Il est des livres qui vous retournent le cœur, qui vous font ressentir des centaines d’émotions, qui vous émeuvent, qui vous prennent aux tripes. « J’ai mille ans … » de Jean-Marie Quéméner est de ceux-là pour moi. Il est un des livres que j’ai lus cette année qui m’a le plus marquée et je pourrais même dire de ces dernières années.
Portée par la voix de Amal, née au milieu de nulle part, au fin fond de l’Afrique, au Nord du Soudan, c’est l’histoire de cet enfant et de sa mère, dans un désert de poussières, où le seul espoir est de quitter ce lieu pour tenter sa chance ailleurs. Sa mère, prostituée dans un bordel fréquenté par les locaux et des expatriés, souhaite un avenir meilleur pour sa fille. C’est pour cela qu’elle entreprend le périlleux voyage pour quitter la misère vers l’Europe, via la mer Méditerranée qui a déjà englouti tant de migrants…
Ce magnifique hommage écrit par Jean-Marie Quéméner est rempli de poésie malgré la dureté du propos. Offrant un visage à ces oubliés pour qui l’Europe ressemble à un Eldorado et qui tentent de la rejoindre au péril de leur vie, cette histoire pourrait être celle de milliers d’entre eux.
J’ai trouvé la plume fluide et magnifique. Comment ne pas s’attacher à ce bébé et à cette mère qui souhaitent « seulement » vivre ? La galerie de portraits qui entoure le récit offre un florilège de personnages, pour certains ô combien attachants et captivants tandis que d’autres exécrables et profitant de la misère humaine.
Je n’ai absolument rien à reprocher à ce livre ou à vainement tenter de trouver l’un ou l’autre grief. Sans forcément le vouloir, ce roman mène à la réflexion, à ce qui est vraiment fait contre les dangers de l’eau mais aussi ces passeurs pour qui une vie humaine n’est qu’une somme d’argent. Même si j’étais déjà bouleversée par les migrants des quatre coins du globe, dorénavant, je ne regarderai plus de la même façon ces mers et océans qui submergent bien des espoirs en quête simplement de liberté.
Merci Jean-Marie Quéméner pour ce livre fabuleux et pour avoir offert votre plume à ces multiples voix oubliées.