Si les chefs-d’œuvre se dérobent aux explications rationnelles, ils n’intimident pas Charles DANTZIG. Le sémillant éditeur, auteur de nombreux essais, recueils poétiques et romans, ne manque absolument pas d’audace ni de talent: dans son livre, il tente de savoir ce qui se dissimule derrière ce mot magique, dont la première occurrence daterait du début du XVIème siècle dans le Grand Robert.
Entre digressions, anecdotes et envolées lyriques, il ose balayer des pans entiers de nos lettres, inventorie les livres injustement dénigrés, déniche quelques pépites tombées en disgrâce, s’insurge volontiers contre les gloires usurpées, se méfie de la reconnaissance populaire et exècre l’arrogance des personnes incultes. Explosant poncifs et idées préconçues, il renverse les perspectives en multipliant les angles d’approche. Le parti pris est assumé. S’il adule Stendhal, Proust et Wilde, il voue aux gémonies les Baudelaire, Céline, et Aragon, tout cela dans une possible mauvaise foi. Car, s’il ne suffit pas de ruiner un auteur pour être convaincant, la valeur d’une œuvre nait aussi de projection que l’on fait d’elle.
Tel un insecte papillonnant autour d’un réverbère, il s’approche au plus près de l’«évidence» sans jamais craindre de se brûler à la lumière d’un texte. Refusant la prudence et l’humilité, il revendique aisément son goût de l’arbitraire. Magnifique et drôle aussi, inattendu, presque vulnérable lorsqu’il confie que les jours sombres il se revigore en visionnant quelques célèbres bandes de Disney. Ainsi nous apparaît Charles DANTZIG. D’autant plus brillant lorsqu’il se montre le moins mesuré. On comprendra vite que l’auteur préfère les livres aux hommes, les mots à la vie.
Son livre donne mieux que de véritables réponses et offre aussi un portrait en creux de l’écrivain, plus pudique et nostalgique qu’il n’y parait. Il cherche à porter l’amour du verbe. Avouons que ce procédé n’est pas aisé.
Je vous conseille de lire l’œuvre de cet écrivain qui ose se frotter à l’histoire littéraire pour percer le mystère de ses pièces maîtresses.
Tempuslegendae
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le 6 oct. 2013

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