Céki, Marc Charuel ? Un photographe de guerre, qui a peu publié, et rien depuis 1998. Si Le jour où tu vas mourir a une qualité, c'est bien celle d'être très documenté et fouillé sur les conflits de la deuxième moitié du XXe siècle, de l'Indochine à l'ex-Yougoslavie. Le roman est un thriller extrêmement ambitieux qui passe d'un personnage à l'autre, une grosse vingtaine au total, dans une course contre la mort haletante, dont on ne perd jamais le fil, et qui sait ménager ses effets. Il est indéniable que Charuel a le sens du suspense et l'intérêt ne faiblit pas, sauf peut-être sur la fin, aux côtés des Karens qui luttent contre la junte birmane, mais il est vrai qu'on a déjà dépassé les 600 pages. Du bassin d'Arcachon à Bangkok, le lecteur suit les traces d'un journaliste, d'un tueur, du chef de la police thaïlandaise, de membres d'une triade chinoise, d'une petite famille française en vacances, d'hommes d'affaires belges, d'un vendeur du BHV, on en passe et de tous les genres. Le livre, c'est une toile d'araignée, qui part d'un fait divers sanglant pour nous immerger peu à peu dans l'univers glauque des snuff movies. C'est là où réside le malaise. Que l'auteur tartine des pages sur la jouissance qu'éprouvent les clients devant ces films est déjà insupportable. Mais il va plus loin, en décrivant lui-même, avec force détails, les tortures et mutilations que subissent les victimes filmées par des caméras, jusqu'à l'agonie. Complaisantes, ces pages ? Ressenties comme telles, en tous cas, et pénibles à lire, à moins d'être un inconditionnel de la littérature gore. A côté, les autres défauts dans la trame du livre sont bénins : un enchaînement de hasards et coïncidences pas très crédible, une théorie du complot un soupçon démagogique, genre : ceux qui nous gouvernent depuis trente ans sont tous pourris et l'armée française est un ramassis de malades mentaux. Passons. Quant à la police thaïlandaise, elle pourrait faire un procès à Charuel tant ses méthodes expéditives, assassinats en cascade, sont montrées du doigt, dans leur présumée cruauté dénuée d'états d'âme. En résumé, un bouquin qui nous met le nez dans les immondices, d'autant plus désagréable qu'il est d'une efficacité redoutable et qu'il se dévore comme dans un rêve. Ou plutôt un cauchemar.

Cinephile-doux
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le 27 avr. 2017

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