre de Ludwig Hohl
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
L’écriture de Ludwig Hohl paraît jaillir avec une aisance immédiate ; sa fluidité égale et constante pourrait faire croire qu’elle s’est laissée pratiquer avec la même facilité qu’elle se laisse lire. Mais tout repose sur un équilibre parfaitement réalisé (et certainement très travaillé) : l'union entre un style presque lisse, élégant et un flot nerveux, celui d'une pensée sautillante, passant d'un sujet à l'autre, ou tournoyant de façon obsessionnelle, vers les tréfonds du désespoir. On suit ce peintre anti-héros pétri de contradictions dans ses déboires ; parfois sa pensée s'arrête au milieu d'une phrase, mais Ludwig Hohl n'a pas puisé sa force dans une intonation particulière, dans des débordements Dostoïevkiens ou des exclamations : c'est le rythme des phrases, leur lancée, des phrases qui s'écoulent à grand flux et dépeignent (avec la distance d'une narration à la troisième personne) l'univers mental de ce nietzschéen et quelque peu maniaco-dépressif personnage ; un univers fait d'ascension, du désir d'agencer les couleurs d'une façon révolutionnaire, d'excitation créative, ou bien, d'une sombre indolence et parfois exaspérante. Tout cet univers est intégré dans une même musique, un même souffle — on est loin des fulgurances d'un Ducharme, parce que Ludwig Hohl tient son rythme (il ne l'élève ni ne le baisse), c'est de bout en bout égal mais superbe.
Va savoir (1994)
Sortie : 3 octobre 1996 (France). Roman
livre de Réjean Ducharme
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
On ne parle peut-être pas assez de Réjean Ducharme. On ne parle peut-être pas assez du tempo dans le style d'un écrivain — peut-être aussi parce que dans de nombreux cas il est inexistant — mais ce n'est pas le cas chez Ducharme. Le rythme des phrases, les longues, les courtes, leur sonorité ; tout cela est travaillé de façon assez singulière, comme une petite chanson. Même si Ducharme semble avoir du mal à tenir cela sur la longueur : il y a quelques fulgurances. Il en va de même avec ses métaphores sucrées, goûtant quelque peu l'enfance alors que ces sujets sont très adultes. Son style imagé est particulièrement dense, truffé d'ambiguïtés dérangeantes et de figures gracieuses, enveloppant cette histoire inquiétante dans une atmosphère de comptine. Les allusions sont subtiles, à double ou à triple entente, mais de plus en plus nombreuses.
C'est sûr que ces personnages sont en décalage, on pense aux beatniks ou à ceux d'Une bien étrange attraction de Tom Robbins, mais il ne s'agit pas que de cela. On flirte doucement d'autres limites. On ne sait pas, on est dans le doute, peut-être que celui qui nous raconte tout est de mauvaise foi. Mais là où les qualités de style ont tendance à s'étioler, à s'user, c'est que la narration est somme toute très routinière, et l'on s'ennuie de ne côtoyer qu'un malaise non pas nu, mais vêtu d'atours froissés ou effilochés. Bon, peu importe. Il n'est pas rare que l'auteur parvienne à nous reconquérir par son talent et son originalité ; par une farandole d'images évocatrices : le corps est omniprésent, on le sent dans ses mouvements, dans ses danses, ses blessures, sa sensualité. Et puis, il y a d'autre part la finesse et le tact dans ce que Ducharme nous laisse entrevoir de ce qui se passe dans le crâne de ses personnages.
La Prostituée (1926)
Inbaifu
Sortie : juin 2021 (France). Nouvelle
livre de Yoshiki Hayama
Elouan a mis 5/10.
Anima
Sortie : août 2012 (France). Roman
livre de Wajdi Mouawad
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
Je n'ai pas été immédiatement séduit. L'idée que ce soit des animaux qui racontent cette histoire humaine était en soit assez intrigante, mais en lisant, je ne comprenais pas bien ce que c'était censé apporter. Et puis parfois, je me rendais même plus forcément compte que c'était raconté par un animal. Mais justement, l'effet était discret plutôt en filigrane, et permettait à l'auteur, en changeant régulièrement de point de vue, de compréhension possible, d'adapter son style comme un caméléon, et de manière parfois assez inventive. Et puis il y a du coup un morcellement du récit, plutôt indiqué vu la nature erratique de cette sombre aventure. Tout est fait pour borner l'action dans de petits espaces où la soudaineté règne ; vu que ce n'est pas raconté par un humain, des jointures logiques de la narration sont en quelques sortes brisées, on n'est pas préparé à ce qui va se passer, on suit l'action, aux aguets, et peut-être légèrement effrayé dans ce glissement vers une violence toujours plus sidérante.
Apologie de Socrate
(traduction Luc Brisson)
Apología Sôkrátous
Essai, Philosophie
livre de Platon
Elouan a mis 6/10.
La Tragique Histoire du docteur Faust (1604)
The Tragical History of Doctor Faustus
Sortie : 1604. Théâtre
livre de Christopher Marlowe
Elouan a mis 5/10.
Le Dernier Loup (2009)
Az utolsó farkas
Sortie : septembre 2019 (France). Roman
livre de László Krasznahorkai
Elouan a mis 6/10.
Le Désespéré (1887)
Sortie : 1887 (France). Roman
livre de Léon Bloy
Elouan a mis 5/10.
Annotation :
C'est trop inégal. Même si l'on ne parle que du style : par moments je le trouvais un peu fabriqué, parfois assez superfétatoire ou même emprunté. D'autres fois, la sonorité des phrases m'enchantait, beaucoup de tournures et de traits foudroyants, admirablement bien sentis. Et puis, il y a ce qui pourrit un peu tout l'ouvrage, le rend au final assez faible et oubliable ; ce qu'il raconte n'a vraiment pas beaucoup d'intérêt, du moins pendant une bonne partie du roman.
Le Rachat (1980)
Iskupljenje
Sortie : 1981 (France). Roman
livre de Branimir Šćepanović
Elouan a mis 8/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
À mesure qu'on lit Le Rachat de Branimir Scepanovic, on va de surprise en surprise, de perplexités qui tournent retournent les choses et nous en bourrique. Alors que le récit est somme toute tout simple, c'est à n'y rien comprendre du comportement des personnages et de la tournure des événements. Un détail et tout bascule, mais là où l'auteur est très fort c'est qu'il n'y a pas la moindre incohérence. Chacun des éléments — aussi contradictoires pouvaient-ils paraître — au lieu de brouiller, d'affaiblir le thème, le renforce. Est-ce un farce, un tragique guet-apens, une illusion, la plus cynique manipulation de la vérité ? En tout cas, c'est très fort.
Deux femmes (1975)
Twee vrouwen
Sortie : 1975. Roman
livre de Harry Mulisch
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Il est de ces auteurs lu à la fin de l'adolescence, très apprécié à l'époque ; mais le temps écoulé rend le goût plus très sûr. Un peu méfiant, même, je reteste la prose de cet écrivain néerlandais. Bon, le style est très adroit, il a une certaine élégance dans son symbolisme discret, en filigrane — une douce sensualité qui se distille avec quelques bonnes métaphores. La dimension introspective est convaincante, et la sensitive est toujours présente, donnant au récit une intensité quoique assez feutrée. Dommage que l'histoire soit assez banale.
Nous autres (1920)
(traduction B. Cauvet-Duhamel)
Sortie : 1929 (France). Roman
livre de Evguéni Zamiatine
Elouan a mis 5/10.
L'Éveillé (1160)
ou le philosophe autodidacte
Ḥayy ibn Yaqẓān
Sortie : 1999 (France). Roman, Philosophie
livre de Ibn Tufayl
Elouan a mis 5/10.
Annotation :
C'est un vrai petit traité philosophique, mais je ne vois pas ce que l'histoire, aussi chiche et truffée d'incohérence apporte au contenu du livre. De bonnes visions cela dit, notamment sur la formation des concepts, pas mal de choses tirées d'Aristote ; mais tout est gâché par un préchi-précha interminable. L'absence de risque intellectuel "illustré".
Les Terres du couchant (2014)
Sortie : 9 octobre 2014. Roman
livre de Julien Gracq
Elouan a mis 9/10.
Annotation :
Oui, je sais — ce livre est en quelques sortes un échec — en tout cas, Julien Gracq le considérait comme tel, pour ainsi dire. Une "impasse". Et d'ailleurs, il arrive quelquefois (et en particulier avec Les terres du couchant) que sa prose mette une distance entre le lecteur et ce qui arrive aux personnage. Tout, luttes et tragédies comprises, a tendance à devenir abstrait, flou, noyé dans cette densité, cet abîme descriptif. On va dire que c'est ce dernier qui devient épique, en lieu et place des événements. Quand bien même il ne se passe rien en terme strictement narratif, Gracq rend tout cela incroyablement vivant. Ou est-ce la description qui devient narrative, s'écoule comme un flux d'événements infimes, fantastiques ou oniriques. Un délice constant, 240 pages durant.
Le Mal du loup
Rôshitsuki
livre de Atsushi Nakajima
Elouan a mis 6/10.
Annotation :
Les nouvelles d'Atsushi Nakajima sont comme des paysages moraux ; l'auteur dépeint son pays tout en noirceur, mais sans beaucoup exagérer, comme si tout cela rendait le narrateur mélancolique, rien de plus. Et en même temps, (en particulier dans la nouvelle éponyme, qui est la plus intéressante) le personnage ausculte son être, ses motivations. On est dans quelque chose de plutôt intellectuel que narratif. Il y a quelques bonnes idées, mais tout cela aurait pu être creusé, travaillé encore. On reste sur sa faim.
Matin et soir
Sortie : 27 août 2003 (France). Roman
livre de Jon Fosse
Elouan a mis 6/10 et l'a mis dans ses coups de cœur.
Annotation :
Ma note n'est pas excellente, mais j'ai suffisamment aimé pour être curieux des autres livres de Jon Fosse. Justement, je repensais à Laszlo Krasznahorkai (qui a été récompensé du prix Nobel il y a quelques jours) : les longues phrases de l'écrivains norvégiens s'articulent de manière un peu comparable quand elle n'est pas coupée par des petits dialogues d'hommes fatigués. C'est peut-être plus lisse, aussi, moins nourri d'antécédents, d'amertumes, de complexité que dans les romans du hongrois. C'est assez gentil, on est plus séduit par l'image suggéré que par la phrase, en réalité.
L'Âne d'or ou Les Métamorphoses
Metamorphoseon libri XI
Sortie : 14 mars 1975 (France). Roman
livre de Apulée
Elouan a mis 7/10.
Dommage qu'elle soit une putain (1626)
(traduction Marion Bernède et Yves Beaunesne)
'Tis Pity She's a Whore
Sortie : 1626. Théâtre
livre de John Ford
Elouan a mis 8/10.
Volpone ou le renard (1606)
Sortie : 1606. Théâtre
livre de Ben Jonson
Elouan a mis 7/10.
Annotation :
MOSCA — Le monde raisonnable
se réduit dans le faits à deux catégories :
Parasites et sous-parasites
[...]
Non, je parle du coquin élégant, qui, comme une flèche,
Se redresse et se courbe d'un seul geste,
Qui sait fendre les ais, leste comme une étoile,
Virer sur l'aile, comme l'hirondelle ; être ici
Etre là, et ici et là-bas, le tout au même instant ;
S'adapte à toute humeur, à toute circonstance,
Et sait changer de masque plus vite que de pensée
Chez celui-là, l'art est inné ;
Il ne peine pas pour l'apprendre, mais le pratique,
Naturellement. Ces petits génies-là sont
Les vrais parasites ; les autres ne sont que leurs bouffons."
Dans la solitude des champs de coton (1987)
Sortie : 1987 (France). Théâtre
livre de Bernard-Marie Koltès
Elouan a mis 7/10.
L'Incendie
Sortie : 10 janvier 2002 (France). Roman
livre de Mohammed Dib
Elouan a mis 8/10.
Annotation :
On retrouve Omar, le personnage principal de La Grande Maison ; on le retrouve à onze ans, en pleine seconde guerre mondiale. On le retrouve ? À vrai dire, pas vraiment, car ce personnage est pour le moins très discret dans la narration de ce second opus, L'Incendie. Et en fait de narration, on a quelque chose de très discontinu, épars. Plusieurs personnages témoignent, prennent la parole sur la dure réalité du travail et de la faim, dans le contexte de la colonisation, des abus, des maltraitances. On est dans quelque chose de très proche de Kateb Yacine et sa Nedjma, dans la forme. J'avais presque l'impression qu'il y avait trop de blabla ; cette amertume répétée qui parle de révolte sans jamais la réaliser — mais il finit par se produire quelque chose, au milieu de cette contrée dépeinte avec art, modelée roche par roche, silence par silence, maison par maison.































