Il est des livres sur lesquels on pourrait écrire des pages entières pour en souligner tous les défauts, et d’autres avec lesquels il est plus compliqué de s’étendre. Le sauveteur de touristes est un petit roman de 170 pages qui respecte totalement sa fonction, celle de distraire d’un bout à l’autre en proposant une intrigue aussi tirée par les cheveux que cohérente (eh oui, il fallait le faire !). L’écriture est agréable. On se laisse de suite embarquer par la narration à la première personne de Tom, et rien ne vient gâcher le voyage. Le ton de Eric Lange est assez grinçant, on ne passe pas à côté des critiques à peine voilée de certaines institutions modernes, mais il arrive heureusement à ne pas trop en faire. J’ai craint, au début, d’avoir droit à de la critique facile style vieux punk sur le retour. Cependant, l’humour, et la finesse de la plume permettent d’éviter les phrases « coup de poing » qui se parodient elles-mêmes. L’affaire autour d’Open Life est tellement burlesque qu’on ne pourrait pas reprocher à l’auteur de trop en faire… C’est assumé, et c’est ce qui rend l’histoire si bonne.


En fait, tout est absolument exagéré. On peine à croire qu’il est possible de tenir une bonne intrigue en allant au Moyen-Orient, en France, à Bangkok, en Inde, aux États-Unis, en Égypte, en Angleterre, en Australie en si peu de pages. Non seulement le changement échevelé de décor se passe bien, mais pour chaque pays, une nouvelle ambiance prend le relais. En quelques mots, Lange nous offre la vision, les odeurs, la vie d’un autre territoire. Le lecteur est véritablement transporté, comme assez rarement dans un récit où l’on découvre des mondes encore inconnus. J’ai souvent eu la sensation qu’un carnet de voyage s’était tout simplement glissé au milieu du scénario, mais tout s’adapte suffisamment bien à l’intrigue pour qu’elle ne devienne pas un bête prétexte à étaler des observations de globe-trotter.


Les personnages qui jalonnent la route de Tom sont aussi assez incroyables. Il fallait oser, par exemple, faire du plus gros crack de l’informatique une sorte de gourou bicéphale à double pénis terrés dans les rues miséreuses de Bangkok. Dis comme cela, on pourrait croire à une blague. Au fond, c’en est une mais, à ce moment, il semble déjà acquis que tout sera insolemment trop énorme pour être vrai.
Au final, tout en gardant le ton du roman noir, Eric Lange va nous mener peu à peu sur une intrigue qui flirte avec la science-fiction. Il serait difficile d’en dire plus, hélas, la technologie prend rapidement une place importante dans le récit.


Si vous êtes à la recherche d’une lecture sympathique, sans prise de tête mais avec un certain nombre de références culturelles pour décoller un peu de chez vous (et donner, qui sait, des idées de vacances pour les plus téméraires), je conseille la lecture du Sauveteur de touristes. Plus mitigée sur Palissade, je suis désormais convaincue que suivre les publications de Taurnada peut réserver de bonnes surprises.


Voir sur le blog

Barbelo
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à sa liste Les meilleurs livres de 2015

Créée

le 6 avr. 2015

Critique lue 136 fois

Barbelo

Écrit par

Critique lue 136 fois

D'autres avis sur Le Sauveteur de touristes

Le Sauveteur de touristes
LKA
10

L'écrivain voyageur ...

Par réflexe de lecteur compulsif, j’ai la manie de classer mes lectures et leurs héros par genre dans un rayonnage virtuel de ma bibliothèque encéphalique. Et dans mes circonvolutions, je dois dire...

Par

le 14 mars 2015

Du même critique

Hellraiser
Barbelo
7

Avant le film, la nouvelle

Très agréable à lire, Hellraiser parvient à intriguer et à surprendre son lecteur jusqu’à la fin. La principale originalité tient bien sûr à la création des Cénobites. Sortes d’êtres humains mutilés,...

le 3 mai 2013

9 j'aime

I, Frankenstein
Barbelo
2

Attention à vos neurones !

- Eh, c'est la fin du mois, il faut penser à rentabiliser son abonnement ciné ! - Aucun film ne me parle en particulier, on a qu'à se faire une séance au hasard... - Non attend, je crois que j'ai...

le 30 janv. 2014

8 j'aime

Sécheresse
Barbelo
8

Et si la pluie cessait de tomber ?

Les quelques 300 pages de Sécheresse passent lentement. Le soleil est omniprésent, brûlant et pesant. Sans pluie, la société humaine s’arrête de tourner, et tout meurt peu à peu, végétaux et êtres...

le 17 févr. 2013

8 j'aime