Pour la première fois avec Dick, je me suis ennuyé. Ses romans réalistes n'ont pourtant jamais manqué d'atours à mes yeux, des voyages immobiles dans la dépression, lucidité hallucinatoire qui rogne la structure du réel sans avoir besoin de la moindre ficelle de la littérature de genre.


Après trois romans dans ce style, on commence à connaitre les codes obsessionnels de l'auteur tout en en appréciant les variations. Mais cette fois, la musique tourne en boucle. Dick ne fait rien d'autre que parodier ses prétentions naturalistes en nous offrant son énième héros paumé - une héroïne cette fois, unique originalité apportée par cet opus.


Ennuyeux ne signifie pas mauvais. Quelques fulgurances font mouche, une poignée de situations d'une grande banalité parviennent à virer inopinément vers la folie. Ça sent l'authenticité, malaise et désespoir le long du tunnel, et toujours ce halo d'optimisme au bout du chemin qui permet de respirer, malgré les dégâts reçus en cours de route. Les personnages agacent, souvent, mais restent toujours crédibles dans leurs incohérences, ce qui prouve à quel point Dick est capable de dresser de solides portraits psychologiques.


L'intrigue, par contre, est une catastrophe. Une succession de non-événements prévisibles ou ineptes, qui bégayent, qui énervent, et qui débouchent sur des réflexions brillamment inconsistantes. C'est désespérant de vide, de langueur et de froideur. On s'accroche pour le plaisir de certains dialogues, mais l'épreuve de lecture n'est franchement pas récompensée.


On pouvait regretter le manque de rôles féminins de premier plan dans l'univers fictionnel de Dick, mais si la réponse est ce Pacific Park, mieux vaut peut-être alors ne pas trop insister...

Amrit
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Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Philip K. Dick, chronologie d'une quête mystique et Lectures 2017

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le 29 janv. 2018

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