Me qualifiant personnellement comme un fan inconditionnel de Stephen King, j'ai pu m'apercevoir, hélas, qu'un auteur, à défaut d'être l'objet de notre admiration, peut également apporter son lot de déception. En la présence, Brume, recueil de vingt-deux nouvelles, est peut-être l'un de ses moi,s bons ouvrages. Un agrégat de nouvelles à la qualité très variable, et à la profondeur souvent décevante par rapport à ce que King a tendance à nous montrer au travers de ses œuvres.
Procédons à un succinct résumé de chacun des récits constituant Brume.



  • Brume
    La nouvelle-titre, la plus volumineuse du recueil. Lue après avoir vu le film adapté, très grande déception après sa lecture. Franck Darabont a su mieux exploiter le potentiel effrayant de la nouvelle, la rendre plus vivante, plus cohérente et plus poignante. "Brume" laisse un goût amer dans la bouche, les actions manquant d'efficacité par rapport au film. Et au final, "Brume" ennuie.


  • En ce lieu des tigres
    Très courte histoire, dans le style King, effectivement, mais insipide et trop faiblarde.


  • Le Singe
    "Le Singe" relève un peu le niveau du début du recueil : apporte un peu plus de profondeur et explore mieux le capital effroi propre à l'auteur.


  • La Révolte de Caïn
    Une nouvelle moyenne, à laquelle l'on peut reprocher les mêmes défauts qu'"En ce lieu des tigres". Car en plus trop courte.


  • Le Raccourci de Mme Todd
    Peut-être l'une des meilleures nouvelles : un suspense et une incrédulité allant croissante au fur et à mesure de sa lecture.


  • L'Excursion
    Trop d'explications, et un peu trop de narration, pour une conclusion certes assez effarante, mais néanmoins insipide.


  • Le Gala de noces
    Une nouvelle impersonnelle, pas assez King ; une pseudo-policière plutôt banale.


  • Paranoïa : une mélopée
    Poème très prenant, angoissant : coup de maître de l'auteur et point d'orgue et surprise très heureuse de Brume.


  • Le Radeau
    Une des meilleures nouvelles du livre, angoissante et terrifiante, un huis-clos particulier et très bien emmené.


  • Machine divine à traitement de texte
    Excellente nouvelle ; d'une simplicité pourtant extrêmement efficace. Aucune place n'est faite à l'angoisse, mais King crée un surnaturel saisissant à partir d'un objet pourtant dérisoire, et met en exergue une exégèse superbe de la création littéraire.


  • L'homme qui refusait de serrer les mains
    Un récit hélas trop narratif, pour peu de sensations.


  • Sables
    Cette fois-ci de longueur convenable, "Sables" est une nouvelle de bonne facture, sans plus. Peu de réelles émotions à sa lecture.


  • L'Image de la faucheuse
    La deuxième vente professionnelle de la carrière de King aborde un thème récurrent de ses écrits : le scepticisme suivi de la crainte. Pionnière de plusieurs de ses nouvelles, l'on comprend ce qui les rendit de si bonne facture.


  • Nona
    La meilleure nouvelle du livre, où King explore avec brio le subconscient d'un narrateur dévoré par le produit de son imagination.


  • Pour Owen
    Avec "Paranoïa", deuxième petit intermède du recueil, très beau poème - destiné au fils de l'auteur.


  • Le Goût de vivre
    Avez-vous déjà vu Saw ? "Le Goût de vivre" pourrait refléter la détermination des personnes prêtes à survivre aux "eux de Jigsaw ; avec Nona, la meilleure nouvelle de l'ouvrage.


  • Le Camion de l'oncle Otto
    L'obsession et la peur panique : l'un des thèmes préférés de King. Mais en général, il sait cent fois mieux l'exploiter.


  • Livraisons matinales (laitier n°1)
    ... Euh ?


  • Grandes Roues : où l'on lave son linge sale en famille (laitier n°2)
    Les deux nouvelles "Laitiers" furent décidément une sorte d'école buissonnière pour King.


  • Mémé
    L'angoisse d'un jeune homme seul à la maison, terrifiée par sa grand-mère clouée au lit. Un huis-clos intéressant.


  • La Ballade de la balle élastique
    La psychose d'un auteur, que King exploite hélas très mal. A l'image d'un Manon Lescaut ou d'Égarements du cœur et de l'esprit, sorte de mémoire raconté par un éditeur ; les actions sont plutôt tièdes, et parfois trop longues, pour ne finalement déboucher sur pas grand-chose.


  • Le Chenal
    Un excellent récit, un conte sur la mort, l'oubli, le chagrin, la psychose... King y mêle habilement tout ce qui peut retranscrire son environnement. Et à juste titre, car lui-même la considère comme une de ses nouvelles favorites.



Au final, la lecture de Brume offre un rendu contrasté, avec son lot de déceptions et de lenteurs passagères. Seules quelques nouvelles sortent réellement du lot pour nous redonner goût au King que nous connaissons ; oublions vite les quelques déboires que Brume nous a offert, et n'en retenons que les meilleurs points. Car s'ils ne foisonnent pas tant que ça, ne le nions pas, ils ne manquent pas d'intérêt.


(Critique écrite sur Babelio, le 20/03/2015)

Aldorus
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le 22 juin 2016

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