Shakespeare a inventé un miroir éternel


Julius Caesar est la dix-neuvième pièce de Shakespeare. Je lis cet été dans l’ordre chronologique toutes ses pièces , pour tenter de suivre l’évolution du style et de l’idée de William. J’en parlerai plus tard.


On est encore ici dans les pièces directes, sans pièges dans l’écriture, des vers simples, pour suivre dans cette pièce le récit de Plutarque.


Je veux en donner un seul exemple (mais on pourrait le faire pour toute la pièce):

Cassius parle dans la 1° scène du 2° acte:


“I think it is not meet

Mark Antony, so well beloved of Caesar,

Should outlive Caesar. We shall find of him

A shrewd contriver; and, you know, his means,

If he improve them, may well stretch so far

As to annoy us all; “


«  Je pense qu’il n’est pas convenable que Marc Antoine, si aimé de César,

survive à César. Nous trouverons en lui un rusé conspirateur; et vous savez que ses moyens, s’il sait les utiliser,  pourraient tous nous inquiéter .»


Voici ce qu’écrit Plutarque

« Après cela, ils délibérèrent s’ils devaient occire M. Antonius avec César : ce que Brutus empêcha, disant qu’il fallait qu’une telle entreprise qu’on regardait pour la défense des lois et de la justice fût pure et nette de toute iniquité. »


Car Brutus veut y mettre les formes:


“Let’s kill him boldly, but not wrathfully.

Let’s carve him as a dish fit for the gods,

Not hew him as a carcass fit for hounds.”

« Tuons-le courageusement, mais sans colère.

Taillons-le comme un plat pour les dieux,

pas comme une carcasse pour les chiens. »


Figurent aussi dans cette pièce, des expressions utilisées pour la première fois, dans la 3° scène du premier acte, Antoine:


“Cry Havoc! and let slip the dogs of war,»

ces chiens de guerre qui sévissent un peu partout dans le monde.


Pour terminer ( pas avec Shakespeare, mais avec ces quelques remarques), je trouve depuis ma première lecture de Julius Caesar, que la superbe oraison funèbre qu’Antoine prononce sur le cadavre de Caesar ressemble – par sa construction – à l’intervention de Elihu dans le livre de Job (chapitres 32 à 36),

Shakespeare lisait la Bishop’s Bible publiée en 1569 ou la traduction anglaise de la Bible de Calvin (1560)


Il y a quelque chose de profondément intemporel dans le Julius Caesar de Shakespeare qui attire sans cesse – ce mélange d'ambition, de trahison et de quête incessante du pouvoir qui résonne à travers l'histoire et encore aujourd'hui.

Shakespeare a inventé un miroir éternel reflétant non seulement la Rome antique, mais aussi le monde que nous habitons aujourd'hui.



mermed
9
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le 9 août 2025

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