En novembre 2018, Frédéric Beigbeder se saborde en direct, fait son suicide radiophonique au micro de la matinale la plus écoutée de France, entouré de Nathan Dechardonne et Laura Salomé, avec une non-chronique qui va signifier pour lui la fin de son aventure hebdomadaire au micro de France Publique.
Un peu moins de deux ans après ce petit événement — avec le recul, assez drôle en soi et visible en vidéo ci-dessous pour ceux qui ne l’ont pas encore vu — , l’auteur du tendre L’Amour dure trois ans raconte dans L’homme qui pleure de rire, toujours sous son pseudo d’Octave Parango, ce moment de radio embarrassant ainsi que les heures qui l’ont précédé, faites de déambulations nocturnes entre le Fouquet’s, le Crazy Horse et le Medellin. Il profite aussi de l’occasion pour livrer son sentiment sur l’époque actuelle et évoquer quelques souvenirs.
Tout le monde connaît Frédéric Beigbeder, personnage médiatique haut en couleurs, dont le roman 99 Francs (inspiré par de son expérience dans le monde de la pub) avait fait sensation il y a une quinzaine d’années avant d’être adapté au cinéma par Jan Kounen.
Cette nouvelle auto-fiction est pour lui l’occasion de revenir sur les heures qui ont précédé son sabordage médiatique mais également d’évoquer la tyrannie de l’humour, qu’il dénonce, notamment celle pratiquée par certains chroniqueurs de France Inter qu’il considère un peu comme des « fonctionnaires de l’humour ». A ce sujet, on appréciera plus particulièrement ses conseils bien avisés pour devenir comique radiophonique français. Le top du Lol !
Il évoque aussi son passé, ses années folles de jeune adulte quand, avec ses amis du Caca’s club, il organisait des fêtes mémorable dans le Paris chic et branché.


Ce livre aurait pu être chiant, l’œuvre d’un misanthrope, d’un mondain aigri et dépassé qui ne comprend plus rien au monde qui l’entoure, mais au final rien de tout ça. On découvre un homme attachant, parfois touchant, parfois agaçant aussi, et qui porte un regard plutôt franc et direct sur ce qu’a été sa vie jusqu’à maintenant.
On retrouve dans ce livre le style léger et percutant du désormais pensionnaire du Masque et la plume… et des Grosses Têtes, — il n’est pas à un paradoxe près, et d’ailleurs c’est ce qui fait tout son charme.
Un dandy tendre et mélancolique dont la vie est désormais rythmée par les allers et retours entre Saint-Jean-de-Luz (où il vit depuis quelques années) et Paris, mais surtout par ses occupations familiales, lui qui est désormais père de trois enfants.


Au fil des pages, il évoque donc aussi son rôle de père attentif et soucieux face à un monde qui le dépasse de plus en plus et qu’il observe assez incrédule du haut de ses 54 ans, conscient aussi de son âge et de son corps qui vieillit et du temps qui file de plus en plus vite… un peu comme il l’avait fait dans La frivolité est une affaire sérieuse (Editions de l’Observatoire, 2018).
Même si on n’est pas raccord sur tout, ce n’est d’ailleurs pas le but, on appréciera en tout cas le côté Je-m’en-foutiste, détaché mais concerné, lunaire mais lucide, de cet homme qui comprend autant les revendications des gilets jaunes, que celles des filles du Moulin rouge.
On appréciera aussi l’honnêteté et la franchise, qui transpire de ce roman, la manière qu’il a de faire une sorte de mea culpa, un bilan d’incompétence, tout en restant caustique (mais jamais cynique), avec une plume acerbe qui, en tout cas, est toujours aussi agréable à suivre.
https://www.benzinemag.net/2020/05/12/frederic-beigbeder-lhomme-qui-pleure-de-rire-la-fin-du-lol/

BenoitRichard
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le 12 mai 2020

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Ben Ric

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