Y'a tellement de jeux de mots dans la critique que j'en fais pas dans le titre

Je ne sais pas ce que j'ai computé ou comment quelque chose a déconné pour que mon cerveau finisse sur cette phrase : "ça doit être bien" après avoir percuté : "Sasha Grey, l'ancienne actrice porno trash écrit un roman."

Je n'en sais rien, j'ai oublié. D'ailleurs, à chaque fois que j'ai dit à quelqu'un : "Je lis un roman d'une ancienne actrice porno, mais jusqu'à maintenant, c'est nul", on m'a répondu : "tu t'attendais à quoi ?"

En fait, je sais. Grand naïf devant l'éternel, j'ai vu dans l'oeuvre de cette femme qui, pourtant encore très jeune, semble avoir déjà beaucoup vécu, une étape supplémentaire dans son parcours, une corde supplémentaire à un arc qui, apparemment, peut en contenir beaucoup simultanément.

J'imaginais un monde où les gens peuvent avoir tous les talents, peuvent briller de mille feux uniquement grâce à leur propre force. Je ne me souvenais plus des réseaux, de l'appât du gain, des cycles, de toutes les mécaniques à l'oeuvre autour des personnes publiques.

Du coup, c'est un peu comme une fleur vierge que j'ai cueilli ce petit roman, en version originale. Et les deux premières pages mettent l'eau à la bouche. La narratrice (qui n'est pas une actrice porno, non non non, pas du tout, elle le dit elle-même, d'ailleurs les porno sont très différents de la vraie vie et des vraies gens, n'essayez pas de faire la même chose à la maison sans un adulte pour vous surveiller) explique qu'elle est rentrée en contact avec un cercle uuuuultra private, la Juliette Society. Une société secrète, genre pire que Bildeberg & Co. tu vois. Ce sont les mêmes puissants qui se réunissent dans des endroits secrets (que tout le monde peut voir mais c'est pas très important, si vous arrivez jusque là dans le livre, ça ne vous émeuvra pas outre mesure) mais pour décompresser plutôt que pour décider du sort du monde. Et pour décompresser, bah ils baisent comme des lapins dans des orgies à la fois sales, dégradantes, glauques et violentes. Bien entendu. Comme tout un chacun quoi, mais avec plus de fric.

Pour en arriver là, la narratrice, dont on se care du nom, nous raconte sa vie, par le menu qui intéresse le frustré sans cerv... le lecteur. Elle est étudiante, elle a vu des films français et elle fantasme sur son prof. Alors, en toute logique, elle nous raconte ce qu'elle a retiré de ces films et ce qu'elle aimerait faire à son prof, ou ce qu'elle aimerait que son prof lui fasse. Sur des pages et des pages. Et puis elle rencontre une fille belle et louche et mystérieuse qui est aussi étudiante et à qui jusque là elle n'avait jamais parlé. Et cette fille, plein de mystères, se tape ledit prof ! Et elle raconte à la narratrice ce qu'elle fait avec le prof ou plutôt ce qu'il lui fait. Et puis la narratrice, qui s'appelle Catherine, comme Catherine Deneuve dis-donc, l'héroïne de Belle de jour, le film qui a transformé sa vie TIENS DONC COÏNCIDENCE COÏNCIDENCE ! Catherine donc, rentre chez elle voir son copain. Elle l'aime très fort d'un amour pur et frais, et ils ne baisent pas, ils font l'amour et elle est épanouie et elle nous le raconte sur des pages et des pages.

On fait des va et vient dans toutes les strates de l'univers : son amie chelou lui présente d'autres types chelou et des endroits où le sexe est libre et elle se laisse un peu entraîner Catherine, mais pas trop parce que tu comprends, elle est amoureuse, et même si ça la démange vachement à la culotte, elle reste "sage".

Et puis elle se dispute avec son copain. Alors pour déstresser, Catherine fait comme tout le monde, elle se branle. Donc elle le raconte. Et elle explique à quoi elle pense pour se faire du bien. À qui, comment, dans quelle position... Sur des pages. Et elle jouit. Mais comme ça ne suffit pas, elle recommence. Alors elle pense à autre chose, et à quelqu'un d'autre, un autre événement. Et elle jouit — encore. Mais comme ça ne suffit pas, elle recommence — oui ENCORE, ça te pose un problème peut-être ? Tu crois que c'est facile d'écrire un roman ? Une autre situation qui s'étale sur des pages et des pages. Et elle jouit. Et elle est *enfin* calmée.

Et comme elle s'est disputée, elle va pas non plus restée là sans rien faire hein, alors elle va là où son amie chelou est, et là, Catherine, tranquilou, la teuch à l'air après une incruste digne de Daniel Craig, elle se fait prendre par une quarantaine de mecs qu'elle n'a jamais vus, dans le plus pure style Eyes-Wide-Shut-j'ai-aucune-inspiration-je-rePOMPE-tout-ce-que-je-peux, avec des masques et des protocoles compliqués à base de découverte subtile et de fourage sauvage. Enfin, je crois, je suis plus très sur, à ce moment là, je zappais les pages qui ne parlaient que de cul (Ouais, j'avoue, j'en ai zappé quelques unes du coup et j'ai lu le bouquin plus vite).

Donc l'histoire continue, elle évolue dans une what-the-fuckness rarement atteinte, où tout n'est qu'invraisemblances et désintérêt. Le lecteur a l'impression de lire à l'envers la critique de la raison pure de Kant alors qu'il ne lit que les élucubrations centrée sur un seul sujet (le cul, mais pas comme vous l'aimez, ici il est chiant, répétitif et forcé) d'une gamine qui ne sait pas quoi dire mais tient à nous le faire savoir malgré tout. En fait, si on enlève les passages de sexe inutiles, toute l'intrigue aurait tenu sur un maximum de dix pages. On en a d'la chance d'avoir bouffé tout ça gratos n'est-ce pas ? Et puis j'ai pas dit comment ça finit. Non parce que malgré les baises dans tous les sens, à la fin — Oui, je la raconte la fin, on s'en fout du sucepense — elle redevient heureuse avec son amoureux après avoir COMME PAR HASARD PUTAIN LE HASARD C'EST PLUS C'QUE C'ÉTAIT eu à faire avec le grand vilain qui a zigouillé (plus ou moins) son amie chelou, et qui n'est autre que le boss de son mec, candidat à une élection importante quelconque, tremplin pour la présidence AMÉRICAINE OUI MADAME RIEN QUE ÇA.

C'est ce que j'ai lu de pire depuis bien longtemps. Rien n'est à sauver. Certains connards ont qualifié ce torchon indigne comme une évolution à Fifty shades of Grey. Alors j'ai pas lu cette autre merde, mais si l'un est juste l'évolution de l'autre, je pense que c'est clair : il vaut mieux brûler tout le monde. Non vraiment j'insiste, c'est tellement à chier partout qu'on va pas s'embarrasser des détails. On crame toute cette merde infâme et on essaye d'oublier tout le temps qu'on a perdu à le lire, à y penser, et surtout tout ce qu'on aurait pu faire d'autre à la place.
hillson
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le 3 janv. 2014

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