Le Juif imaginaire a été publié en 1980 ; l’auteur avait à peine plus de 30 ans. Cela se sent un peu mais ne rend pas le livre dépassé pour autant.
Je l’ai trouvé intéressant à plus d’un titre. A travers l’esquisse d’un autoportrait psychologique de l’étudiant et du jeune adulte qu’il était, A. Finkelkraut nous donne à saisir l’état d’esprit d’une époque marquée – mais pas seulement - par mai 1968 et où « tout [était] politique ». Mais plus encore, on y découvre ce que le mot « juif » a signifié pour lui, de quel poids il était chargé – notamment après Auschwitz - et comment il s’en est servi pour s’affirmer devant les autres.
L’auteur, issue d’une famille juive sécularisée et lui-même irréligieux, distingue deux pôles du judaïsme, apparus après la Révolution de 1789, celui qui prône l’assimilation et celui qui veut conserver la « tradition ». Il évoque aussi une complexité nouvelle apparue lorsque les juifs d’Europe orientale ont commencé à arriver en France à la fin du XIXe siècle et au début du XXe puis lorsque les séfarades pieds-noirs ont quitté l’Algérie après son indépendance. Un chapitre est consacré au sionisme, de sa naissance aux débats actuels sur l’usage qui est fait du nom pour masquer l’antisémitisme.
C’est, en quelque sorte, de l’extérieur qu’Alain Finkelkraut parle de sa judéité, donnant l’impression qu’il regrette de l'avoir perdue, mais observant – selon lui – le déclin inéluctable des traditions portées par le judaïsme, du moins en France,.