Et voilà, moi qui appréciais déjà beaucoup cet artiste, je me mets à apprécier tout autant l'humain et l'homme poétique.
Pourtant habituellement je n'aime pas trop les poètes. Souvent très con-centrés sur leur petite personne, je me sens très peu concernée par leurs préoccupations et élucubrations nombrilistes.
Mais Mathias Malzieu, je l'aime bien. Comme un pote que je n'ai pas rencontré. On a finalement pas mal de points et recoins communs.
Moi aussi j'ai adopté la philosophie des Jedi. Je me prends pour Maître Yoda quand je tente d'attraper un objet. Si si en se concentrant très fort, il va finir par bouger.
Moi aussi je crois au merveilleux, au Nutella, au whisky, aux rêves, aux gens gentils, à l'amour, à des soirées sans fin entres potes, au pouvoir de la lecture et de la création, à réussir sa vie d'adulte en gardant un esprit d'enfant.
Mais parfois elle est moche la vie. Elle vous enlève trop tôt votre maman. Alors quand Mathias Malzieu met des mots de douceur sur cette douleur, ça fait du bien.
Et puis un jour vous faites une prise de sang et votre généraliste vous envoie en urgence chez un hématologue qui vous prescrit des analyses complémentaires. Le labo n'a jamais vu ça : 1 litre de sang prélevé, 47 petits tubes.
Et vous rentrez chez vous en pleurs avant d'avoir les résultats parce que sur la plaque du cabinet du spécialiste, il y avait gravé "hématologue et oncologue". Là vous vous dites que Dame Oclès qui avait réussi à venir à bout de votre maman vient vous saluer de beaucoup trop près et beaucoup trop tôt. C'était il y a 5 ans. La généraliste m'a dit après coup "la dernière fois que j'avais vu une patiente avec des analyses comme les vôtres, 6 mois après elle n'était plus là".
Hihi, moi je suis là...J'ai arrêté de fumé, commencé à courir et continué à vivre, à sourire encore plus fort. Pour ne rien louper.
Les prises de sang sont toujours bizarres, avec peu de globules blancs, peu de globules rouges, mais ça va. Comme ils sont peu nombreux, ils sont tous super entraînés.
Alors l'expérience de Mathias Malzieu, plus terrible, plus grave, plus proche encore de Dame Oclès que la mienne, je l'ai "véc-lue" avec le sourire et quelques émotions qui ressortaient par les yeux sous forme de petites gouttelettes.
Il décrit avec beaucoup de délicatesse l'aridité carcérale de l'hôpital, à laquelle s'oppose un service 10/10 sur l'échelle de l'humanité. Et ce temps passé au milieu de ces Nymphirmières où tous se battent à la frontière de la mort, si loin de la vie de tous les jours et de ses détails. Boire un coca ou s'habiller autrement qu'en pyjama devient un privilège. ça vous secoue sérieusement la normalité. Et ça me rappelle quand j'allais voir ma maman en aplasie (on dirait un nom de pays exotique), avec ma théière sous le bras, à faire le tour des chambres pour offrir à ceux qui en voulait, du vrai thé bien infusé avec de belles feuilles, pas ces petits sachets papier de poussière infâme. Je trouvais ça hyper important de partager de grand-petit luxe avec eux.
On ressort de cette lecture avec un cœur plus gros, un sourire plus large, un espoir démesuré, pour passer outre les petits tracas et étirer le temps sur les petits bonheurs.
Alors faut-il le lire ? Oui oui oui. Je ne vais pas me mettre au skate, mais j'irais bien m'acheter un fauteuil œuf...Et je souhaite à Mathias plein de poèmes, plein d'amour, plein de temps, de cheveux roux, de coca, de whisky (mais pas les 2 en même temps, c'est dégueu), de voyages et surtout plein de concerts pour qu'il puisse reprendre ses longueurs de nage au-dessus de la foule dans les plus grandes salles.