C'est l'histoire de la vie

Finalement, la métamorphose n'est pas vraiment celle du cafard. Samsa est une vermine au début de la nouvelle, il l'est à la fin. Rien ne change. La métamorphose se situe plutôt dans les yeux de sa famille.

Parce que vous voyez, le texte commence presque sur une note humaine. On suit les efforts de Samsa pour se lever et s'en est presque amusant. Grégor pense, on voit qu'il pense. Ensuite il se rend compte qu'il s'est transformé en cafard et sa famille le remarque aussi, l'ambiance devient plus dramatique, presque triste. Grégor est un frère, un fils, un humain et maintenant que c'est un gros insecte poilu, qu'est-ce qu'il va devenir ? Là on se situe à un nœud quasiment déprimant, parce qu'on sait tous que le cafard n'est pas un cafard mais bien un humain.

Et alors, sans prévenir personne, se met en marche la mécanique Kafkaïenne d'extermination systématique de tout sentiment, toute pitié et tout ce qui pouvait apparaître extérieurement comme humain chez Grégor. On ne l'entend plus penser, sa famille non plus, il devient moins compréhensible, voire répugnant. Ptèt qu'il parle au fond de lui, ptèt qu'il crie, ptèt qu'il souffre, mais non, on ne l'entend plus, donc il ne pense pas et ne souffre pas. C'est juste devenu un gros machin putride. Peu importe s'il crève.


Et à la fin, le gros machin crève et tout le monde est content.
Remarquez que cette nouvelle doit être la seule de Kafka à posséder un happy ending.