En plein hiver dans une station balnéaire de Corée (du Sud) la rencontre d'un bédéaste français et d'une jeune coréenne. Ambiance douce et zen pour ce très court récit d'une amourette qui n'a pas eu lieu.
Voilà une lecture pour le moins "internationale" : Élisa Shua Dusapin est né en 1992 d'un père français et d'une mère coréenne. Elle même partage sa vie entre la Suisse et la France !
En 2016, elle publie son premier roman, un succès, Hiver à Sokcho, récompensé par le prix Régine Deforges à Limoges en 2017 et qui a été adapté au cinéma en 2023 par Koya Kamura, un réalisateur ... franco-japonais !
Film et livre sont au programme du Festival de Vernoux Roman et Cinéma 2025, ce qui motive cette année notre lecture tardive.
Un français Yan Kerrand, un normand, débarque en plein hiver dans un hôtel pas trop glamour de Sokcho, sur la côte nord-est de la Corée du Sud, tout près de la frontière avec celle du Nord. « Sokcho, une destination balnéaire. Qu’il soit prévenu, il n’y avait pas grand-chose à faire en hiver. Les clients étaient rares à cette période. »
Kerrand est un bédéaste, un dessinateur, venu chercher inspiration et décors exotiques pour de futurs albums. Il trouve que Sokcho ressemble au « monde Playmobil » et voudra visiter les montagnes du Seoraksan et la DMZ (c'est tout de même la frontière la plus infranchissable de la planète et le plus ancien "mur" de notre époque éclairée).
La réceptionniste de l'hôtel est elle-même métissée (de père français) et ses compatriotes se retournent sur son passage. Sa mère travaille comme poissonnière au port et voudrait voir sa fille de 25 ans déjà mariée. Elle sait préparer le fugu, ce fameux poisson aux viscères toxiques, « seule poissonnière de la ville à posséder la licence qui lui permettait d’en cuisiner, ma mère en préparait chaque fois qu’elle voulait briller ».
➔ Voilà un court récit, celui d'un moment suspendu dans cette station balnéaire déserte. Tout est comme suspendu ici : la ville de mer suspendue entre deux saisons, le français entre deux vols ou deux albums, la coréenne entre deux amours.
Une ambiance douce, rêveuse, zen, qui nous évoque les BD japonaises de Jiro Taniguchi ou Frédéric Boilet ou peut-être le récent Jour de ressac de Maylis de Kerangal.
L'ambiance qui convient à cette très courte histoire d'une amourette qui n'a pas eu lieu.
➔ Une petite écriture sèche et factuelle (c'est elle qui raconte) qui laisse au lecteur le soin (et le plaisir) d'imaginer les sentiments derrière les gestes.
Avec tout un tas de petites infos sur la vie coréenne, les bains, la chirurgie esthétique (« la chirurgie t’aiderait peut-être à trouver un meilleur emploi »), l'hiver, et bien entendu la cuisine, ...
Et quelques jolies pages sur le dessin puisque le héros est bédéaste.
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