Crocodiles
6.6
Crocodiles

livre de Philippe Djian (1989)

avril 2006:

C'est la première fois que je lis du Djian. En bon alligator, il m'a semblé que Crocodiles était un bon test.
J'ai entendu beaucoup parler de Philippe Djian, bien entendu. Et en plus que de bons termes.
Ses passages télés sont souvent intéressants, toujours intrigants en paraissant originaux et intelligents.
J'avais aussi évidemment vu 37.2 le matin, mais le traitement Beineix...
Une amie ne cesse de louer ses oeuvres. Ma petite amie (elle n'est pas si petite) a tout lu de Djian.

Alors? Alors je me lance et viens moi aussi faire connaissance avec l'auteur Djian, ici avec un recueil de nouvelles assez disparates.
Mais le ton est largement identifiable avec un humour pince sans rire, avec un recul sur les situations qui charme autant qu'il étonne, sur les états d'âmes des personnages qui rend les lecteurs complices de l'auteur. On est accompagné. Djian nous tient par la main sans nous infantiliser pour autant. C'est amical. Humain. On a bien affaire à un bon écrivain. Le style n'appartient qu'à lui.

Identifiable, je disais et je souligne. C'est peut-être ce que je recherche le plus chez un auteur : qu'il écrive comme personne d'autre. Et là je suis servi.
Le style est très riche, agréable à lire, aussi affûté que l'humour et les histoires racontées. Il est évident que le bonhomme s'amuse avec les mots tout en ayant un profond respect de la langue française, sa richesse et ses règles obligées. L'usage du subjonctif passé est courant chez Djian et quelque part c'est novateur, malheureusement. Moi aussi j'aime bien ce temps même s'il m'échappe parfois et que j'aimerais plus le maîtriser. Pas de facilité chez Djian, pas de paupérisation grammaticale.

Seule la syntaxe est parfois désarticulée. Question de rythme. Un peu comme cette dernière phrase par exemple.

Les histoires sont très bonnes. Dans quel sens, c'est vague? Dans le sens que comme il sied à la nouvelle, sa forme, son caractère permettent (et Djian ne s'en prive pas) d'amener par le rythme et la durée le lecteur là où bon lui semble, là où il ne s'y attend pas. Les histoires prennent des crochets inattendus et renforcent le sentiment que l'on a de lire des textes jamais lus ailleurs. Il est très plaisant de lire sans se douter du dénouement, d'être surpris de ne pas trouver de dénouement même!

Donc, de l'originalité, de l'effort, du style, du labeur, de l'intelligence, bref, Philippe Djian m'a bluffé.
Et j'abonde dans le sens de mes amies, petites ou grandes. Voilà un très grand écrivain, si loin des piètres tâcherons Darrieusecq, Jardin, Nothomb et consorts, qu'on nous sert ad nauseam en nous les pointant comme de grands auteurs par le biais de la télé complice des systèmes éditoriaux.
Alligator
9
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le 22 nov. 2013

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