Je vais passer pour un vieux con et autres petites phrases qui en disent long par Isla
Ceux qui ont aimé « La Première Gorgée de bière et autres plaisirs minuscules » apprécieront ce dernier ouvrage, exactement dans le même esprit.
L'écriture de Philippe Delerm est brillante et très agréable, ce qui est confirmé par la lecture à haute voix qui ne pardonne pas lorsqu'il y a des erreurs de style (il n'y a qu'à demander à Flaubert, qui avait déjà inventé l'Audiolib dans son gueuloir !).
Delerm a l'art de relever avec beaucoup d'humour et d'esprit les petites subtilités qui se cachent dans nos phrases les plus anodines. J'ai beaucoup ri avec le « Tout d'abord bonjour » du vendeur de la Fnac ou le « J'en parle dans le livre » d'un auteur interviewé, deux remarques discrètes qui disent la frustration et la quête de reconnaissance ordinaire.
Delerm est touchant lorsqu'il relève aussi la nostalgie qui se dégage de simples remarques comme « Je vais chez Mantec », en parlant du charcutier du village, ou « Je ne m'en servirai plus maintenant », évoquant les regrets d'une époque passée.
Je trouve finalement Delerm très générationnel. Il est pour moi l'écrivain des baby-boomers qui évoquent leurs souvenirs d'école en blouse bleue dans les années 50 avec des trémolos dans la voix. Mon réflexe a été de me dire « il faut que je l'offre à mon père, ça va lui plaire ». Non pas que ça ne me plait pas à moi, mais j'ai l'impression que ce n'est pas à moi que Delerm s'adresse.
Pourtant j'ai une certaine affection pour lui, justement parce qu'il exprime la sensibilité de mes parents. Il n'y a que lorsqu'il lance des piques à ses congénères mondains dans les chapitres sur Proust ou Roland-Garros qu'il a tendance à m'agacer. Il se fait donneur de leçons et juge d'un monde élitiste auquel lui-même appartient.