une fresque intime au cœur de la Grande Guerre

Nous sommes au cœur de l’année 1917, dans un domaine viticole du Roussillon, alors que la guerre déchire l’Europe. Isaure Sauvel, épouse et mère de soldats partis au front, s’épuise à maintenir la propriété familiale à flot. Une nuit d’orage, un jeune homme frappe à sa porte : Théodore Brienne, peintre prometteur, mais aussi déserteur. Refusant d’abord de l’accueillir, Isaure voit sa décision contournée par sa fille Rosalie, dix-huit ans, qui choisit de l’abriter en secret dans le grenier.

Commence alors un huis clos tendu, où les destins des femmes restées à l’arrière s’entrelacent. Isaure, Rosalie et Marthe, la domestique, portent le roman par leurs voix singulières. J’ai été profondément touchée par la manière dont Gaëlle Nohant rend hommage à ces figures féminines, contraintes d’assumer des rôles nouveaux, de décider, de s’émanciper dans un monde encore corseté par les convenances.

Théodore, quant à lui, est un personnage d’une grande complexité. Derrière le déserteur se cache un artiste sensible, habité par la peinture, qui a côtoyé Matisse et Derain. Sa fragilité contraste avec la brutalité du conflit, et nous interroge : peut-on juger un homme qui a déjà traversé l’enfer du front ? Je me suis surprise à ressentir beaucoup d’empathie pour lui, malgré ses contradictions, tant son rapport à l’art et à la vie résonne avec humanité. Le roman s’ancre aussi dans une réalité historique : en 1917, les désertions se multipliaient dans l’armée française, souvent réprimées avec une extrême sévérité, par des exécutions, ce qui confère au destin de Théodore une tension tragique.

Sous une construction classique, le roman explore des thèmes universels : le poids des choix moraux, la liberté, l’amour, mais aussi l’héritage des silences. Gaëlle Nohant nous entraîne dans une fresque à la fois intime et historique, où chaque personnage, lumineux et imparfait, incarne les tensions d’une époque bouleversée.

Porté par une écriture sensible et vibrante, L’homme sous l’orage est à la fois une ode aux voix féminines, un questionnement sur le courage, et un récit profondément romanesque.


https://latelierdelitote.canalblog.com/2025/09/l-homme-sous-l-orage.html

Lalitote
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le 11 sept. 2025

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