Comment fait il ? Comment Stephen King réussit il donc à écrire un livre dont les héros sont la moitié du temps des enfants, et à rendre cela crédible ? Comment réussit il à éviter que leurs dialogues et leurs réactions sonnent faux, bricolés, biaisés ? Toujours est il qu'il y arrive, et ici plus que dans tout autre de ses romans.
Quand on parle de « Ça », on pense généralement au clown démoniaque, à l'incarnation de la peur justifiée, du croque-mitaine au gloussement malveillant et aux dents tranchantes qui n'attend que le coucher du soleil pour vous traquer jusque dans votre chambre, dans les ténèbres précédant l'aube. On oublie généralement la ville de Derry, maléfique et élégiaque ville d'enfance des protagonistes, rendue vivante par la plume de l'écrivain. On oublie l'amour et l'amitié du Ka-Tet avant l'heure du club des ratés. Le Bip-bip de Richie, les oiseaux de Stan, le béguin de Ben, l'asthme d'Eddie, marque évidemment moins que l'horreur qu'on peut trouver dans ce livre. Mais il suffit de s'y replonger pour, comme les personnages, retrouver la mémoire. Ce bouquin n'est pas seulement un excellent bouquin d'horreur. C'est aussi un superbe bouquin de manière générale.
Chaque caractère est approfondi, chaque ambiance travaillée, chaque dialogue tombe juste. L'intrigue saute avec une adresse rare d'une époque à l'autre, ce qui aurait pu constituer le point faible de l'histoire. Ici, Stephen King présente tout son talent, tout ses domaines de prédilection, l'enfance, l'horreur, le quotidien, le passé, la magie, l'amour... Le tout est vivant, soontané, sans prétention.
A la fois recueil ultime de l'univers Kingien et excellente histoire, « Ça » est un livre qu'on dévore et qu'on savoure. Si nous étions tous là-en bas à flotter, il est probable que King serait sur un bateau, peut être de papier...