- Édition lue : publiée en septembre 2002 aux éditions GF Flammarion. EAN : 9782080721211. La note ne prend pas en compte la présentation et le dossier, qui sont un apport intéressant cela dit.
Résumé
La prise de position contre la peine de mort est marquante mais la vision paternaliste et conservatrice de l'auteur pose problème.
Détails
Partir du fait divers incarné par Claude Gueux pour démontrer l'horreur de la peine de mort est un choix honorable pour l'époque, mais l'éloignement du réel pose d'amblée la question de la manipulation des faits par Victor Hugo. Il s'agit certes d'une fiction mais le choix de faire le lien avec une histoire vraie rend l'argumentation singulière. L'auteur prétend nous narrer la vie d'un voleur qui ne serait pas un mauvais bougre, et dont le délit serait le fruit d'une pauvreté qui affame son fils, sa femme, et lui.
Et si l'on peut se réjouir de voir la peine capitale condamnée, tout comme le lien qui est fait entre conditions de vie déplorables et délinquance, la manière dont l'écrivain bisontin cherche à rendre binaire et manichéen son récit n'est pas très pertinente à mes yeux. Certes il est important de démontrer que le vol, ou d'autres délits, peuvent se comprennent mieux en analysant les conditions de vie d'un être humain, et que la condamnation morale ne doit pas être réduite à une application aveugle de lois pensées par les puissants, mais il n'est peut être pas nécessaire de rendre le délinquant aussi lisse pour faire comprendre cela. On peut d'ailleurs regretter la réécriture de la relation entre Albin et Claude, de nature homosexuelle d'après certaines sources, mais qu'Hugo préférera faire passer pour une relation quasi filiale, sans doute pour faire de Claude un personnage auquel son lectorat s'identifiera davantage.
Enfin, si l'adresse aux gouvernants donne à voir l'urgence qu'Hugo voit dans la suppression de la peine de mort, elle met aussi en lumière la vision paternaliste et empreinte de propagande chrétienne - voyant l'éducation du peuple comme une éducation strictement biblique- affirmant presque que l'émancipation des masses ne passe pas par la révolte mais par la connaissance d'un ailleurs hypothétique que les "saintes" écritures dévoileraient à des pauvres pouvant ainsi transcender l'iniquité d'une société dans laquelle iels seront, pour Hugo, d'éternel·le·s dominé·e·s.
5/10.