Les heures souterraines s’articulent autour de deux personnages, Mathilde et Thibaut. Delphine De Vigan nous conte une de leur journée (celle du 20 mai) en mêlant les chapitres qui leur sont consacrés. A raison de deux chapitres pour Mathilde contre un pour Thibaut. A la louche, ce ratio : je n’ai pas compté précisément.
Pourquoi le 20 mai ? Parce qu’une voyante du 16e arrondissement a prédit à une Mathilde à bout de force que sa vie allait changer ce jour-là. Elle allait à nouveau rencontrer un homme. Sa vie redémarrerait. Veuve depuis 10 ans, elle élève seule ses trois gosses. Ils sont tellement adorables qu’on se demande s’ils existent vraiment. Ils sont bien polis, aiment leur gentille maman, la réconforte quand le vernis se fendille et qu’elle manque de s’écrouler. Ils font leurs devoirs seuls, rangent leur chambre sans qu’on ait besoin de leur demander dix fois… Trois perles. Heureusement. Car cette cadre dynamique subit un harcèlement moral au boulot. Son supérieur est vraiment très très méchant et n’a de cesse de lui pourrir la vie. Elle n’en peut plus et cette journée du 20 mai va être vraiment une journée de merde ! L’apothéose. Elle aimerait plus que tout qu’un homme la prenne dans ses bras et la réconforte.
Thibaut est un médecin provincial venu exercer à Paris. Il ne supporte pas la campagne. Pour lui, la vie c’est le bruit, le foisonnement de la capitale. Et en ce 20 mai, il va être servi. Car lui non plus ne va pas s’éclater au boulot ! Une bonne grosse journée bien exaspérante, faite d’embouteillages et de stress divers. Et pour parachever le tout, il vient de trouver le courage de bazarder sa copine qui lui a broyé menu son petit cœur par son indifférence insupportable. Ardente au pieu, mais un véritable glaçon une fois revenu en position verticale. Il aimerait plus que tout qu’une femme le prenne dans ses bras et le réconforte.
On voit rapidement le tableau se profiler à l’horizon. Les poncifs s’accumuler. L’Amour avec un grand A qui balaiera d’un coup tous les problèmes. La question que le lecteur se pose alors, c’est « à quelle page Thibaut va-t-il se retrouver au lit avec Mathilde ». On dévore le livre, chapitre après chapitre en se disant « dans le suivant, peut-être ? ». En attendant l’auteur ne nous épargne rien. On va de cliché en cliché, de remplissage en remplissage (le bureau près des chiottes et dont la cloison n’est pas bien épaisse, les stat SNCF sur les lignes de RER, le contenu du disque dur de Mathilde (uniquement la partition C:\), les poissons de son écran de veille, les premiers paragraphes du « World of Warcraft pour les nuls »…). Toute une foultitude de détails insignifiants dont on se fout royalement et qui n’apportent absolument rien au livre. S’ajoute une bonne dose de pathos lorsqu’on apprend que Philippe est décédé dix ans plus tôt dans un accident de voiture et que la vie après ce désastre a vraiment été très dure.
Bref, même si le livre est bien écrit (c’est du Delphine De Vigan tout de même), il ne m’a absolument pas intéressé. Cette asphyxie de la routine aliénante, ces heures passées dans le métro, les retards, les suppressions, les avaries qui obligent les trains à stopper dans les tunnels… Je connais, je les vis également chaque jour. Mathilde n’a rien à faire. Thibaut n’attend plus rien, Delphine n’a rien à raconter et moi rien à lire.
Tout ça pour ça ?
BibliOrnitho
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le 9 janv. 2014

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