En Occident, nous connaissons peu le nouveau président chinois Xi Jinping (tant les médias ne se sont intéressés à son élection que par rapport à sa femme chanteuse d’opéra). Pourtant il a installé en Chine un pouvoir intelligent et conduit le pays vers des réformes essentielles.
Fils d’un ancien vice-premier ministre de Mao Zedong, écarté du pouvoir lors des purges de 1962, il signe aujourd’hui un livre remarquable, intitulé “La gouvernance de la Chine”. Ce livre devrait faire date ! En 550 pages, il rassemble ses discours et ses interventions les plus marquantes.
L’ouvrage compte 18 chapitres dont 11 sur les affaires intérieures, 7 sur les affaires étrangères. Mais nous ne devons pas nous tromper, ce livre a une signification politique, sociétale et comportementale.
Les premiers et derniers chapitres affirment la stabilité politique : “Le socialisme à la chinoise” et “La direction du PCC”, qui tous deux affirment la primauté politique du Parti et assurent ainsi la stabilité sociale.
Au fil de ses discours, Xi Jinping dessine le rêve chinois une “stabilité politique” qui permette des réformes à grande portée, ce qui à son tour favorise le développement économique.
"Le rêve chinois” constitue le second chapitre. Au fil des mots apparaît la grande mission de la Chine contemporaine : la renaissance nationale et le bien-être personnel. Xi Jinping écrit "depuis l’introduction de la politique de réforme et d’ouverture, en faisant le bilan de nos expériences et à force de recherches et de tatonnements pénibles, nous avons fini par trouver une voie juste pour réaliser le grand renouveau de la nation chinoise et remporter des succès remarquables : il s’agit là de la voie du socialisme à la chinoise” (page 39).
Un peu plus loin dans son discours du 28 avril 2013, Xi Jinping écrit quelque chose qui devrait être le coeur de toute pensée politique contemporaine : « le peuple fait l’histoire et le travail crée l’avenir. Le travail est la force fondamentale qui fait avancer les sociétés humaines. Cependant, le bonheur ne tombe pas du ciel, et un rêve ne se réalise pas tout seul. De ce fait, afin d’atteindre nos objectifs et de préparer un bel avenir, il faut nous appuyer sur le peuple » (page 49).
Conscient de l’importance de la jeunesse (à laquelle il consacre un discours), il écrit « les jeunes doivent garder en tête que les ‘discours creux nuisent à l’Etat, tandis que les actions concrètes renforcent’. Il est indispensable qu’ils soient dévoués à leur poste de travail, qu’ils commencent leur tache par eux-mêmes et par des petits riens, et qu’ils accomplissent des exploits notables afin d’assurer l’épanouissement de leur vie » (page 59).
Après ce chapitre sur le rêve chinois qui sera le coeur de la stabilité nationale et mondiale apparaissent les chapitres sur l'approfondissement de la réforme et le développement économique, qui conduisent à des chapitres sur la primauté du droit, la culture avancée, les entreprises sociales et le progrès écologique. A la page 89, apparaît le véritable « combat » de Xi Jinping : “la proposition de ‘faire jouer au marché un rôle décisif dans la répartition des ressources’ permet d’établir, au sein du Parti et dans toute la société, un concept correct sur les rapports entre le gouvernement et le marché, de changer le mode de développement économique, de reconvertir les attributions du gouvernement et de réprimer l’immobilisme et la corruption”. Il affirme ici très clairement que la lutte contre la corruption est essentielle à l’avenir de la Chine.
La Chine ne grandira qu’en affirmant son système : le “socialisme à la chinoise”. Il faut entendre que ce système entend tirer « la flèche du marxisme sur la cible de la révolution et de la réforme ». Cela signifie qu’il ne faut pas oublier les principes généraux :
- l’indépendance : la Chine reste non alignée
- le multipolarisme : aucun pays ne domine
- le double système : « un pays deux système » (comme avec Hong Kong)
- le développement pacifique : il ne s’agit pas de créer une hégémonie nouvelle, il s’agit de collaborer ensemble avec les pays pour dessiner un bel avenir ensemble.
- la coopération est internationale, les affaires sont multilatérales.
Dans son chapitre sur le développement pacifique, Xi Jinping précise que “poursuivre la voie de développement pacifique constitue un choix stratégique fait par notre Parti en prenant en considération les tendances de notre ère et des intérêts fondamentaux de la Chine”. Il poursuit en expliquant que ceci ne peut pas se faire sans être guidé par la théorie de la “triple représentation”.
Cette dernière est pour nous quelque chose de mystérieux, mais si l’on cherche, on découvre alors que “les trois représentations” est une politique développée par Jiang Zemin. Cette théorie explicite les trois catégories que le PCC se doit de représenter : les “forces productives progressistes”, la culture chinoise moderne et les “intérêts fondamentaux de la majorité de la population” chinoise. En d’autres termes, le développement de la Chine ne peut se faire qu’en respectant l’équilibre de ces trois “forces”.
Comme je l’ai déjà développé dans un autre article , l’un des symboles de la politique de Xi Jinping est la “ceinture économique de la Route de la Soie”. A la fois terrestre et maritime, elle sera sans doute céleste, mais elle permet à la Chine de s’ouvrir à des collaborations internationales, à des amitiés et des partenariats. Sous son impulsion le monde se prend à rêver économiquement, écologiquement et intellectuellement.
Nombreux sont les détails que nous pourrions aborder ici. Ce livre blanc est lancé au monde avec un principe étonnant de simplicité et d’authenticité. Difficile parfois d’en comprendre toutes les tournures poétiques. A l’heure où les politiques occidentales se jouent davantage dans les espaces virtuels, il est agréable de lire un véritable ouvrage qui sonne comme un exercice de politique générale et qui donne matière à rêver, à s’intéresser, à s’ouvrir à l’humanité.

Sonia Bressler
Sonia_Bressler
9
Écrit par

Créée

le 2 mars 2015

Critique lue 911 fois

4 j'aime

1 commentaire

Sonia Bressler

Écrit par

Critique lue 911 fois

4
1

Du même critique

comment marchent les philosophes ?
Sonia_Bressler
6

« Montre-moi comment tu marches, je te dirai comment tu penses ! »

Cher Roger-Pol Droit, Je tenais ici à vous écrire une lettre. Une volute de mots en pas raisonnés. Une scansion de respirations sur le rythme du coeur... Cela fait si longtemps que j'attendais un...

le 18 août 2019

1 j'aime