La plongée dans la psyché d'êtres aussi effroyables que Hitler, Mussolini, Attila ou Cyrille Hanouna est un chemin tortueux et tangent.
Le risque est en effet double : d'un côté, trop humaniser son sujet, et risquer de l'excuser, même inconsciemment, ou à contrario de le placer au-delà de l'humanité, dans un kitsch métaphysique ("Le Mal") qui ne correspondrait à rien de réel.
Vargas Llsoa arrive, avec la fête au bouc, a transcender ces difficultés et nous fait entrer dans l’inconscient de Rafael Trujillo, dictateur de St-Domingue pendant 30 ans.
La grande force de Vargas est de dispatcher le point de vue entre les personnages et les époques. On passe ainsi du dictateur aux conspirateurs travaillant à l'attentat qui lui ôtera la vie, puis, 35 ans plus tard à la fille d'un ex-ministre de Trujillo revenant à St-Domingue. Tout cela offre une large et dense perspective sur le régime, nous faisant ressentir toute la folie bureaucratique et l'hypocrisie du règne.
Vargas Llosa nous gratifie également d'une galerie de portrait assez brillante où surnagent Johnny Abbès, tortionnaire répugnant, le Président Balaguer, fantoche brillant attendant son heure et surtout Trujillo himself, froid, tartufe, maniaque et dont les dernières pages, brillantes, comptent parmi ce que j'ai lu de plus fort dans la dégradation de l'Humain par le pouvoir.