Héros = martyr ?

Ce beau livre revient sur 17 personnalités qui ont contribué au photojournalisme dans des conditions dangereuses. A chaque fois, une notice de deux pages, allant à l'essentiel et n'hésitant pas à dramatiser leur parcours, sert d'introduction à une série de planches montrant quelques photographies choc des personnalités.

Sur quels critères ont été choisies ces personnalités ? Les deux auteurs ont travaillé à Paris Match, aussi ne s'étonnera-t-on pas trop que les journalistes de Match soient quelques peu surreprésentés. On peut quand même s'étonner de certains choix.

La part belle est faite aux correspondants de guerre, principalement ceux ayant couvert la guerre d'Espagne (Robert Capa, Gerda Taro, Augusti Centelles), la guerre du Vietnam (Burrows/Huet/Potter/Shimamoto, Sean Flynn, Michel Laurent) et la Libye en 2011 (Tim Hetherington/Chris Hondros, Rémi Ocblik). Cependant on ne comprend pas très bien ce que vient faire là Tina Modotti, artiste hollywoodienne qui couvrit la misère au Mexique, mais dont on nous montre surtout les photographies de nu de sa carrière antérieure. Idem avec Jon Mozo, photographe spécialisé dans le surf à Hawaï, tragiquement mort noyé. Ou encore Sha Fei, reporter chinois communiste qui couvrit la résistance à l'invasion japonaise, et mourut exécuté après avoir été reconnu fou.

Il semble bien que le critère soit que ces gens sont morts en faisant leur métier. Mais là encore, ça ne fonctionne pas bien : Alberto Korda est mort d'un arrêt cardiaque, et sa notice se justifie seulement parce qu'il est l'auteur de la plus célèbre photo du Che. On ne voit pas bien en quoi cela fait de lui un "héros du photojournalisme".

Bien sûr, on apprend des choses et ce n'est pas mal fait, mais le choix des notices semble un peu partial. Pourquoi, par exemple, ne pas avoir couvert la star qu'est Steve McCurry, auteur de la célèbre photo d'une jeune fille afghane, ou de photos emblématiques de la première guerre du Golfe ? Et ce n'est qu'un exemple parmi d'autres.

Ce livre est loin d'être inintéressant, mais les choix qu'il opère dans son sujet ne cherchent ni l'exhaustivité, ni l'objectivité. Le traitement recherche un peu le sensationnel, mais il faut dire que le sujet est particulièrement exaltant.