La Fortune des Rougon est l’œuvre liminaire des Rougon-Macquart. Émile Zola en bon chef de file du naturalisme insiste sur l'hérédité et les tempéraments de la famille qu'il nous présente ici.
Le livre fait s'entremêler d'un côté les amours de la jeune Miette et de Silvère, un rejeton de la grande famille ; de l'autre, les manigances des Rougon pour parvenir à retourner la « fortune » de leur côté. Le roman prend place juste avant que Louis-Napoléon Bonaparte (président de la seconde République) ne réalise le fameux coup d'État du 2 décembre 1851 qui marquera un retour à l'Empire.
Le village de Plassans, en province, constitue un microcosme où s'affrontent nettement les bourgeois, les nobles, et les ouvriers.
Les jeunes amants Miette et Silvère sont idéalistes, voient dans cette République qu'ils défendent ardemment et dont ils ne comprennent sûrement pas tous les enjeux un régime salvateur pour les hommes. Miette sera d'ailleurs plusieurs fois une véritable allégorie de la République.
À l'inverse, il est délectable de voir l'opportunisme des bourgeois et des nobles, qui, monarchistes à l'orée du roman, changent d'opinion au gré du vent. Il est particulièrement intéressant de noter que c'est l'épouse de Pierre Rougon, Félicie qui guide ce « Léonidas aux Thermopyles » (sic) pour arriver à la victoire. Elle est sa meilleure conseillère, agissant dans l'ombre avec succès. Mais au total, c'est bien leur famille entière qui leur permet la réussite : Eugène, qui depuis Paris, informe son père des avancées du coup d'État à venir ; Aristide, aussi opportuniste que ses parents qui mettra sa verve littéraire au service de son père ; Antoine Macquart, être immoral au possible, qui, attiré par l'argent et les plaisirs faciles oubliera facilement les manquements de son demi-frère Pierre.
La République, cet idéal, faillit, échoue, est vouée au gémonies par ces bourgeois opportunistes que nous dépeint Zola. In fine, c'est un nouvel Empire teinté de sang qui verra l'ascension de la bourgeoisie, la « fortune » des Rougon et de leurs affidés.