À travers Je voulais vivre, Adélaïde de Clermont-Tonnerre relève un pari audacieux : redonner chair, voix et complexité à l'un des personnages les plus fascinants et honnis de la littérature française, Milady de Winter.
Là où Dumas voyait une intrigante, une sorcière ou une meurtrière, l'autrice choisit d'entendre Anne de Breuil, petite fille blessée, jeune femme trahie, amante passionnée, mère prête à tout, figure éprise de liberté dans un monde qui refuse aux femmes le droit d'exister autrement qu'à travers les hommes.
On suit le destin de cette héroïne tragique, depuis son enfance marquée par la violence jusqu'à sa condamnation par les Mousquetaires. Mais ici, le regard change : plus qu'un procès, c'est une plaidoirie, un plaidoyer bouleversant pour une femme condamnée d'avance, parce que trop belle, trop libre, trop insaisissable. Derrière la manipulatrice, l'empoisonneuse et la séductrice se dessine un portrait nuancé, vibrant, profondément humain.
La plume de l'autrice est élégante, immersive, et son souffle romanesque emporte tout sur son passage. On retrouve les complots, les duels, la fureur des intrigues du XVIIᵉ siècle, mais dans une narration moderne, fluide, qui met avant tout en lumière les émotions et les blessures des personnages. Les figures familières de Dumas – Athos, Porthos, Aramis, Richelieu, Buckingham, et bien sûr D Artagnan – apparaissent sous un jour nouveau : non plus seulement héros flamboyants, mais hommes faillibles, prisonniers eux aussi de leur époque et de leur vision patriarcale.
J'ai été happée de la première à la dernière page par ce roman qui mêle fidélité à l'esprit de Dumas et regard contemporain. Je voulais vivre n'est pas seulement une réhabilitation littéraire de Milady, c'est aussi un cri universel : celui d'une femme qui réclame le droit d'être aimée, respectée et libre.
Un grand roman, à la fois féministe, historique et profondément romanesque. Une fresque inoubliable, qui nous fait voir sous un autre jour l'un des mythes fondateurs de notre imaginaire collectif. Pour moi, un immense coup de coeur de cette rentrée littéraire.
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