En 2007, 39 écrivains latino-américains ont été sélectionnés parmi les plus prometteurs de moins de 40 ans. Beaucoup ont confirmé leur talent depuis : Adriana Lisboa (Brésil), Jorge Volpi (Mexique), Santiago Roncagliolo (Pérou), Wendy Guerra (Cuba), entre autres. Et aussi Karla Suarez, qui n'a écrit que 4 romans, mais tous remarquables et le dernier en date, Le fils du héros, n'est pas le moindre. La romancière se met dans la peau d'Ernesto, cubain né à la fin des années 60. La mort de son père, soldat en Angola, est le traumatisme de son enfance dont il ne se remettra jamais, devenant littéralement obsédé par les circonstances de sa disparition au point de ne s'intéresser qu'à cela et de compromettre ses relations amoureuses. Karla Suarez possède un fabuleux sens du rythme et une fluidité d'écriture admirable. Plutôt que de recourir à une progression chronologique classique avec flashbacks intégrés, elle enchevêtre les différentes périodes de la vie d'Ernesto, dans chaque chapitre, sans jamais égarer le lecteur. Le fils du héros excelle à superposer récit intime et faits historiques, au gré de l'évolution de la propagande étatique cubaine qui fait illusion avant de créer une génération de déçus, premiers critiques d'une politique désastreuse alors que de plus en plus de citoyens fuient un pays dont ils garderont pourtant toujours la nostalgie. Ernesto, au demeurant, n'est pas un personnage sympathique : égoïste, maladroit, peu doué pour les relations humaines, introverti ... Mais touchant, aussi, de par ses imperfections, avec à ses côtés une mère, une soeur, un ami et une épouse aimants et indulgents (jusqu'à un certain point). Le fils d'un héros est un roman passionnant, incroyablement attachant et dense, fourmillant de détails sur la vie quotidienne à Cuba et sur celle des émigrés à Berlin ou Lisbonne. Plaisir supplémentaire : son dénouement, inattendu et qui rebat complètement les cartes. Magistral ! Magnifique ! Mémorable !

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le 20 sept. 2017

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