Haletante course aux mots d'esprit simonien

Je le savais. Je savais que ce livre me plairait, que ce flot continu de mots m'emporterait loin, très loin de ce que je lis habituellement. L'un de ces trous noirs en littérature que l'on dévisage depuis des années mais dont la seule envie de plonger dans l’œil nous fait peur. Peur d'être encore déstabilisé, aspiré, anéanti.Et pourtant, ma peur est devenue acte, comme l'acte d'une envie.

Je souhaite à chacun d'avoir en sa vie quelques découvertes de ce genre. Une découverte à l'odeur de remise en question. Eh bien depuis quelques temps je suis devenu adepte de ces nombreuses découvertes. Elles sont nécessaires pour avancer, pour changer la conception traditionaliste et parfois poussiéreuse que l'on se fait d'un univers. Découvrir c'est frapper à grands coups tout ce que l'on sait, tout ce que l'on a lu. Non, ça ne détruit rien (et heureusement), mais ça participe à une déformation de nos savoirs terriblement nécessaire pour ne pas s'enfermer dans une position confortable vis-à-vis de la culture. Il faut simplement franchir le pas, tendre sa main pour saisir "La chevelure de Bérénice".

Chez Simon, ce qui m'a pour le moins surpris est cette absence de ponctuation. A vrai dire "surpris" est mal employé, puisque la surprise revêt des habits de jouissance. Écrire ainsi, sans filet, sans rien pour cadrer la narration, voilà ce qui faisait enfin d'une œuvre, des œuvres. Elle était folle cette illumination que j'ai eue tard dans la nuit. J'étais là à relire chaque paragraphe, à le déformer, à le lire d'un trait puis revenir pour réécrire ce que Simon avait posé sur papier. Cette sensation d'appropriation était exaltante. Moi, lecteur, j'écrivais chaque phrase, je m'amusais follement. Oui je m'amusais et on me considérait. Une relation fusionnelle s'installe parfois entre les œuvres et leur lecteur, relation qui s'est nouée hier soir, m'attachant à ses lignes, qui nourriront dans le futur des souvenirs émotifs.

"Trempé inachevé le livre détruit se lit comme une chanson dont la danse achève les chimères construites dans un cerveau de papier m'envole dans l'ivre cœur de ce que je n'ai jamais pu aimer à la découverte de choses qui me tentaient inlassablement frappé des pages à l'ivoire craquant je valsais pieds titubant et maladroits à qui j'adressais prières et volontés de jouir pour longtemps de caractères torturés consumé je fermais la chevelure ressuscité"

Et quand un livre me donne l'envie d'écrire je ne peux qu'être conquis.
TueReves
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Créée

le 28 août 2012

Modifiée

le 28 août 2012

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