Caractères noirs sur div blanche

Malévitch défend, depuis l'URSS des années 20, l'idée que le travail doit permettre d'atteindre la paresse. Le capitalisme l'aurait déjà accompli, mais que pour la frange réduite des possesseurs de capitaux. Le socialisme doit donc mettre tout le monde au travail, afin de dégager le plus de temps de paresse possible, propice à l'innovation, la création ou la pensée.

Le texte est empreint d'idéologie progressiste : pour le peintre russe, la croissance irrésistible des machines permettra bientôt aux humains de se passer de travail, et les machines devront à leur tour concevoir des automates pour se libérer du travail ! Cette thèse, bien qu'imprégnée de futurisme, ne doit pas nous faire oublier que Malévitch est avant tout le chef de file du courant suprématiste, lequel vise à une harmonie parfaite avec la nature. L'automatisation des processus de production doit permettre à l'homme de se rapprocher de l'état de nature à travers l'état de paresse. Il pourra en effet seulement se réaliser lorsque les conditions à sa survie seront réunis, et la société socialiste pourra alors former un tout uni, une véritable pureté de l'être et de la vie à l'image des tableaux de Malévitch.

Évidemment, le socialisme soviétique ne suivra pas du tout cette ligne de conduite. Malévitch sera qualifié de rêveur philosophique, arrêté, torturé, et son art confisqué - alors même qu'il avait été élu député au Soviet de Moscou lors de la Révolution Russe. Bref, à l'Ouest comme à l'Est, le travail est de rigueur.