"Et j'abattrai l'arrogance des tyrans" de Marie-Fleur Albecker : elle boit pas, elle fume pas... ell

Nous n’en finissons plus avec ces premiers romans qui habitent la rentrée littéraire session 2018. Après Le malheur du bas ou encore Là où les chiens aboient par la queue, c’est au tour de Et j’abattrai l’arrogance des tyrans de Marie-Fleur Albecket de passer sous nos yeux. Ce surprenant roman sorti en août dernier du côté de chez Aux forges de Vulcain nous met aux côtés de paysans anglais en colère, d’une femme qui cherche toute sa place dans une société et une époque et d’un pouvoir plus que jamais aveugle et sourd. Le tout, servi dans une langue sous forme de méli-mélo historico-populaire et sur fond de XIVème siècle. Tout un programme !


La bande-annonce


En 1381, la grande peste et la Guerre de Cent ans ont ruiné le royaume d’Angleterre. Quand le roi décide d’augmenter les impôts, les paysans se rebellent. Parmi les héros de cette première révolte occidentale, on trouve Joanna, une Jeanne d’Arc athée, qui n’a pas sa langue dans la poche et rejoint cette aventure en se disant que, puisque l’on parle d’égalité, il serait temps de parler d’égalité entre les hommes et les femmes.


L’avis de Lettres it be


Professeur d’Histoire-géographie, Marie-Fleur Albecker arrive en librairie avec toute la fraîcheur d’une inconnue. Et les premières lignes de son roman donne toute l’ampleur de ses intentions : parce que la question de la Femme et du féminisme est au cœur de nos préoccupations notamment médiatiques ces temps derniers, pourquoi ne pas offrir à tous un peu d’air et de frais en romançant ces interrogations ? Et si le roman était l’arme absolue de la réflexion et du recul, juste histoire de penser plus juste ?


D’une révolte de paysans anglais refusant de s’acquitter encore et encore de l’impôt au XIVème siècle, Marie-Fleur Albecker tisse un roman qui dépasse allègrement son cadre d’exercice. Justice, position de la Femme dans une société d’alors, rapport au pouvoir, à la lutte… Toutes ces thématiques, traitées ici dans un cadre spatio-temporel pourtant défini, nous poussent page après page à des voyages incessants entre passé et présent. Ce sont eux qui se révoltent, et ce sont nous qui vivons dans ces pages. Au côté de Joanna, John Ball et consorts, c’est donc tout un pan de l’Histoire anglaise qui prend vie sous nos yeux. Une vie suspendue à la condition de la fiction : Marie-Fleur Albecker met dans la bouche de ses personnages et dans l’encre de sa plume un langage souvent bien contemporain, bien à nous. Et le décalage de nourrir encore plus la vivacité du livre : le mélange est excellent, le livre est terriblement bien ficelé et chacun y trouve son compte.


« Enfin, rétablissons les choses : il va y avoir une guerre, et comme dans toute bonne guerre, en fait, ce sont plutôt les Anglais, de préférence de basse extraction, qui vont au charbon pour des types qui veulent être rois. Cent mille morts après la Grande Noire et la Guerre de Cent Ans, c'était pas rien à demander au bon peuple, alors même qu'il existerait une solution bien plus simple et qui traine dans les tiroirs des hommes de troupe depuis pas mal d'années : balancer les rois, princes, généraux et ministres dans une arène, en slip de bain et armés de bâtons. Et hop ! à qui restera le dernier debout, la victoire. En plus, la vente des billets pourrait rapporter de l'argent, car qui n'a jamais rêvé de voir un prince en slip ? »


Jamais qu’un manifeste idéologique, jamais qu’un roman léger et frivole, Et j’abattrai l’arrogance des tyrans fait se croiser et danser les intentions de son auteur pour un roman qui développe toute sa puissance au gré des quatre parties qui le composent. Une fois encore, la redoutable maison Aux forges de Vulcain propose un texte brillant, original, changeant. Et qu’est-ce que ça fait du bien…


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le 17 oct. 2018

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