Pour un premier roman, c'est plutôt intéressant, mais rien qui puisse rester dans les mémoires.


Le Complexe d'Eden Bellwether raconte l'histoire d'un jeune aide-soignant cultivé mais venu de basse classe sociale qui intègre fortuitement un petit groupe d'étudiants de Cambridge. Le récit se concentre sur Eden, présenté comme un jeune prodige d'une intelligence supérieure qui pense avoir des pouvoirs de guérison.
Enfin, "se concentre", c'est vite dit, car la concentration, ce n'est pas le fort de ce roman qui peine à vraiment aborder un sujet à fond et préfère papillonner de thème en thème, sans jamais qu'aucun ne soit abordé profondément. Et ce qui vaut pour les sujets vaut aussi pour les personnages dont les esquisses sont intéressantes mais qui n'évoluent pas et ne sont jamais bien exploités (sauf 1).


Cependant, on peut lui pardonner cela puisque ce n'est clairement pas le but du livre, dont l'ambition est de raconter la frontière entre le génie et la folie. Malheureusement, là aussi, cela ne marche pas, car l'auteur échoue à faire dialoguer et penser ses personnages comme des personnes réellement cultivées ou intelligentes.


Je précise: il y a une grande superficialité dans l'"érudition" pourtant vantée en quatrième de couverture, qui est plus proche d'une culture générale d'un candidat de "Qui veut gagner des millions" que de la profondeur d'un Umberto Eco.
Dans certains cas c'est évident que l'auteur voulait juste namedropper quelque chose et a donc juste décidé de l'intégrer au milieu de nulle part dans une conversation, trop souvent à mauvais escient. Ce n'est qu'un exemple, mais à quoi ça sert d'écrire un paragraphe sur l'harmonie des sphères de Pythagore alors que cela n'a fichtrement rien avoir avec l'intrigue du livre, n'apporte rien au lecteur qui ne la connait pas puisque mal expliquée (et pire, le fait passer pour quelque chose de manifestement loufoque), et n'a rien à voir avec la conversation précédente et suivante?


Mais le pire sont les dialogues qui se veulent philosophiques qui seraient peut-être acceptables comme (bonne) dissertation d'un lycéen mais guère plus. C'est presque douloureux de lire ces passages que l'auteur considère manifestement comme culturellement riches mais qui ne font qu'argumenter de manière très basique.
J'insiste là-dessus ; c'est important car les personnages sont sensés être très intelligents mais que cela ne se voit pas du tout. Je n'ai jamais vu Eden autrement que comme un espèce de psychopathe arrogant, pas comme en génie, car ses discours, en général, sont certes remplis de références savantes mais ont un faible contenu intellectuel réel. Et malheureusement, à l'exception éventuelle d'un personnage, personne d'autre n'est mieux loti, et surtout pas la prétendue étudiante d'élite Iris dont la réplique la plus intelligente ressemble à "mé avant on savé pas à propos de la physikantik donc peut-être que la guérison magique sa exist lol".


Pour le reste, l'histoire se suit facilement, on a envie de continuer et de voir quelle position l'auteur va adopter. C'est pourquoi j'ai mis 5 et pas 0. De plus, les défauts semblent plus provenir d'un excès d'enthousiaste de l'auteur plutôt que de mauvaises intentions, et peut-être ne seront-ils pas aussi apparents à d'autres lecteur au background intellectuel différent.

Karayas
5
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le 18 déc. 2016

Critique lue 970 fois

3 j'aime

Karayas

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