L'audacieux Monsieur Swift récolte une note à peu près équivalente sur Goodreads (4,21) et Babelio (4,27). Ce n'est pas nécessairement un critère fiable de qualité littéraire mais témoigne d'une manière certaine du plaisir pris par une large majorité de lecteurs à suivre les aventures du personnage créé par John Boyne. Le titre du livre, lointaine traduction de A Ladder to the Sky, ne peut qu'interpeller les cinéphiles, rappelant Le talentueux Monsieur Ripley, remake plutôt réussi de Plein soleil de René Clément, avec son atmosphère poisseuse et amorale. Le livre n'a rien à voir avec l'intrigue des films mais l'ambiance générale, si, et, pour une fois, ce titre, avec toute son ironie, est particulièrement bien choisi, l'audace étant une sorte d'euphémisme pour qualifier le caractère de cette charmante crapule (le mot n'est pas trop fort) et mystificateur de Monsieur Swift. Du plaisir, une fois encore, on ne peut qu'en avoir en se délectant de la construction virtuose du roman, avec pour chaque chapitre une montée ingénieuse de la tension. Le livre est très brillant, non par son style, mais par son efficacité à nous manipuler, à l'image des actes Monsieur Swift, en moins cruel évidemment, et avec notre assentiment. L'ouvrage est un délice de gourmet, du nanan comme aimait à le dire Pivot du temps d'Apostrophes, notamment grâce à ses dialogues percutants, sarcastiques et parfois hilarants de par la mauvaise foi caractérisée et la prétention de certains protagonistes (pas seulement Swift mais aussi la sœur de son épouse ou encore une apprentie écrivaine, etc). Comme pour les films français des années 40 ou 50, la qualité du livre est d'ailleurs confirmée par la netteté psychologique des personnages secondaires, qui sont le plus souvent négligés par les romanciers. Au fond, ce qui rend la lecture de L'ambitieux Monsieur Swift aussi délectable, c'est son caractère ultra romanesque, jusqu'à la limite parfois, et son humour sous-jacent et assez monstrueux comme dans certaines comédies italiennes. La pirouette finale, délicieusement perverse, est à cette image et le livre est incontestablement aussi irrésistible que son héros.

Cinephile-doux
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le 30 mai 2020

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Cinéphile doux

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