Charlie Gordon est un attardé qui récure les chiottes dans une boulangerie. Il est tellement bête qu'il ne se rend pas compte que ses compagnons se moquent de lui. Il suit les cours pour attardés de Miss Kinnian, mais ne retient quasiment rien. Un jour, les docteurs Nemur et Strauss l'opèrent en même temps qu'une souris de laboratoire, Algernon. Les capacités intellectuelles de Charlie et Algernon se décuplent. Mais pour combien de temps ?
Le livre se présente comme le journal de Charlie Gordon, du 3 mars au 21 novembre. Au début il y a plein de fautes. Puis les fautes disparaissent et le vocabulaire devient de plus en plus élaboré. Charlie comprend le test de Rorschach, les abstractions, l'intérêt du récit de fiction. Il comprend aussi qu'on s'est fichu de lui. Il développe un sens moral. Il a aussi des réminiscences, sous forme de flashes violents : son père trop occupé, sa mère qui refuse d'accepter que son fils ne soit pas comme les autres, sa soeur qui le déteste... Charlie surmonte tout cela grâce à des séances de psychanalyses, mais il ne parvient pas à surmonter sa peur de la femme, et notamment de son professeur, Miss Kinnian, qui pourtant voudrait bien.
Au sommet de son évolution, Charlie est consterné de la segmentation de la connaissance et de la petitesse des spécialistes qu'il vénérait au départ. Cela pose même des problèmes avec Alice, dont il s'éloigne. Il est même sur le point de développer des dons de télépathe, mais sans les maîtriser.
Puis vient la crise, quand Algernon et Charlie sont emmenés dans un congrès comme le résultat de l'expérience. Charlie ne supporte pas qu'on dise qu'il n'était pas humain avant son opération. Il fuit avec Algernon. Part à la recherche de son père. Rencontre une artiste folle de New York, avec qui il découvre l'amour libre. Comprend finalement qu'il va régresser, et attend dans une grande angoisse sa régression. Il finit à l'asile Warren, en recommandant qu'on mette des fleurs sur la tombe d'Algernon (le titre a donc bien des résonnances funèbres).
C'est un roman plus torturé qu'il n'y paraît, et sous son schéma bien huilé, il est poignant. La partie la plus prenante est celle du développement des capacités de Charlie ; la seconde est plus sombre, avec un Charlie de plus en plus torturé. Il aperçoit fréquemment son ancien moi qui attend son heure : dans le reflet d'une glace, etc... et souffre de dissociation de la personnalité, surtout sous l'effet de l'alcool.
Je classe moins ce livre dans les ouvrages de S.F. que dans le roman social, car au fond c'est une belle plongée dans le monde des inadaptés psychomoteurs. Pas de bons sentiments, du concret : le roman américain à son meilleur.
+ Merci à Julie de m'avoir fait découvrir ce livre.
+ Ceci est ma 500e critique, wouhou ! !