Hanna et ses filles est d'abord un roman animé d'un souffle épique tout à fait hors du commun.


Par le prisme de la vie ordinaire de femmes d'une même lignée, le.a lecteur.trice chevauche et traverse à grand galop les soubresauts de la grande Histoire. L'auteure se sert de l'intime, des milles méandres de la vie de ses héroïnes pour retracer les grandes évolutions sociétales du monde occidental, de l'âpreté du monde rural, en passant par les guerres, l'avènement de l'industrialisation et jusqu'à la société de consommation et d'information que l'on connaît encore aujourd'hui.


Pour moi, c'est l'axe directionnel principal de ce roman davantage encore, comme on pourrait le penser, que la question de la transmission ou du poids des héritages familiaux. Fredriksson fait de chacune de ces trois héroïnes, Hanna, Johanna et Anna avant tout un témoin de sa propre époque et des défis de sa génération. En ce sens, elle propose quasiment trois romans en un.


En arrière-plan à ce marqueur historique, elle pointe cependant aussi la perpétuation de certains aspects de la destinées des femmes, laissant entendre que si les conditions de vie peuvent en effet avoir formidablement évolué en un siècle, les schémas de comportements féminins n'ont pas forcément connu de révolution de la même ampleur. En somme, semble-t-elle dire, le lave-linge a beau avoir soulagé les femmes d'un pénible labeur, c'est toujours sur leurs épaules que pèse l'attente de travailler à le faire fonctionner. Même si le champs des possibles n'a cessé de s'élargir, la force centripète qui tend à vouloir ramener les femmes à leur rôle "traditionnel" reste puissante. C'est sans doute pour cette raison que Fredriksson a donné quasiment la même sonorité aux trois prénoms de ses héroïnes, pour désigner symboliquement ce qui reste immuable, profondément ancrée, comme le "Anna" des 3 prénoms.


Enfin, malgré la focale résolument féminine du roman, les personnages masculins sont loin d'être négligés. Ils sont traités de manière intéressante et nuancée, montrant que les carcans sociaux ne sont bien évidemment pas réservés qu'aux femmes.


On l'aura compris, je conseille très vivement cette lecture, aux femmes comme aux hommes, pour la puissance de sa narration et la qualité de son écriture.


Merci de m'avoir lue,
Amitiés,
Dustinette

Dustinette
8
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le 26 sept. 2019

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Dustinette

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