Grand prix de littérature policière 2018

Roman noir classique très efficace, Sans lendemain met en scène un engrenage implacable dont la narratrice ne sortira pas indemne.


Billie Dixon a toujours voulu travailler dans le cinéma : après avoir présenté ses scénarios aux Majors, elle se tourne vers les petites maisons de production où on lui propose de distribuer de médiocres films dans les coins les plus reculés des Etats-Unis. Au volant de sa voiture, la jeune femme parcourt le Missouri et le Tennessee jusqu’à atterrir à Stock’s Settlement dans l’Arkansas. Pour vendre ses films au cinéma Eureka, Billie va devoir convaincre le frère Obadiah Henshaw, l’homme d’Eglise du village qui s’est mis en tête que le septième art est celui du diable. Tout ne se passe pas comme prévu puisqu’en plus d’être confrontée à ce prédicateur fanatique, Billie tombe amoureuse d’Amberly, l’épouse du pasteur…


Grand prix de littérature policière 2018, Sans lendemain ne se lâche pas : sa construction habile et son rythme implacable tissent un récit où s’entremêlent mensonges et désirs. Jake Hinkson, passionné de cinéma, rend bien compte de l’attrait qu’exerçait Hollywood en cette fin des années 1940 alors que, pourtant, le maccarthysme menaçait de purge les studios américains. Un style concis conduit à une habile construction des personnages : une héroïne incapable d’aimer et pourtant attirée au premier regard, un homme ayant perdu la vue mais gagné la foi et une femme de pasteur prête à tout pour vivre un rêve. « N’allez pas dans l’Arkansas » avertit la première phrase du roman, mais lisez Sans lendemain.


« La limite du Midwest vient s’échouer au pied des Ozarks. Les champs, qui sont d’abord aussi verts et plats que des tables de billard, s’élèvent progressivement de part et d’autre de la route avant de céder la place à des collines plantées de denses forêts parsemées d’affleurements rocheux. Plus je m’enfonçai dans les Ozarks, plus les routes tournicotaient sans prévenir dans les arbres, comme si elles suivaient à la trace les pas tortueux d’un ivrogne. Des voies sinueuses qu’il fallait chercher s’accrochaient aux flancs de montagnes couvertes de pins, et j’avais beau avoir une carte posée sur le siège à côté de moi, je ne pouvais pas la regarder et conduire en même temps, de peur de quitter la route et de tomber dans un ravin profond de quinze mètres. Lorsque j’arrivai enfin dans l’Arkansas, les jointures de mes doigts étaient blanches tant je serrais le volant, et je ne cessais de maudire cette affaire dans laquelle je m’étais embarquée. »

JulienCoquet
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le 23 avr. 2021

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Julien Coquet

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