Le roi du Danemark est mort, son frère Claudius reprend le trône et séduit la femme de l'ancien monarque, dont le fils, Hamlet, est scandalisé par le deuil bien trop rapide de celle qu'il juge comme opportuniste. Un spectre semblant en tout point être le fantôme du roi défunt vient alors lui dénoncer le fait que sa mort est le fait de Claudius et lui somme de le venger. Tout en laissant de côté toute envie de rétribution punitive envers sa mère...
Hamlet est une œuvre bien plus dense et foisonnante que Macbeth, plus volumineuse tout simplement. Mais on est loin de s'en plaindre car l'intrigue reste d'une simplicité et d'une clarté absolue, les personnages sont en nombre relativement restreint pour ne jamais diluer cette sensation et le rythme reste soutenu du début à la fin.
Et si la base de la trame est bien la vengeance, la multiplicité des thèmes abordés et des propos relatés fait que la pièce n'a jamais besoin de trouver un second souffle. Tout semble s'enchaîner naturellement.
Ainsi le personnage d'Ophélie servira à Shakespeare (entre autres choses) à parler d'amour et des questions gravitant autour comme la condition sociale (Polonius ne peut ainsi concevoir qu'un prince comme Hamlet puisse s'unir à sa fille simple enfant de conseiller), l'amour véritable (Hamlet concèdera à la jeune demoiselle qu'il ne l'aime pas réellement mais la trouvait belle physiquement) voir le danger du romantisme toujours un peu mensonger.
Laërte pourrait-être quant à lui le personnage symbolisant les conséquences, forcément funestes, de l'action de vengeance et sera le déclencheur du final macabre.
Contrairement à Macbeth, Hamlet est beaucoup moins orienté vers le fantastique (hormis ce qui concerne le spectre) et vers la notion de Mal et de maléfique. Gertrude, la reine, si l'on peut critiquer la durée de son deuil et son manque d'honneur suite au choix rapide et "incestueux" (tel qu'il est qualifié dans le livre) de se lier au frère de son défunt mari, est pourtant épargnée par le Spectre, et de fait par Hamlet qui, sans lui pardonner, réduit son ressenti à une humiliation (par la pièce de théâtre) et à une confrontation verbale pleine d'aigreur et piques cyniques. Même Claudius, objet de la haine d'Hamlet, n'est pas fondamentalement présenté comme un méchant absolu, tyrannique même si bien sûr sa volonté de conservation de pouvoir le pousse au crime.
Ainsi Shakespeare mon tout son talent dans la nuance et dans la fragilité des apparences. Dans Macbeth on pouvait trouver le Mal absolu dans les personnages de Macbeth et sa femme... avant de démontrer que cela n'était pas tout fait exact si l'on rentrait plus profondément dans les faits. Entre la présentation des personnages sous un certain angle et la nature de leurs actes (avec les causes et conséquences morales qui en découlent) il y a une différence qui fait toute la puissance de l'écriture du dramaturge.
C'est ce que l'on retrouve donc dans Hamlet sous un angle différent avec des personnages finalement moins entourés d'une aura négative et pourtant froidement monstrueux dans leurs actes.
Le talent de l'auteur est indéniable pour construire sur une intrigue courte et simple, tout un développement autour de personnages dont on identifie très rapidement les caractéristiques, et qui pourtant ont tous des degrés de lecture psychologique plus élargis que prévu. La plume de Shakespeare est effarante de beauté, de style et d'efficacité et donne un relief incroyable à chaque intervention, souvent long monologue captivant. Loin de se résumer au bizarrement très célèbre "être ou ne pas être", ce drame en cinq actes est un trésor de phrasé qui enchante du début à la fin.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.