Décollera, décollera pas ?

Note et critique pour l’ensemble du cycle

Parlons peu, parlons bien : Les Cités des Anciens, nouveau cycle de Robin Hobb qui revient à son univers de prédilection, ne vaut, hélas, ni L’Assassin Royal, ni Les Aventuriers de la Mer. S’agit-il donc d’un mauvais cycle ?

Autant le dire tout de suite, si Les Cités des Anciens s’avère en deçà de ses prédécesseurs, ça n’en reste pas moins une lecture agréable. C’est un point qu’il me semble important de souligner puisque je vais par la suite m’attarder sur mes regrets concernant le cycle. Alors d’emblée : replonger dans l’univers si riche de Robin Hobb fut un réel plaisir ! Étant une suite directe aux Aventuriers de la Mer, c’est avec une joie emprunte de nostalgie que l’on retrouve la cité de Terrilville, les étonnantes Vivenefs et ce fameux Désert des Pluies sur lequel planent toujours tant de mystères. Et, comme à l’accoutumée, mais ce n’est plus une surprise désormais, l’auteur nous fait profiter de son style toujours aussi fluide qui vient faciliter la lecture.

Seulement voilà, cette fois-ci, je n’ai pas retrouvé ce qui faisait les deux grandes forces des cycles précédents : la qualité d’écriture des personnages et de l’histoire. Concernant les protagonistes, ceux-ci bénéficient toujours d’une psychologie plutôt soignée qui les rend vivants aux yeux du lecteur, mais on s’y attache avec plus de difficultés. De mon point de vue, cela vient du fait qu’ils nous agacent parfois, que ce soit par leur caractère ou leurs actions (ou plutôt leur absence d’action). Alise, Thymara ou encore Sédric sont assez emblématiques de cette tendance, s’épanchant constamment sur leurs états d’âme, et ce qui s’avère indispensable à la bonne construction d’un personnage devient finalement assez lourd à force de répétition. De la même manière, les quelques protagonistes issus du cycle précédent des ADLM, et qui font office de personnages secondaires, semblent avoir tout perdu de leur charisme passé. Dommage. Au final, si quelques uns comme Leftrin ou Kanaï sortent suffisamment du lot pour nous préserver de l’indifférence, c’est davantage à l’histoire qu’on finit par s’accrocher, dans l’espoir d’y trouver des réponses aux questions qui nous taraudent depuis le premier cycle de l’AR.

Car vous l’avez deviné en lisant le titre de la saga, ce sont des mystérieux Anciens et de leur gloire passée dont il sera question dans ces livres. Pas de spoil dans cette critique, non, mais c’est finalement la perspective d’en apprendre plus sur l’univers qui nous poussera à continuer. Et bien que l’on sorte du voyage avec des réponses, celles-ci nous paraissent trop peu nombreuses et on reste un peu sur notre faim. La faute à la narration selon moi, car elle ne nous octroiera jamais le privilège d’une grande révélation qui nous clouerait sur place, préférant nous distiller au compte-goutte des informations dont l’impact s’en trouve diminué. Le début est long, comme c’est souvent le cas avec Robin Hobb, mais là où les précédents cycles progressaient crescendo pour aboutir à un final éclatant, Les Cités des Anciens ne décollera jamais réellement et s’enlisera dans une monotonie que seule la toute fin viendra briser. Fin elle-même décevante tant elle est expédiée en à peine quelques chapitres qui viennent régler tous les problèmes bien trop rapidement.

Robin Hobb nous avait habitués à mieux, telle est la conclusion que j’en tire arrivé au terme de la saga. Une légère déception pour ce cycle qui ne parvient pas à égaler ses ainés, malgré un potentiel très prometteur. Mais étonnamment, on y trouve tout de même son compte. On voit les défauts mais on se laisse prendre, car après autant de cycles, on finit par s’approprier et s’accrocher à cet univers qui fait partie de nous et en lequel on croit. En cela, Les Cités des Anciens s’adresse avant tout aux fans, là où les autres resteront plus sceptiques. Une lecture sympathique si on aime, dispensable si on ne connait pas encore Robin Hobb qu’il sera préférable de découvrir avec L’Assassin Royal.