La Galatie était une province du centre de l'Asie Mineure.


Cette épître développe deux dualités :


• la dualité entre la chair et l'Esprit. Le respect de la Loi juive par les circoncis, à supposer qu'il soit effectif, peut très bien mener à développer les passions et la débauche, dans la mesure où l'on ne respecte que la matérialité de la Loi. La liste de méchancetés et de vices, parfois proche de la liste canonique des sept péchés capitaux (V, 19-21) contraste avec les vertus de paix, d'amour fraternel, de joie, de bonté et de douceur, que développent ceux qui suivent réellement le Christ et observent son enseignement.


• la dualité entre la Loi juive et la liberté apportée par le Christ. La circoncision rend esclave de la Loi, or le salut des hommes ne dépend pas du respect de la Loi, qui est une élaboration tardive, mais de la promesse faite par Dieu à Abraham, bien antérieure à la Loi. Le christianisme apporte don à la fois la liberté de ne pas se faire circoncire, et la liberté d'agir en sa propre conscience.


Vu sous cet angle, on constate que, anthropologiquement, l'émergence du christianisme correspond à un degré supplémentaire de raffinement de la pensée humaine : celui où la conscience morale individuelle est suffisamment développée pour se substituer aux mots d'ordre collectifs, rituels, tribaux, voire totémiques.


Evidemment, cette pensée va, à terme, poser d'autres problèmes : la chair, vécue comme l'Ennemi, va être méprisée et non assumée par de nombreux chrétiens, et, à côté de conduites acceptables, comme la charité, la douceur, la générosité et la tempérance, cet enseignement va conduire à refouler les plaisirs du corps dans l'Ombre jungienne du christianisme, contribuant à accumuler une tension et un capital d'agressivité considérables, qui donnera lieu aux névroses des macérations monastiques, aux démonstrations de Vertu plus ou moins formelle, et aux tartufferies bien loin de se limiter au Grand Siècle.
L'homme est ici manifestement crucifié : son corps est placé au carrefour d'un axe vertical : choisir entre l'Esprit qui sauve et la chair qui damne, et d'un axe horizontal : choisir de se centrer sur sa propre vie intérieure ou tenter d'étendre son Ego au reste du Monde.


La conjoncture a voulu que Paul utilise le symbole de la Croix pour traduire ces tiraillements. Mais l'Islam, également gêné aux entournures par la contradiction entre le respect de la Loi et la surrection de pulsions naturelles, a manifesté les mêmes symptômes de tension, de violence et d'agressivité. Simplement, on ne parle pas de croix.


D'autre part, en individualisant la conscience morale, Paul ouvre la voie à toutes les divisions et hérésies du christianisme, dans la mesure où n'importe qui peut vouloir justifier sa propre voie vers le Salut en jouant au prosélyte ou au conquérant. Luther, après bien d'autres plus obscurs, a bien hérité de cette doctrine de justification par le Foi et de la Liberté Paulinienne.

khorsabad
7
Écrit par

Créée

le 11 févr. 2012

Critique lue 144 fois

4 j'aime

khorsabad

Écrit par

Critique lue 144 fois

4

Du même critique

Gargantua
khorsabad
10

Matin d'un monde

L'enthousiasme naît de la lecture de Gargantua. Le torrent de toutes les jouissances traverse gaillardement ce livre, frais et beau comme le premier parterre de fleurs sauvages au printemps. Balayant...

le 26 févr. 2011

36 j'aime

7

Le Cantique des Cantiques
khorsabad
8

Erotisme Biblique

Le public français contemporain, conditionné à voir dans la Bible la racine répulsive de tous les refoulements sexuels, aura peut-être de la peine à croire qu'un texte aussi franchement amoureux et...

le 7 mars 2011

35 j'aime

14