Choisir pour héros d'un roman post apocalyptique une douzaine des vieillards mûrs pour passer l'arme à gauche c'est très couillu. Je ne pouvais pas passer à côté de ce roman, l'âge commençant à me rattraper, je me suis dit "prends des cours comme ça quand les zombies déferleront tu sauras quoi faire "... Plus qu'un roman c'était pour moi un manuel de survie.


12 vieux proches de la zombitude découvrent que le monde va s'effondrer, 12 vieux proches de la mort vont décider de se rebeller. Ils se cadenassent dans leur mouroir, passent 40 jours et 40 nuits à attendre la délivrance car Maglia la plus ancienne entend des voix qui lui prédisent non seulement l'apocalypse mais aussi la marche à suivre. Déjà... on sent que les choses risquent de déraper très vite.


La description des Mûriers, la maison de retraite où vivent nos résidents/héros fait froid dans le dos. Rien ne nous est épargné et malheureusement nous savons tous que rien n'est exagéré. Tous ceux d'entre nous qui ont eu un parent en maison de retraite le savent. Alors bien sûr que nos fiers gaillards (enfin fiers...) n'auront qu'une idée en tête : croire Maglia sur parole ( je vous assure que croire une personne atteinte d'Alzheimer est en soi drôlement truculent) et quitter cet endroit terrifiant pour lancer cette équipe de bras cassés dans un Paris dévasté. Nos petits vieux ne sont pas caricaturaux et c'est bien cela qui est le plus effrayant. Maglia qui perd la boule du haut de ces cent et quelques années, bloquée sur son lit , menacée d'escarres, fait un bien piètre chef de troupe. Mat le narrateur est un pur salaud, un vieux qu'on ne peut qu'aimer détester : un mysanthrope de première pour sauver l'humanité c'est hyper flippant. Les autres ? Un savant mélange de bave, d'incontinence, de racisme, de plus tout à fait là mais de pas complètement partis... Et tout cela déambule dans les rues de Paris en fauteuil roulant, en clopinant, en cherchant plus que de la nourriture des couches de bonne qualité. Les zombies attaquent et les scènes assez gores se suivent sans se ressembler. Ce roman est un vrai festival de l'horreur... Mais sous des apparences de roman drôlissime se cache une réelle réflexion sur notre société qui abandonne ses anciens dans des lieux où on n'oserait pas laisser un animal, qui court après la jeunesse éternelle et est prête à tout sacrifier pour ça même sa santé, même sa vie ; qui à cause de cette quête hait les vieux car vieillir c'est faiblir et faiblir c'est mourir. Ces petits vieux, on ne les aimera pas mais ce roman nous donne une sacrée leçon.


Fabien Clavel souhaite exploiter toutes les créatures qui peuplent nos peurs ancestrales et bien je vais le suivre dans ce parcours car j'ai été conquise par son apocalypse. Au passage je le remercie de m'avoir expliqué comment déssouder des zombies sans arme à feu , bloquée sur un fauteuil roulant. J'espère juste ne pas avoir à me servir de cet enseignement.

ValerieDufourd
8
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le 29 nov. 2018

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Valerie Dufourd

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