J'aime cuisiner. Je cuisine tous les jours. Sans ostentation ni prosélytisme, je fais partie de ces personnes qui ne peuvent acheter quoi que ce soit aux rayons surgelés ou plats préparés, et pas un biscuit industriel n'entre dans mes placards. Je vis à la campagne depuis quinze ans, ça aide pour trouver des producteurs locaux afin de se procurer sans intermédiaires des produits de qualité, bio ou issus de l'agriculture raisonnée ou encore du maraîchage.
J'aime cuisiner. Par conséquent, j'aime les livres de cuisine.
J'aime cuisiner. Je cuisine tous les jours. Des plats simples et savoureux. Pour moi, la cuisine quotidienne ne doit pas être une prise de tête. J'invente la plupart de mes plats en fonction de ce que je trouve dans mon frigo, j'ai la chance d'être créative. Pour moi, la cuisine quotidienne doit aussi être rapide et la préparation d'un repas ne doit pas excéder une demi-heure.
On ne peut pas être français et aimer cuisiner sans aimer aussi un minimum de sophistication. C'est pourquoi, en marge de la cuisine quotidienne, il y a la pâtisserie et les repas "petits plats dans les grands" quand des amis viennent en visite gourmande. Mais pour ça, il faut du temps et de l'envie et ici je vous parle de tout autre chose.
Je vous parle de ce très beau livre, recueil de recettes élaborées par trois amis, fermiers en Australie. J'avoue qu'avant d'ouvrir ce livre qui m'a été offert, j'avais de gros doutes quant à l'association des mots "gourmet" et "Australie" mais force m'a été d'enterrer mes préjugés, ne serait-ce qu'au regard des très belles photos qui illustrent le recueil.
Par contre, l'intérêt d'un livre de cuisine ne réside pas pour moi en la seule beauté des visuels mais surtout dans l'accessibilité technique des recettes qu'il renferme et là, le bât blesse cruellement.
Matthew Evans, Nick Haddow et Ross O'Meara ne sont pas seulement éleveurs et crémiers, ils vendent aussi leurs produits fermiers sur les marchés. Ils font donc tourner une petite production artisanale et disposent d'un matériel et d'un équipement qui nécessitent place et investissement pécuniaire. Ma petite cuisine de 9m² est déjà bien remplie et mes deux petits plans de travail sont vite débordés. De plus, ces trois amis gourmets font absolument tout eux-mêmes, hors l'huile d'olive : beurre, crème, fromages, saucisses et charcuteries... Ils fument leur viande et leur poisson, ils mettent en conserves légumes et condiments, et ils ont tellement l'habitude de le faire qu'ils présentent tout cela comme allant de soi et étant vraiment très simple à réaliser. Je réponds : faux.
Ce n'est pas simple de saler un jambon entier et de le suspendre pendant des mois dans une atmosphère appropriée, ce n'est pas simple de battre son beurre après chaque traite, ce n'est pas simple de fumer au foin ses truites sauvages. De plus, les quantités des recettes sont souvent monstrueuses car lorsque vous vous lancez dans la confection de rillettes, ce n'est pas pour le bénéfice d'un petit pot de 200g mais bien pour faire vos réserves de l'hiver.
De toutes les appétissantes recettes présentées, il n'y en a qu'une que j'ai jugée réalisable par mes soins avec les contraintes de temps et de coût qui sont les miennes : un quatre-quarts à l'huile d'olive. C'est mince (contrairement au tour de hanches après dégustation dudit quatre-quarts).
En résumé, ce livre est beau mais pour moi c'est insuffisant. Je lui préfère la cuisine de bistrot de Stéphane Reynaud. De plus, c'est un recueil qui amène pas mal de frustration car lorsqu'on se laisse séduire par une belle photo et qu'on décide de se lancer, on se heurte à une liste d'ingrédients plus ou moins introuvables comme des pistils de safran, de la mélasse, du ghee ou 2kg d'os de porc.
Un livre de cuisine malheureusement condamné à prendre la poussière sur son étagère.