Infernale Carte Postale

Feu Charles Aznavour nous a laissé une trace de son passage, une empreinte qui fredonne au coin de nos têtes un "Viens voir les comédiens", un "For me, for me, formidable" mais aussi un "Il me semble que la misère serait moins pénible au soleil". Julien Blanc-Gras, avec brio, a noirci 252 pages sur l'absolue fausseté de cette jolie et poétique hypothèse.
Charles déjà était prudent, Julien lui, a été vérifier.
C'est ce qui m'a le plus frappé dans cet ouvrage. Il est bien sûr question pour l'auteur d'explorer in situ la question du réchauffement climatique et ses conséquences concrètes pour de vrais gens, loin des congrès, des conférences et des énièmes rapport d'experts, mais le récit eût été tout aussi percutant si cet angle n'avait pas existé.
Pour moi, c'est avant tout un témoignage sans fioriture sur l'envers de la carte postale, sur la qualité carcérale des petites îles, sur l'horizon des vies humaines inversement proportionnel à celui, infini, des océans, sur le malheur à vivre en trop petites communautés. Il n'y a vraiment que nous les Occidentaux vivant et arpentant un continent solide, varié et fertile pour parer une plage de sable blanc, un lagon translucide et un cocotier nonchalant de toutes les vertus existentielles et se convaincre qu'ils recèlent l'antidote à nos vies stressantes et matérialistes.
Je recommande donc chaudement le dépaysement dérangeant auquel l'auteur nous invite.
On revient de ce voyage et de ces rencontres à l'autre bout de la terre pour une fois l'expression n'est pas galvaudée -, triste, impuissant, mais aussi un tout petit peu plus humain, comme à chaque fois qu'on ouvre bien grand les yeux pour y laisser entrer ce qu'est la vie pour d'autres que soi.
Très bonne lecture.
Amitiés,
Dustinette