"Kate parcourut le reste de l'email de sa mère et réprima une envie impérieuse de s'allonger, qu'elle éprouvait souvent (toujours?) après avoir reçu des nouvelles d'elle. Les insultes qu'elles renfermaient enrobées de termes affectueux, et les piques présentées comme des plaisanteries ne manquaient jamais de la vider de son énergie.
"Ta mère est un sniper hors pair, lui avait dit Sean un jour. Tu sais que tu viens d'être touchée ; seulement, tu ne sais pas d'où vient le tir. Tu ne peux rien faire d'autre que de rester couchée là et te vider de ton sang."
La question, c'était de savoir pourquoi Birdie ressentait toujours le besoin de vous viser et vous tirer dessus. Si on voulait vider l'abcès, elle vous répondait quelque chose du genre : "Oh, Kate, ne sois pas si sensible." C'était le coup double parfait, blesser quelqu'un et ensuite agir comme si c'était un signe de faiblesse, de la part de celui ou celle qui se sentait blessé, de crier de douleur.
Comment Kate avait-elle pu se mettre en colère contre Théo parce qu'il n'avait plus envie de venir dans l'île ? A dire vrai, elle n'était pas en colère contre lui. Elle était en colère contre elle-même."
Ce bouquin m'a tellement remuée que bien évidemment, il va m'être difficile d'être objective, mais je vais essayer.
Les moins d'abord : des erreurs d'édition, des lourdeurs de traduction (répétitions) heurtent parfois pendant la lecture, même si c'est assez rarement.
Les plus : c'est un roman à suspens, certes, mais d'abord une étude psychologique de personnages extrêmement fouillée. J'ai par moments eu l'impression de lire la description de ma propre famille, psychologiquement du moins. C'est assez perturbant. L'extrait de la réaction de Kate aux mails de sa mère, mis au dessus, m'a rappelé mon propre vécu et ma propre famille d'une façon hallucinante, et les passages du genre sont assez nombreux pour m'avoir déstabilisée pendant les quelques jours de lecture. Pour moi, donc, ce bouquin a été une sacrée baffe.
Par contre, je n'ai guère apprécié le personnage d'Emily. Mais je pense que ça fait partie du but de l'auteur, c'est juste que son côté victime permanente m'agace, comme il agacerait ma mère (trait que je lui ai repris en "moins pire", arf), comme il agace Birdie. C'est donc qu'il est fort bien brossé.
A partir de la page 360 environ, on vire au "thriller" pur, les choses s'accélèrent. Difficile à lâcher, on se demande comment ça va finir... Les révélations y sont nombreuses et ça tourne au pugilat.
Une dernière petite chose : les hommes sont les grands absents de ce roman. Il y en a, oui, mais ce ne sont que des satellites assez peu utiles, si ce n'est dans la violence du "méchant" Brad qui sert de catalyseur au côté thriller de l'affaire. Comme je viens d'une famille matriarcale, forcément ça m'a pas mal parlé, mais je pense qu'il est normal que ce livre ne "passe pas" auprès de certains lecteurs masculins. On est assez loin du thriller Harlan Coben, Patterson ou même Grangé, plus proche peut-être de certaines auteures de style anglais.
Chose bonne à savoir si on veut lire ce bouquin !