Le nom de Bhutto, tellement célèbre au Pakistan, et pas que pour de bonnes raisons, a été à la fois un atout et une contrainte lorsque Fatima Bhutto s'est lancée en littérature. Après le prometteur Les lunes Mir Ali, Comme des lions confirme qu'elle est une vraie romancière et que la notoriété de sa famille n'est pour rien dans le succès qu'elle remporte. En V.O, Comme des lions s'intitule The Runaways et il s'agit bien des itinéraires croisés de trois fugitifs de notre temps (Anita Rose dite Layla, Monty et Sunny), des jeunes gens en guerre contre la société et qui ont épousé la cause de l'islamisme radical, pour des raisons différentes mais finalement pas si éloignées. Le récit raconte alternativement le cheminement de ces jeunes exaltés du Pakistan (l'Angleterre pour l'un d'entre eux) à l'Irak. Leurs trajectoires vont bien entendu se rencontrer dans les derniers chapitres du livre qui sont les plus violents et les plus tragiques. Tout l'art de Fatima Bhutto est de décrire des personnages complexes et d'expliquer l'engrenage fatal qui les entraîne vers l'extrémisme. C'est la part la plus captivante du roman, celle qui doit rendre crédible le basculement de ces deux garçons et de cette jeune femme vers l'irréparable. Pour ce faire, Fatima Bhutto ne lésine pas sur les flashbacks afin de nous faire comprendre ce qui a pu se passer dans les têtes de ses protagonistes. Et c'est l'un des bémols que l'on peut prononcer envers Comme des lions, la conversion de Layla (Anita Rose), malgré les efforts de la romancière, parait tout de même surprenante et un peu difficile à avaler. Mais au-delà de ce reproche, le livre est puissant, très dense et intense, culminant dans les scènes où Sunny et Monty se retrouvent seuls dans le désert irakien. Tour à tour poétique et crue, l'écriture de Fatima Bhutto épouse parfaitement les pensées intimes de ses personnages et leur route cahoteuse vers un accomplissement et un épanouissement qui s'apparentent à des leurres.

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le 4 mars 2020

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