38 mini westerns est un recueil de "mini westerns", de nouvelles incroyablement poétiques où la réalité et l'imaginaire se confondent dans des images hallucinées. Le fond et la forme ne signifient plus grand chose, l'harmonie est là. On n'est pas très loin du surréalisme et de ses formules oniriques. Mathias Malzieu a toujours l'image juste, incroyablement originale et touchante. L'univers ici dépeint possède une singularité indéniable, les écureuils y côtoient des fantômes et des kinder surprises ; mais l'univers dont il est question est en même temps le nôtre, ces "mini westerns" ne sont pas complètement détachés de la réalité.

Le regard de Malzieu sur le monde est celui d'un adulte resté enfant émerveillé qui respire des métaphores décalées. L'écriture est ludique, pensons à l'admirable Don Diego 2000, les mots semblent se tordre comme de la pâte à modeler sous la plume de Malzieu. Le langage est décomplexé et ne se complait pas dans un registre soutenu ou trop familier. La spiritualité des formules grandiloquentes se heurtent à la rudesse des formules balancées sans concession. Tout cela a le mérite supplémentaire de ne pas trop se prendre au sérieux. Un humour plein de recul ponctue ses textes, pensons à Le Poème insulte, sorte de gueulante flamboyante, un rappel convulsif à la dérision.

C'est un vrai concentré de ce que j'aime chez Malzieu, c'est une mosaïque fabuleuse d'ingrédients retrouvés et renouvelés dans ses romans suivants, à savoir Maintenant qu'il fait tout le temps nuit sur toi, la Mécanique du cœur, et Métamorphose en bord de ciel. A noter aussi le rapport étroit avec certaines des chansons de Dionysos, comme Longboard blues ou Don Diego 2000, sans oublier les quelques références paratextuelles comme le nom de Phileas Smog rappelant Phileas Fogg le héros du Tour du monde en quatre-vingt jours de Jules Verne. Les nouvelles nous laissent rêveurs. C'est un livre à savourer comme un paquet de bonbons ; lire toutes ces nouvelles à la suite, rapidement et sans s'arrêter, est complètement indigeste. Il faut se laisser bercer par chaque saveur et ne pas toutes les superposer dans un vertige acide. Il faut avoir envie de lire entre les mots, de jongler avec des images sans attendre un récit correctement structuré.

A lire sans plus attendre pour les grands rêveurs comme moi ! A déconseiller par contre aux gens plus pragmatiques pour qui la cohérence d'un récit constitue un élément indispensable dans l'appréciation de leurs lectures.
King-Jo
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le 25 mai 2011

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